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Délivrance (Deliverance)

Publié le 05 mars 2014 par Cinephileamateur
Délivrance De : John Boorman.
Avec : Burts Reynolds, Jon Voight, Ned Beatty, Ronny Cox, Ed Ramey, Billy Redden, James Dickey, Bill McKinney, Charley Boorman, Belinda Beatty, Macon McCalman, Grace Fair...
Genre : Drame - Thriller - Aventure.
Origine : États-Unis.
Durée : 1 heure 50.
Date de sortie : 1er octobre 1972.
Synopsis : Quatre Américains de classe moyenne, Ed Gentry, Lewis Medlock, Bobby Trippe et Drew Ballinger décident de consacrer leur week-end à la descente en canoé d'une impétueuse rivière située au nord de la Géorgie. Ils envisagent cette expédition comme un dernier hommage à une nature sauvage et condamnée par la construction d'un futur barrage. Mais les dangers qu'ils affronteront ne proviendront pas uniquement des flots tumultueux de la rivière...
Bande annonce originale
"- Quand on parle de dégénérescence on dit ça en l'air, mais c'est pas beau à voir.
- On joue quand même du banjo."

5.0
Délivrance
C'est seulement il y à environ quatre ou cinq ans que j'ai découvert le classique "Délivrance". Je me souviens que celui ci m'avait plu tout en me dérangeant en même temps pour les sensations qu'il pouvait me donner. Ne l'ayant pas revu depuis, j'étais donc assez curieux de voir ce qu'un second visionnage de cette œuvre pouvait faire sur moi et c'est ainsi que je me suis retrouvé à revoir ce film en blu-ray prêt à repartir sur cette rivière...
Force est de constater que le second visionnage fut encore plus bénéfique que le premier. Sachant cette fois ci à quoi m'attendre, il n'y avais pas vraiment de surprises mais pourtant, j'ai une nouvelle fois été très tendu et j'ai ressenti les mêmes sensations que lors de mon dernier visionnage. Faut dire aussi que le scénario écrit par James Dickey d'après sa propre œuvre est assez intense. On ne ressors pas vraiment indemne de cette aventure. Pourtant, le début est assez classique dans son atmosphère. L'intrigue prend même le temps de s'installer pour nous faire découvrir nos héros et les placer dans le contexte.
On ne sympathise pas forcément avec eux car ils sont bourrés de défauts mais on fait leur connaissance avec en prime en conclusion un mythique duel au banjo, seul moment du long métrage où l'on respire un peu. On commence donc tout doucement en partant avec cette bande à l'aventure tout en jetant un regard assez acide sur la prétention de ses derniers. Les clichés sont poussés à leurs paroxysmes et pourtant c'est montré avec une certaine finesse et le duel ville-campagne pose les bases pour la suite. Cet affrontement entre un monde soit disant civilisé qui se croit supérieur à un autre univers jugé plus bestial est très intéressant.
Comme je le dis, c'est pas toujours très fin, on ne dissimule pas les clichés qu'un monde peut avoir sur l'autre mais c'est efficace, l'arrogance de la ville nous empêchant d'avoir trop d'empathie pour nos héros mais au contraire d'avoir notre propre point de vue sur le sujet comme ci nous étions le cinquième homme du groupe. A côté on nous distille aussi un petit message écologique, pas très fin non plus mais qui fait son effet surtout lorsque l'on sais par la suite l'importance que la nature et les différents éléments vont avoir sur le récit.
Et le fait de se sentir le cinquième homme du groupe va avoir toute son importance pour la suite car après le film d'aventures qui pose ses bases, le long métrage part dans un survival haletant où le danger se fait ressentir sous chaque feuille de la forêt qui nous entoure et même à bord du canoé que nos personnages vont prendre pour descendre leur rivière. Il prend son temps pour arriver mais une fois en place, ce survival est très malsain. Il y à une telle brutalité et une telle violence, physique et psychologique, que c'est à partir de ce moment là que le film dérange dans le bon sens du terme.
