Par arrêt du 29 janvier 2014, le Conseil d'Etat vient d'annuler l'arrêté du 2 août 2012 relatif aux principes du système de gestion de la qualité. Motif : cet arrêté impose le respect de la norme ISO 9001 sans contreseing du ministre de l'industrie. Le Ministre de l'écologie était incompétent pour signer seul cet arrêté.
- Ma note sur le régime juridique de la sortie de statut de déchet peut être lue ici.
- Ma brève et le lien vers l'arrêté du 2 août 2012 sont disponibles ici.
- L'arrêt rendu ce 29 janvier 2014 par le Conseil d'Etat peut être lu ici.
- Le communiqué de presse de FEDEREC peut être lu ici.
Pour mémoire, le Ministère de l'écologie avait publié l'arrêté du 2 août 2012 relatif aux principes du système de gestion de la qualité mentionné à l'article D. 541-12-14 du code de l'environnement. (JORF n°0186 du 11 août 2012 p 13211). Cet arrêté définit le système de gestion de la qualité mentionné à l'article D. 541-12-14 du code de l'environnement que doivent mettre en place les installations qui réalisent une opération de sortie de statut de déchet. Ce texte est entré en vigueur le 1er juillet 2013.
Son article 1er précise :
"Les principes du système de gestion de la qualité mentionné à l'article D. 541-12-14 du code de l'environnement sont constitués par les exigences de la norme NF EN ISO 9001 homologuée le 5 novembre 2008.
Le système de gestion de la qualité est certifié au titre de cette norme par un organisme d'évaluation de la conformité ayant obtenu une accréditation pour procéder à l'audit et à la certification de systèmes de management."
Par arrêt du 29 janvier 2014, à la demande de la Fédération des entreprises du recyclage (FEDEREC), le Conseil d'Etat annule cet arrêté du 2 août 2012.
Le Conseil d'Etat a tout d'abord rappelé la règle selon laquelle seul le Ministre de l'Industrie peut permettre à une norme réglementaire d'imposer le respect d'une norme "volontaire" type ISO :
"2. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 17 du décret du 16 juin 2009 relatif à la normalisation : " Les normes sont d'application volontaire. / Toutefois, les normes peuvent être rendues d'application obligatoire par arrêté signé du ministre chargé de l'industrie et du ou des ministres intéressés. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que sont entachées d'illégalité les dispositions réglementaires qui renvoient à tout ou partie d'une norme, en des termes qui imposent le respect de celle-ci, sans avoir été signées par le ministre chargé de l'industrie"
Par voie de conséquence, l'arrêté du 2 août 2012, lequel impose le recours à une norme ISO 9001 mais n'est pas signé du ministre en charge de l'industrie, est illégal :
"3. Considérant que, pour l'application des dispositions de l'article D. 541-12-15 du code de l'environnement, l'arrêté du 2 août 2012 relatif aux principes du système de gestion de la qualité, dont la Fédération des entreprises du recyclage (FEDEREC) demande l'annulation pour excès de pouvoir, se borne à énoncer que ces principes " sont constitués par les exigences de la norme NF EN ISO 9001 homologuée le 5 novembre 2008 " et à indiquer que " Le système de gestion de la qualité est certifié au titre de cette norme par un organisme d'évaluation de la conformité ayant obtenu une accréditation pour procéder à l'audit et à la certification de systèmes de management. " ; que, contrairement aux prescriptions de l'article 17 du décret du 16 juin 2009, l'arrêté attaqué n'a pas été signé par le ministre chargé de l'industrie, alors que ses dispositions imposent le respect de cette norme aux exploitants des installations mentionnées à l'article L. 214-1 ou à l'article L. 511-1 du code de l'environnement qui mettent en oeuvre la procédure de sortie du statut de déchets ; qu'il est, par suite, entaché d'incompétence "
L'arrêté du 2 août 2012 est donc annulé ce qu'il signifie qu'il est retiré rétroactivement de l'ordonnancement juridique, il est présumé n'avoir jamais existé. L'Etat a désormais le choix entre reprendre le même arrêté mais contresigné par le ministre de l'industrie ou remettre à plat ce dispositif dont la simplification est activement demandée par les professionnels.
