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Des cosmétiques étonnants …

Publié le 08 février 2014 par Cameline

Au XVIIe siècle, les recettes de beauté se situaient quelque part entre la cuisine et la sorcellerie. Les traités de parfumerie publiés sous l'Ancien régime sont des témoins remarquables des usages de ce temps en matière de cosmétique et de parfumerie.

Les compositions en sont souvent très simples, basées sur les fleurs et plantes diverses (voir ici). Elles sont aussi parfois très étonnantes, voire plutôt dégoûtantes, et on a peine à imaginer les belles de l'époque se tartiner le visage et les mains de ces onguents, qui en outre ne devaient pas sentir très bons.

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« Les secrets merveilleux de la magie naturelle du Petit Albert »

En 1651, Le Petit Albert nous livre quelques recettes de beauté intéressantes, parmi des recettes dignes de grimoires de sorcière. Quand certaines pourraient être plutôt abordables (voir ici ), d'autres sont plutôt effrayantes.

Ainsi, pour « faire une eau qui oste les taches du visage et le fait beau et luisant », il faudra "prendre un pigeon blanc et le plumer, puis lui ôter les entrailles, à savoir les boyaux, et lui couper la tête et les pieds" … Ceci est la première étape de la recette, je ne pense pas que la suite vous soit très utile …

Voulez-vous une « eau pour la face vermeille » ? Rien de plus simple. Prenez la jambe d'un bœuf ou veau, ôtez-lui la peau et les ongles, puis rompez tout le reste en pièces, et distillez-le. Vous vous laverez de cette eau au matin.

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Les secrets de Nicolas de Bligny

En 1688, Nicolas de Bligny écrit ses « Secrets concernant la beauté et la santé ».

Une de ses recettes de « pommade excellente » débute ainsi : « Faites cuire une douzaine de pieds de moutons ». La dernière étape consiste à ajouter du musc, de l'ambre et autres parfums « pour luy donner une odeur agréable » ... On comprend.

Les autres recettes comprennent entre autres de la poix, du beurre, du suif de mouton et de veau, de la moëlle des os de chien, mais aussi de la thérébentine de Venise, de la céruse (à base de plomb toxique), de l'encens, des œufs, du vin rouge, du lait de chèvre, ou des feuilles de tabac.

Le sperme de baleine est l'ingrédient principal d'un remède secret pour ôter les rides, de même pour les suifs de cerf et de bouc. Si l'on utilise les graisses de chapon, de chevreau et de cerf, on les choisira "tués au mois de mai", c'est mieux, avant de les associer à la délicate eau de roses pour obtenir une belle pommade blanche. Une autre recette emploie la moelle « des pieds de derrière des moutons tués en pleine lune ».

Pour finir en beauté, je vous confie cette recette exceptionnelle citée par Nicolas de Bligny qui me semble représentative du pire dans ce domaine, et dont je vous laisse savourer chaque détail. Vous pourrez en imaginer la préparation, puis l'application sur les visages des belles dames, ainsi que les senteurs que cette eau cosmétique pouvait dégager. Mais plus encore, la question essentielle est bien : quels pouvaient en être les effets sur la peau ?

« Eau de chair pour nourrir, et pour conserver la délicatesse du teint

« Prenez quatre pieds de veau desquels vous ôterez les os pour les mettre tremper durant neuf jours dans de l'eau de fontaine, que vous changerez deux fois chaque jour. Mettez les ensuite dans un alambic de verre avec le blanc et les coques de deux douzaines d'oeufs frais, une rouelle de veau bien lavée, dégraissée, désossée et coupée par morceaux, un poulet écorché tout vif, duquel vous ôtez la tête, les entrailles et les pieds, un citron coupé par tranches, demie once de graine de pavot blanc concassée, le dedans d'un pain de chapitre emmietté, quatre petits chiens nés depuis un ou deux jours et trois chopines de lait de chèvre ; puis dissipez le tout au bain-marie bouillant durant trois jours et trois nuits sans discontinuer le feu. Et appliquez ensuite sur le visage de cette eau distillée, avec un linge qu'on en aura imbibé le soir à l'heure du sommeil, essuyant le matin avec un linge blanc de lessive. Ce qui sera réitéré trois ou quatre fois chaque semaine, observant d'exposer votre eau au soleil dans une fiole bien bouchée, sans quoi elle se conserverait très peu de jours. »

Sources :

Gallica – Bibliothèque nationale de France

Medica - BIU Santé, Paris


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