Rien qu'avec la scène du viol et de l'humiliation, on se sens mal. Plus qu'un simple spectateur, j'ai vraiment eu la sensation d'être sur place, impuissant et c'est en ça que c'est dérangeant dans le bon sens du terme car on à tellement l'impression de faire partie de cette histoire que l'on sors parfois un peu du cadre cinématographique. Comme nos héros, on se retrouve alors à retrouver notre bestialité primale pour sauvegarder notre survie. Comment auront nous réagi ? Aurions nous fait la même chose ? On s'interroge tout comme eux sur l'attitude à avoir et pire que tout, par moment ce retour à nos instincts primaires nous semble presque une évidence, on semble presque ressentir de la satisfaction dans notre besoin de nous venger pour survivre, on retrouve notre côté animal.
Attention, je ne dis pas que je cautionne les actes de nos personnages qui sot parfois aussi incompréhensible que ceux de leurs assaillants, mais alors qu'au début les clichés et le regard qu'ils pouvait avoir nous semblais primaire et qu'on pouvais vraiment être contre leur vision du monde, on se retrouve subitement nous aussi à comprendre leurs réactions et c'est aussi cette sensation malsaine qui fait que le film réussi à être très fort dans son propos. L'attaque est humaine mais elle est aussi dans la nature imprévisible et cette sensation de danger de toute part nous pousse à ce que le spectateur se mettent en mode survie également.
D'ailleurs, je trouve que le titre du film est ainsi très pertinent. Sans en dévoiler l'issue pour ceux qui n'ont pas encore vu le film (un final assez intéressant et intelligent aussi d'ailleurs je trouve, on évite le piège casse gueule de la fin trop classique), on se sens dans cette aventure, on est pris au piège et on veut cette délivrance. On veut retrouver notre confort, notre quotidien, notre routine même si elle n'as rien de passionnant car elle est synonyme pour nous de sécurité. Dès que le survival démarre, on n'arrive plus à respirer, le film devient vite anxiogène et ce huis clos en liberté est si intense qu'on veut vraiment en sortir. Sans dire si cette délivrance vient ou non pour nos personnages principaux, pour le spectateur en tout cas le générique de fin arrive comme une bénédiction mais on aura avant ça tellement pris part à l'action en rentrant dans le film, que ce que l'on à pu ressentir ou vivre fait que même après le générique de fin, on se sens un peu "sale", un peu mal d'avoir eu certaines pensées et/ou de cautionner certaines choses. Ce film réveille vraiment nos instincts les plus primaires...
Si le scénario est si bon, faut dire aussi qu'il est porté par un casting tout aussi exceptionnel à commencer par un Burt Reynolds charismatique dans la peau de Lewis Medlock. Leader naturel du groupe et pourtant un peu en retrait bizarrement dans l'aspect survival, l'acteur livre une excellente performance. Montré un peu comme le héros du groupe, celui qui connait le plus la nature et qui sais agir lorsque la situation l'exige, j'ai trouvé son évolution très intéressante. C'est aussi un personnage assez complexe et ambiguë, on sens qu'il prends du plaisir à retrouver son côté animal et c'est peut être aussi pour ça que l'on as pas d'empathie pour lui même si on veut qu'il s'en sorte comme les autres car on à vraiment l'impression de faire parti du groupe.
Mais celui qui à l'évolution la plus intéressante reste quand même à mes yeux Jon Voight en Ed Gentry. Alors qu'il apparait au début comme un simple suiveur qui idolâtre Lewis, son personnage va retrouver son côté animal avec plus de finesse. Il va être lui même très surpris de faire certaines choses et petit à petit, il va même s'imposer comme leader, comme l'homme sur qui on peut compter. Confronté très rapidement aux attaques en se sentant impuissant, la révolution intérieure de ce personnage est très bien pensé je trouve. Le comédien l'incarne avec beaucoup de brio et j'ai beaucoup aimé le voir gagné en charisme et s'imposé de plus en plus à l'écran.
Ned Beatty en Bobby Trippe évolue bien lui aussi. Apparaissant d'abord comme le clown de service avec ses maladresses et ses remarques, c'est peut être celui qui va être aussi le plus marqué par cette violence. Ça va moins se montrer à l'écran car il à un rôle moins "physique" mais à travers le regard et la gestuelle de l'acteur on ressens le changement. On ressens que plus rien ne sera comme avant pour son personnage et que celui ci gagne même un peu en maturité. On exploite peut être pas assez les traumas que vont provoquer son agression mais le traitement de ce personnage associé à l'interprétation de son comédien est vraiment excellent.
