Ce matin, pour la première fois depuis longtemps, je me suis surprise à chanter, tu sais cet air que tu fredonnais lorsque j’étais petite, celui qui donnait envie de tourner sur soi, très vite, et puis de tomber, essoufflée, les jambes en l’air, dans les coussins du sofa.
Ce matin, pour la première fois depuis bien longtemps, j’ai pensé à toi.
Les rideaux ont pris tout à coup une teinte plus grise.
Les ombres des bibelots se sont arrangées pour se faire plus discrètes, plus pâles.
Peine perdue. Tu étais là au milieu du salon, invisible et présente, colorée et inquiétante, toute pleine de paradoxes, telle que je te connais.
Les notes de ta chanson se sont égarées quelques minutes sur les miettes de mon petit-déjeuner, je les ai contemplées puis balayées, d’un grand coup sec, du plat de la main.
Je n’ai jamais eu besoin de te voir pour connaître l’abîme dans lequel tu me perds.
Ton souvenir suffit bien à troubler les secondes tranquilles, l’équilibre des heures.
Voilà pourquoi, j’accroche aux murs de ma maison, des gris-gris innocents, censés préserver mes lieux de funestes pensées.
Ce matin, pour la première fois depuis longtemps, je me suis surprise à chanter.
Tu sais. Comme lorsque j’étais petite.
Quand la vie ressemblait à une danse tournoyante.
Quand tu étais les bras...qui m’empêchaient de tomber.
Un texte émis suite à la consigne 69 du site Paroles Plurielles. Il fallait s'inspirer de la photo tout en haut et de l'incipit suivant : "Ce matin, pour la première fois depuis longtemps..."