Parfois
on s'évertue à lire un auteur parce qu'il a été à l'origine de
belles découvertes, de très bons moments de lecture. Ouvrage après
ouvrage, on espère qu'il en sera toujours de même. En tout cas, je
ne sais pas si on peut y voir un lien de cause à effet mais depuis
que Frank Thilliez a quitté les éditions du Passage pour Le FleuveNoir, je n'adhère plus du tout à ses livres. Je pense avoir
facilement mis le doigt sur ce qui me dérange mais d'une fois sur
l'autre, je tente le coup.
Premier
point, la documentation. Franck Thilliez, on ne va pas
lui jeter la pierre, engrange des informations sur les thématiques
qu'il aborde. Seulement voilà, l'objet de ses recherches ne se fond
absolument pas dans le récit. Souvent, trop souvent, j'ai ressenti
le moment où l'auteur restituait celles-ci dans ses histoires, de
façon plus ou moins fortuite. Il n'est en effet pas rare, en dehors
des spécialistes rencontrés par les protagonistes principaux, de
trouver un personnage qui connaît justement très bien telle ou
telle donnée d'un problème à un moment clé, leur permettant à
tous d'avancer dans la résolution d'un mystère.
Deuxième
point, l'impression que le style n'est plus du tout au rendez-vous,
que les livres parus depuis Syndrôme E jusqu'à Puzzle, s'inscrivent
dans une lignée de livres aseptisés dont les ficelles sont par trop
visibles. L'attention est apportée – et là encore ce n'est pas un
mal – sur l'ambiance, sur l'atmosphère, sur la tension, avec ce
qu'il faut de rebondissements, de volonté de surprendre, mais
malheureusement, cela ne suffit pas. Il manque à ces livres ce petit
supplément d'âme que j'avais pu trouver à différents degrés dans
les autres.
Dans
Puzzle, le schéma est à peu de choses près le même. Franck
Thillliez a abandonné Lucie Hennebelle et Frank Sharko le temps d'un
nouveau roman. Si le premier tiers est intrigant, plutôt bien mené,
dès que l'on pénètre dans le huis-clos d'un hôpital psychiatrique
à l'abandon, l'attention se relâche. C'est là en effet que se
retrouvent les participants d'un jeu grandeur nature, Paranoïa, dont
on sait peu de choses sinon qu'il les confrontera à leurs peurs les
plus viscérales et que le vainqueur remportera 300 000 euros. La
machine semble vouloir s'emballer, monter en puissance dès que les
joueurs s'approprient les lieux. Pour moi en tant que lecteur, le
moteur a calé. Puzzle s'est révélé lent, brouillon, répétitif et, tout compte
fait, peu intéressant. Loin de moi pourtant l'envie d'être trop
sévère : quand était paru La Chambre des morts, je
travaillais en librairie et j'avais participé à la liesse générale
autour du livre. Pour ce qui est de Puzzle, j'aurais eu
du mal à le « vendre »...
Puzzle, de Franck Thilliez, Fleuve noir, 2013, 432 p.