Arnaud Gossement
Selarl Gossement Avocats
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Conseil d'État
N° 363299
ECLI:FR:CESSR:2014:363299.20140129
Inédit au recueil Lebon
6ème et 1ère sous-sections réunies
M. Jean-Baptiste de Froment, rapporteur
M. Xavier de Lesquen, rapporteur public
Lecture du mercredi 29 janvier 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 8 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la Fédération des entreprises du recyclage (FEDEREC) ; la FEDEREC demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 2 août 2012 du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie relatif aux principes du système de gestion de la qualité mentionné à l'article D. 541-12-14 du code de l'environnement ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 ;
Vu le code de l'environnement, modifié notamment par l'ordonnance n° 2010-1579 du 17 décembre 2010 ;
Vu le décret n° 2009-697 du 16 juin 2009 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Baptiste de Froment, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;
1. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 541-4-3 inséré dans le code de l'environnement par l'ordonnance du 17 décembre 2010 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des déchets : " Un déchet cesse d'être un déchet après avoir été traité dans une installation visée à l'article L. 214-1 soumise à autorisation ou à déclaration ou dans une installation visée à l'article L. 511-1 soumise à autorisation, à enregistrement ou à déclaration et avoir subi une opération de valorisation, notamment de recyclage ou de préparation en vue de la réutilisation, s'il répond à des critères remplissant l'ensemble des conditions suivantes : / ' la substance ou l'objet est couramment utilisé à des fins spécifiques ; / ' il existe une demande pour une telle substance ou objet ou elle répond à un marché ; / ' la substance ou l'objet remplit les exigences techniques aux fins spécifiques et respecte la législation et les normes applicables aux produits ; / ' son utilisation n'aura pas d'effets globaux nocifs pour l'environnement ou la santé humaine. / Ces critères sont fixés par l'autorité administrative compétente. Ils comprennent le cas échéant des teneurs limites en substances polluantes et sont fixés en prenant en compte les effets nocifs des substances ou de l'objet sur l'environnement. / Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret. " ; qu'aux termes de l'article D. 541-12-14 du code de l'environnement, créé par le décret du 30 avril 2012 relatif à la procédure de sortie du statut de déchet et pris en application de l'article L. 541-4-3 : " Les exploitants des installations mentionnées à l'article L. 214-1 ou à l'article L. 511-1 qui mettent en oeuvre la procédure de sortie du statut de déchets appliquent un système de gestion de la qualité couvrant les processus de contrôle des critères de sortie du statut de déchet. Le système de gestion de la qualité est défini dans les arrêtés mentionnés aux articles D. 541-12-10 ou D. 541-12-15. " ; qu'aux termes de l'article D. 541-12-15 : " Des arrêtés du ministre chargé de l'environnement fixent le contenu du dossier mentionné à l'article D. 541-12-6 et les principes du système de gestion de la qualité mentionné à l'article D. 541-12-14. " ;
2. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 17 du décret du 16 juin 2009 relatif à la normalisation : " Les normes sont d'application volontaire. / Toutefois, les normes peuvent être rendues d'application obligatoire par arrêté signé du ministre chargé de l'industrie et du ou des ministres intéressés. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que sont entachées d'illégalité les dispositions réglementaires qui renvoient à tout ou partie d'une norme, en des termes qui imposent le respect de celle-ci, sans avoir été signées par le ministre chargé de l'industrie ;
3. Considérant que, pour l'application des dispositions de l'article D. 541-12-15 du code de l'environnement, l'arrêté du 2 août 2012 relatif aux principes du système de gestion de la qualité, dont la Fédération des entreprises du recyclage (FEDEREC) demande l'annulation pour excès de pouvoir, se borne à énoncer que ces principes " sont constitués par les exigences de la norme NF EN ISO 9001 homologuée le 5 novembre 2008 " et à indiquer que " Le système de gestion de la qualité est certifié au titre de cette norme par un organisme d'évaluation de la conformité ayant obtenu une accréditation pour procéder à l'audit et à la certification de systèmes de management. " ; que, contrairement aux prescriptions de l'article 17 du décret du 16 juin 2009, l'arrêté attaqué n'a pas été signé par le ministre chargé de l'industrie, alors que ses dispositions imposent le respect de cette norme aux exploitants des installations mentionnées à l'article L. 214-1 ou à l'article L. 511-1 du code de l'environnement qui mettent en oeuvre la procédure de sortie du statut de déchets ; qu'il est, par suite, entaché d'incompétence ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, la FEDEREC est fondée à demander l'annulation de l'arrêté qu'elle attaque ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à la FEDEREC au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêté du 2 août 2012 du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie relatif aux principes du système de gestion de la qualité mentionné à l'article D. 541-12-14 du code de l'environnement est annulé.
Article 2 : L'Etat versera à la FEDEREC une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Fédération des entreprises du recyclage et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.