Dans son ouvrage En finir avec Eddy Bellegueule, Edouard Louis nous raconte son début de vie accidentée. Venant dans un milieu rural et populaire, il a été rejeté dès l’enfance en raison de son aspect efféminé, et a été stigmatisé comme étant un être différent, dans un groupe aux valeurs masculines bien ancrées. Plus tard, admis en internat dans un lycée d’Amiens, il découvre un univers qui lui était jusque là étranger. Là encore, il se sent quelque peu en décalage, mais il l’a décidé, il souhaite rompre avec son passé ; en finir avec Eddy Bellegueule, son véritable patronyme.
Extraits
« J’étais déjà loin, je n’appartenais plus à leur monde désormais, la lettre le disait …. Toute la nuit fut consacrée à l’élaboration de ma nouvelle vie loin d’ici ».
Connaître Bourdieu pour comprendre Eddy Bellegueule
A 18 ans, je sortais de ma campagne, et j’ai dû prendre les transports en commun pour aller en classe préparatoire aux grandes écoles. Cela représentait un grand changement pour moi !Sur les chaises des salles de classe, que j’ai fréquentées, j’ai découvert les théories Bourdieusiennes, grâce à d’excellents professeurs de sociologie.J’ai compris certaines choses, et surtout j’ai pu les qualifier avec des termes : d’où vient cette difficulté à s’intégrer dans un milieu qui nous est étranger, pourquoi se sent-on parfois étranger dans son milieu d’origine, d’où nous vient cette faculté à identifier des individus qui nous ressemblent et à spontanément aller vers eux…. Ethos, habitus de classe, déterminisme social, capital économique/social/culturel/symbolique !Ces théories qui ont, il me semble largement influencé Edouard Louis (auteur de Pierre Bourdieu : l’insoumission en héritage) permettent de comprendre l’objet de cet ouvrage.
On aime ou on n’aime pas
Misère intellectuelle et sociale, xénophobie, homophobie, alcoolisme : rien n’est passé sous silence. Tout cela ne dresse pas un tableau reluisant de son milieu d’origine…Ce récit est très dur. Certains passages m’ont mis très mal à l’aise. Âme sensible : s’abstenir (un peu comme pour le film « le géant égoïste ») !Fallait-il tout dire ? Fallait-il l’écrire de cette façon ? A-t-il trahi ses proches ?Il me semble qu’en racontant TOUT (certains diront trop), en décidant de ne pas passer sous silence certains moments de sa vie, en se livrant de cette manière, il a fait preuve d’honnêteté intellectuelle.Il a tout simplement essayé d’analyser les choses qu’il a vues et vécues. On aime ou on n’aime pas !De mon côté, j’ai aimé son récit : franc, percutant, sans concession.
Edouard Louis