Nous avons rédigé une chronique ici de la pièce La société des loisirs qui se joue actuellement au Petit Théâtre de Paris.
Dans le casting figure le comédien Philippe Caroit avec lequel j’ai eu le plaisir de m’entretenir avant une représentation.
L’occasion de discuter avec lui de la création de ce spectacle, en espérant que cela vous donne envie d’aller le voir.
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Bonjour Philippe,
Vous êtes l’adaptateur de la pièce La société des loisirs dans laquelle vous jouez également, pouvez-vous nous dire comment cela s’est passé ?
C’est une pièce que j’ai découverte il y a neuf ans, par l’intermédiaire d’un ami québécois. Il m’a appelé en me disant qu’il sortait de La société des loisirs, une pièce formidable. Il m’a envoyé le texte, par la poste encore à l’époque, car il sait que je suis toujours à la recherche de pièces pour les adapter en France. Je reçois le texte, comme j’en reçois assez régulièrement de mes différents espions, et j’ai un vrai coup de foudre à la lecture. J’ai rappelé l’auteur et il m’a donné son feu vert pour commencer l’adaptation. Entre temps, j’avais fait lire le texte à quelques directeurs de théâtre qui ne le comprenaient pas du tout car écrit en québécois. Une fois mon adaptation validée par l’auteur, je l’ai faite circuler et ça a suscité l’intérêt de quelques amis comédiens. Nous sommes passés par différents metteurs en scène et théâtres et nous avons atterris ici six ans plus tard.
C’est un parcours très long.
Oui c’est une gestation très lourde, mais l’auteur n’a jamais été joué en France. Je pense que sa deuxième pièce sera plus facile à monter. Pour la première pièce d’un auteur, même avec des acteurs solides autour de moi, ce fut assez long.
Qu’est-ce qui vous a plu dans cette pièce à la lecture ?
Ce qui me plaît beaucoup, c’est le mélange des genres comme les anglo-saxons savent très bien le faire. Ce que je reproche un peu à l’écriture théâtrale en France, c’est que souvent, soit on fait de la comédie qui ne gratte pas, soit on fait du théâtre qui a un peu de sens et on se fait un peu chier, ou alors on n’a pas le droit de rire. Ce qui me plaît chez les auteurs anglo-saxons c’est qu’ils osent mélanger le rire et des personnages désespérés.
Avez-vous apporté quelques petites idées personnelles dans cette adaptation ?
Alors j’ai changé les mots pour une sorte de « traduction » même si évidemment il ne faut pas dire ça car les québécois parlent français autant que nous. J’ai changé les références culturelles, même s’il n’y en a pas tellement ici, et j’ai aussi raccourci certaines scènes, j’en ai coupé d’autres et j’en ai même supprimé une. J’ai effectué un gros travail de remodelage.
Vous n’aviez pas envie de faire la mise en scène également après cela ?
Si, mais je ne me sens pas assez solide en mise en scène pour, à la fois, jouer un des rôles principaux et assumer la direction d’acteurs. Quand tu n’es pas sur scène tout le temps c’est un peu plus simple, mais là il n’y a que deux scènes où je suis absent dans l’histoire. En plus, quand Stéphane Hillel a assisté à une lecture il y a quatre ans, il a eu un coup de foudre aussi et m’a proposé de la mettre en scène.
Votre personnage passe par de nombreuses émotions, ca doit être très intéressant à jouer pour un comédien ?
Ah oui. Concernant mon personnage, je ne sais pas si les gens ont tellement ri, ce type étant tellement pathétique, ils vont ressentir de l’empathie et vont avoir envie d’être ému par lui. Mais à jouer, on passe de registre de comédie pure avec les quiproquos à la tragédie lorsqu’il a son fusil de chasse. C’est un rôle jouissif, ce n’est pas si facile que ça pour s’impliquer, mais c’est très intéressant à jouer.
Vous paraissiez tous très complices au moment des saluts, connaissiez-vous vos camarades de jeu avant cette pièce ?
Je ne connaissais pas du tout Lison Pennec, c’est une jeune comédienne qu’on a découverte à l’occasion. Je connaissais un peu Cristiana (Reali NDLR) qui me suit depuis trois ans sur ce projet, mais nous n’avions jamais joué ensemble, et je ne connaissais pas du tout Stéphane Guillon.
Cela se passe bien en coulisses ?
Oui, nous avons chacun nos caractères, des styles différents, des affinités mais ça se passe bien. Cela dit, hier soir comme on m’avait dit que vous seriez là, j’ai beaucoup souri aux saluts, c’est pour ça qu’on avait l’air complice (rires).
Notre dernière interview était pour Seznec, une pièce radicalement différente, c’est ce que vous aimez au théâtre, pouvoir changer d’univers comme cela ?
J’ai surtout travaillé depuis plus de vingt ans au théâtre et ensuite je suis parti vers la télévision car elle m’ouvrait ses portes et je ne voyais pas de raison de ne pas y aller. En revanche, je me suis juré de ne jamais abandonner le théâtre et je me suis forcé à le faire pour me recharger, c’est-à-dire, pour n’y jouer que des choses que je ne fais pas dans les films ou les téléfilms. Seznec, c’est une parenthèse car Robert Hossein est mon papa de théâtre en m’ayant offert le rôle de Jésus il y a vingt-cinq ans, alors que j’étais inconnu. Cela m’a donné un coup de projecteur énorme et il m’a proposé d’autres spectacles depuis que j’ai refusé. Lorsqu’il m’a demandé pour Seznec, j’y suis allé d’autant plus que ça cadrait dans le temps, la dernière était une captation télé donc on savait que ça n’allait pas déborder. Voilà ce qui m’a poussé à accepter, après, dans le style, je me dirige plutôt vers les comédies au théâtre.
Ici, on le disait, c’est encore un genre différent avec une pièce qui mêle les styles, et surtout qui aborde des thèmes peu courants accompagnés de dialogues assez crus, pensez-vous que c’est une pièce tout public ?
Ah non. Il ne faut pas emmener des enfants de moins de 12/13 ans, et encore, seulement s’ils sont déjà très matures. On parle quand même de cul et c’est déstabilisant. Il n’y a pas d’interdiction au théâtre comme à la télévision ou au cinéma, mais je déconseille fortement aux enfants de moins de 13 ans de venir.
Pour terminer, vous allez monter sur scène dans peu de temps, avez-vous un petit rituel avant ?
Je m’échauffe physiquement, c’est une vieille habitude restée du Cirque du Soleil. Je trouve que c’est important même si ce n’est pas une pièce physique, ça décontracte le corps. Je me chauffe un peu la voix aussi.
Le Mediateaseur remercie Philippe Caroit de nous avoir accordé un peu de son temps.Si vous désirez voir une pièce qui diffère vraiment de ce qu’on nous propose généralement, n’hésitez pas à aller voir La société des loisirs au Petit Théâtre de Paris.
La société des loisirs, Petit Théâtre de Paris, du mardi au vendredi à 21h, le samedi à 17h et 21h et le dimanche à 15h, durée 1h30.