Magazine Cinéma

Au bout du conte - 1/10

Par Aelezig

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Un film de Agnès Jaoui (2013 - France) avec Agnès Jaoui, Jean-Pierre Bacri, Arthur Dupont, Benjamin Biolay

Le néant... malgré un effort avorté de faire original.

L'histoire : Des vieux qui ronchonnent, des jeunes qui cherchent l'amour... avec de vagues références aux contes de fées, qu'il faut bien chercher, car c'est loin d'être évident !

Mon avis : Autrefois, j'aimais le tandem Bacri / Jaoui. Mais ça c'était avant. Avant qu'Agnès passe derrière la caméra et se mette à nous concocter des films pseudo intellectuels, destinés aux bobos. Jean-Pierre continue d'écrire les scénarios avec elle, mais soit ils ont pris un sacré coup de vieux, soit ils se la pètent, soit Monsieur est mangé par Madame, ou l'inverse. Leur séparation en tant que couple a-t-elle brisé l'alchimie ?

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Ceci dit, si l'on examine leur carrière, les deux seules comédies vraiment jouissives qu'ils ont créées, ce sont Cuisine et dépendance et Un air de famille. Bien troussées, drôles et impertinentes. Mais ça ne fait pas tant que ça. Et depuis qu'Agnès est réalisatrice, j'avoue n'avoir apprécié aucun de ses films...

Comme celui-ci, me semble-t-il, avait été vanté par la critique, j'ai tenté. Mon homme s'est endormi rapidement, harassé par tant de navets à la suite... Moi, je me suis redressée de la torpeur qui me gagnait pour tenter d'analyser ce qui n'allait pas... Quand même, y en a ras-le-bol de toutes ces daubes françaises ! Qu'est-ce qui ne fonctionne pas ?

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Pour commencer, il n'y a pas d'histoire. C'est essentiel, une bonne histoire ! C'est le principe même du livre, du film, du téléfilm, de la série... on est comme des gosses et on réclame notre histoire du soir, bonsoir. Bon sang ! Il est vrai que quelques petits génies par ci par là arrivent à vous faire des films inoubliables avec trois fois rien. Mais dans ce cas, ils ont un plan B d'enfer pour nous accrocher à l'écran, des personnages puissants, des acteurs transcendants, une ambiance de folie, du farfelu, du drôle, une réalisation originale... Et l'affaire est rare, admettons le. Donc, il faut une histoire. Et là... rien. Une institutrice, empêtrée dans un déguisement de fée ultra moche, qui vit. Oui, juste une institutrice qui vit. Un homme qui vient de se mettre en couple avec une jeune femme flanquée de deux gosses, et qui râle parce qu'il n'avait pas vraiment réalisé qu'elle avait deux gosses. Une jeune fille qui tombe amoureuse et largue son officiel. Une petite fille qui lit la Bible. Hein, avouez... ça donne envie ? Donc, nous n'avons rien susceptible de nous tenir en éveil. Voyons les acteurs.

Empêtrés dans cette non-histoire... que voulez-vous qu'ils fassent, les acteurs ? Déjà, vous avez le vieux couple Bacri / Jaoui. Des dinosaures. Agnès fait du Jaoui, depuis des siècles, et ça devient insupportable. Ses grimaces, sa diction (comme si elle avait des marshmallows dans la bouche), son jeu qui frôle l'hystérie... Bacri fait également son Bacri, comme d'hab, froid, grognon, ronchon. Ces deux-là deviennent de vraies têtes à claques. Voyons les petits jeunes : sans scénario, pas facile d'exister. Des petits génies charismatiques à souhait pourraient secouer la poussière de ce palais endormi, mais non rien. Agathe Bonitzer tourne en rond comme une poule dans un poulailler, sans expression ; Arthur Dupont joue son désormais habituel Romain Duris 2.0 sauf qu'il n'a pas le charme de l'original... Les autres sont des seconds rôles sans importance. Les principaux sont déjà transparents, alors imaginez les seconds ! Dans toute cette agitation stérile (parce que ça blablate pas mal), je n'ai finalement retenu que Benjamin Biolay. Pas en tant qu'acteur, mais ce garçon a une classe folle et un petit air sexy canaille. C'est toujours ça.

