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Le soleil se lève aussi

Publié le 19 novembre 2013 par Euphonies @euphoniesleblog

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San Fermin - San Fermin

Tous les ans c'est pareil : alors qu'on pense avoir fait le tour des sorties importantes, que le palmarès de fin décembre est quasiment déjà bouclé, qu'enfin on va pouvoir se consacrer à d'autres sujets trop délaissés jusque là ( scrapbooking, origami, finale du championnat d'échecs Anand/Carlsen), voilà qu'un empêcheur de glander en rond pointe le bout de son museau taurin. Son nom, San Fermin.  Et vous savez quoi ? San Fermin énerve. Pour plusieurs raisons que je vais me faire un plaisir de lister ci-dessous.

1. San Fermin énerve d'abord par son nom.  Après avoir passé des heures sur internet à trouver un lien logique entre un groupe de Brooklyn et les fêtes de Pampelune,  je dépose les armes. Ainsi va le monde : je propose qu'à partir d'aujourd'hui on choisisse son nom d'artiste dans un je-m'en-foutisme manifeste. Toi, jeune groupe de Death-Metal tu t'appelleras "Magellan". Toi précoce chanteur à texte, "Doliprane" sera ton nom. Toi, sauvage formation de batucada, baptise-toi "Bildungsroman". N'ayez crainte, on n'en a plus rien à foutre.

2. San Fermin énerve ensuite par sa musique. J'imagine la détresse d'une espèce en voie de disparition, le disquaire de la Fnac, transpirant et fébrile, dès lors qu'il faut ranger l'album dans une catégorie. San Fermin est à ce titre un ovni générique, qui parcourt le large spectre de la pop, depuis la ballade immédiate jusqu'aux confins de l'expérimentation sonore. D'un titre à l'autre, s'entrechoquent les  emprunts, les allusions, les références. Il y a du jazz, du progressif, de l'outrancier, du minimal, de la symphonie et de la sonate, du rock à gauche à droite, des choeurs lyriques, des progressions épiques, des villégiatures du côté de Sufjan Stevens ou Rubik pour les arrangements, un grain de voix masculin qu'on jurerait piquer à Matt Berninger de The National (mais le leader c'est le pianiste), une espèce de bordel mélodique savamment contrôlé par l'incroyable maturité d'un groupe aux multiples facettes.

3. Mais en définitive, San Fermin énerve surtout par son incroyable beauté, son équilibre protéiforme qui ne semble jamais calculé. L'album peut donc s'apprécier en toutes circonstances, en soirée entre amis, en slip sur une banquise, à dos de chameau, dans un studio new-yorkais, saoul sur une plateforme pétrolière, en été, en hiver, sur une planche de fakir, pour un mariage ou des obsèques, coincé dans un ascenseur avec des critiques de jazz, près d'une cheminée, d'une payotte, lors d'une Peña de Pampelune ou pendant la dictée de Pivot. Encore plus fort, des titres comme Renaissance, Sonsick, Torero, ou The Count raviront les popeux puristes, les illuminés du rock progressif, les foufous du baroque, les extrémistes du jazz expérimental, les rois de la contemplation, les agités du rock, les psychopathes du radicalisme, les néophytes du la-mineur.

San Fermin vient d'inventer un nouveau genre : la musique globale, tentaculaire, polyvalente. Alors oui c'est énervant. Mais cela fait vachement de bien.

L'irradiant Sonsick :

Renaissance :



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