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En mer

Publié le 05 mars 2014 par Lorraine De Chezlo
EN MER
de Toine HeijmansRoman - 150 pages
Editions Christian Bourgois - août 2013Prix Médicis Etranger - 2013
Donald a pris un congé sabbatique pour naviguer trois mer en mer du Nord. Proche du retour, il a envie que sa fille Maria, 7 ans, le rejoigne pour les dernières quarante-huit heures, entre Thyborøn au Danemark et Harlingen aux Pays-Bas. Son épouse fut assez réticente mais finalement, sa fille est à bord avec lui, très vive, observatrice, intransigeante, et si jeune pourtant encore. Sa fierté de père déborde, son énergie aussi malgré le sommeil qui manque après avoir enchaîné des quarts et la mer qui se fait de plus en plus remuante. Et ça le fait paniquer, de voir ces vagues en pleine nuit en sachant sa fille si proche qui dort dans la cabine ouverte. La tempête éclate et il ne trouve plus Maria....
Dès l'ouverture du livre, les phrases courtes, rythmées, cinglantes, captent l'attention et on se retrouve embarqué en mer sans plus pouvoir rejoindre facilement la terre ferme. L'escale à Thyborøn s'effectue, Maria à bord du petit bateau à voir, pour le père c'est un autre voyage, tant attendu, tant espéré, celui avec sa fille à ses côtés. Il l'avait tant imaginé, tant rêvé, c'est une occasion rare qu'ils soient seuls au monde tous les deux, sa fille en pleine santé et lui à la manoeuvre pour accomplir son but et rentrer à bon port en temps et en heure, auprès de son épouse qui s'inquiète. Mais là, il ne trouve plus sa fille et l'aube ne vient pas. Alors l'auteur marque comme une diabolique pause, et via les pensées de ce père en détresse, remonte le fils des jours, nous fait vivre un flash-back éprouvant sans perdre de vue que Donald est en détresse, que ces gestes et ses pensées sont affectées par son immense fatigue et son angoisse à l'idée de rentrer sans son enfant. Alors que cette étape aurait dû être si douce.
Extrait : 
"Je me suis mis à chérir la solitude. Les nuits, les lumières, les heures froides entre minuit et quatre heures du matin. Le second quart. Le quart du chien. Les mouillages dans les baies sans aucun autre navire. Les conversations avec moi-même et avec mon voilier. Je perdais de vue le reste de ma vie. D'abord le bureau, et les choses qui comptaient là-bas..."
Le lecteur sera surpris. L'auteur a réussi son coup. Comme ce navigateur du dimanche, notre fatigue nerveuse ne nous laisse plus distinguer la réalité des pensées générées par le délire. Ce n'est qu'à l'issue du roman que l'on découvre notre grande confusion qu'on n'osait plus espérer. 
Extrait :"A bord d'un bateau, le capitaine est seul. C'est une personne solitaire. Les capitaines ne peuvent pas prendre de mauvaises décisions, mais ils le font tout de même. Je me disais : entre un père et un capitaine, il n'y a guère de différence."
Ce récit d'introspection est une réussite, il parle de beaucoup de choses derrière ce suspense romanesque : de l'angoisse parentale, de l'affectation du raisonnement par l'épuisement, du délire, du comportement humain en situation de détresse, de la soif de solitude et d'échappée au réel.Ca peut rappeler une angoisse de lecture comme celle de Bord de Mer de Véronique Olmi, de la mer aussi, des enfants. Ici, on n'est pas au bord de la mer, mais en plein dedans.
L'avis de Kathel2 - Lettres ExprèsL'avis de Christine Marcandier - Mediapart

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