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Pas d'histoire, pas d'acteurs, voyons côté ambiance. Là, la mère Jaoui a tout misé sur son idée originale : des gens ordinaires (ça on peut le dire qu'ils sont ordinaires...), mais évoluant dans un monde où se multiplieraient les références à des contes. Ce n'était point bête en effet, ça aurait pu être amusant... et moi qui suis toujours une petite fille de sept ans quand il s'agit de princesses et de fées, j'avoue que c'est aussi l'argument qui m'a attirée pour regarder le film. Déjà, il faut avoir lu le pitch, car sinon, on risque de passer à côté des allusions en question... Autre heureuse initiative, Agnès est pratiquement toujours habillée en fée, parce qu'elle monte un spectacle avec ses petits élèves. Deuxième indice. Mais après ? Franchement j'ai cherché ! Il y a bien quelques biches qui se promènent de ci de là... mais franchement ce n'est pas l'élément clé des contes de fée ! Cherchons autre chose. J'ai vu Cendrillon... lorsque Arthur Dupont part dans une fête qu'il doit quitter à minuit (je ne sais même plus pourquoi) et qui dans la précipitation en perd une chaussure... J'ai vu le Petit Chaperon Rouge : Agathe, perdue en forêt, tout de rouge vêtue, rencontrant le grand méchant loup, tout de noir vêtu, Benjamin. Sinon... j'ai observé, observé, je n'ai rien vu d'autre ! Doit-on compter l'Agathe qui tombe dans les pommes (Blanche-Neige ?) et qui se réveille avec une claque (la Belle au Bois Dormant), ou encore les pommes d'amour au manège ? Selon moi, NON. Faut pas exagérer ; à ce moment-là, tout peut être interprété, c'est ridicule, ça n'a rien de magique. Je n'appelle pas ça une référence à un conte. Et je suis une spécialiste, et j'ai bien observé ! Raté de chez raté !

Renseignements pris, il semble que les auteurs aient surtout voulu faire un film sur toutes les formes de croyance, religion, superstition, légendes... Ah bon ? C'est vrai que ça en cause, mais c'est si bavard et peu intéressant que ça ne m'a pas vraiment titillée... Et utiliser le "Il était une fois... " parce que nous sommes tous des personnages d'histoire. Waouh ! Non ? Une grosse lapalissade, oui ! Ca ne m'éclaire pas davantage ! Surtout quand Jaoui précise qu'elle a mis plus d'une centaine de références à des contes dans le film... Je dois avoir de la m... dans les yeux.

En résumé : c'est le château de la Belle au Bois Dormant... sans la belle, et sans château.

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L'humour alors ? Il paraît que c'est une comédie. Il paraît. Je n'ai pas ri ni même souri une seule fois.

S'agissant de Bacri / Jaoui, je suppose que les critiques de nos professionnels, pour la plupart bobos parisiens, ont dû adôôôré ! On parie ? Je file sur le net...

(...)

Gagné ! "Mine de rien le couple Jaoui / Bacri tient depuis deux films la dragée haute à tout un pan du cinéma français. Et "Au bout du conte" met encore la barre un cran au-dessus" (Ecran Large) - "Dans ce film choral impeccablement rythmé, [Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri] livrent une nouvelle tranche des choses de la vie, sous les auspices du conte et de toutes les formes de croyance. (...) Le couple vedette est (...) en forme." (Les Inrocks) - "Les codes sont détournés dans le décor d'un Paris féerique et cela donne un film merveilleux où le rire croise les larmes" (Ouest France, pas parisien, mais bobo) - "Film choral doux-amer, drôle et réjouissant. (...) Habités par des comédiens épatants (...) tous les personnages (une bonne douzaine) s'incarnent." (Première) - "Avant tout, ce cinéma reste donc un plaisir de dialogues et d'acteurs, de causticité et de sensibilité." (Télérama) - "Les "Jabac" (...) ont de la ressource, de l'humour, un art du contre-pied dans les dialogues qui laisse la concurrence sur le flanc. Bacri, un pur génie, ne devrait jamais quitter l'écran." (Le Nouvel Obs)...

N'en jetez plus, la cour est pleine.

Je suis désolée... vous ne me ferez plus jamais croire que les critiques sont partiales. C'est copinage et compagnie, un point c'est tout.

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Ouf, Les Cahiers du Cinéma me comprennent : "Est-il encore possible, aujourd'hui, de considérer ce petit entre-soi qui prend la forme d'une énième fable chorale (...) sans éprouver un sentiment de gêne ? (...) Si Agnès Jaoui sait filmer le poids des années sur sa personne, son cinéma de salon n'en apparaît que plus figé dans un non-lieu presque indécent de vacuité".

Et le public, lui, est bien plus partagé, la plupart saluant le néant absolu de l'ensemble...

Pourquoi je mets un point ? J'sais pas. Parce que certains vont encore me dire que je suis trop sévère...

Purée, ce soir j'espère que je vais voir un bon film...


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