Quatrième larron du groupe, j'ai eu un peu plus de mal avec Ronny Cox en Drew Ballinger. Pourtant ça commençais bien, c'est celui qui avait le moins de clichés, celui qui semblé être le plus sensé du groupe et son duel au banjo (excellent Billy Redden aussi au passage, énigmatique et sympathique à la fois dans son rôle muet) faisait en sorte que c'est peut être celui qui apparaissait comme le plus sympathique mais pourtant par la suite l'acteur m'as moins convaincu. J'ai moins été pris par son jeu même si je reconnais que ça reste excellent. En fait, c'est même assez déstabilisant pour ce point là aussi car si c'est celui qui m'ait apparu comme le plus sympathique, c'est aussi celui dont le sort dans ce survival m'as le moins touché. C'est peut être pour ça aussi que le film fait ressentir une sensation de mal être car en retrouvant notre instinct primaire, on perds toute forme de sympathie qu'on pouvait éprouvé et on le sens même parfois comme quelqu'un qui peut nous bloquer pour notre survie.
C'est vraiment autour de ce très bon quatuor que le film va se concentrer. Les quatre comédiens sont extrêmement complémentaires avec leurs caractères bien différents et il y à une bonne alchimie dans ce groupe qui fait que l'on est jamais choqué par leurs amitiés même si parfois ils semblent issus d'un univers différent. Derrière, le reste du casting fait le job. On est plus dans la figuration mais on trouve quand même de très bon seconds rôles comme les agresseurs terrifiant de la montagne où encore le Shériff, riche en clichés lui aussi (en même temps le rôle n'en demande pas plus) et bien interprété par James Dickey qui du coup signe un bon caméo dans cette histoire après avoir écrit le roman d'origine ainsi que le scénario de ce film.
Dans sa réalisation, le cinéaste britannique John Boorman maitrise parfaitement son sujet. A travers sa mise en scène, il nous dépeint un monde brut et sauvage sans aucune concession. Il magnifie la nature qui entoure nos personnages afin de mieux la renfermer sur eux. Bien qu'il y ait quelques lenteurs dans le rythme par moment, celles ci s'avèrent vite nécessaire pour le suspense et la tension qu'elle génère. Sans aucun voyeurisme gratuit, le réalisateur nous filme son récit avec une certaine maestria et si le film n'est pas forcément simple à vivre de prime abord, c'est aussi parce que le cinéaste à su retranscrire à merveille la brutalité de ses propos.
Le montage est vraiment bien ficelé je trouve. A aucun moment on ne ressens de l'ennui, bien au contraire, on se sens même toujours aux aguets, prêt à répondre au moindre danger et la caméra de John Boorman nous aide très bien je trouve à rester sur le qui vive avec ses plans à travers le feuillage ou encore la descente de la rivière qui fait qu'à chaque instant, on se demande si le danger ne va pas nous tomber dessus. Il y à une excellente exploitation de la photographie avec un jeu de lumière que je trouve vraiment saisissant. De plus, la qualité d'image de mon blu-ray à peut être joué mais je trouve que le film à vraiment bien vieilli et à su rester vraiment percutant en tout point sans tomber dans le kitsch ou le ridicule.
Pourtant, par moment on aurait pu tomber dans ce ridicule avec par exemple le costume du personnage de Lewis qui accentue un peu plus son stéréotype mais pourtant ça fonctionne, ça s'insère bien dans cette histoire et ça donne même un petit charisme supplémentaire aux personnages pour qui ses costumes vont très bien collés à leurs caractères respectifs. Les décors sont eux aussi magnifique. Sensé se passer aux États-Unis, on se croirait en pleine jungle amazonienne tant toute forme de civilisation nous semble loin agrandissant un peu plus la sensation de danger et de devoir de survie. Les paysages sont d'une beauté incroyable avec cette forêt qui nous entoure et cette fameuse rivière à descendre en canoé qui font office de personnage à part entière tant ils vont avoir de l'importance. Les différents décors sont vraiment utilisés aussi avec beaucoup d'intelligence, chose que j'ai encore plus ressenti lors de se second visionnage.
Après visuellement on sens quand même un peu le temps qui passe je pense notamment lors de la scène où Ed Gentry se retrouve à escalader une falaise tandis que ses amis sont en bas. Les incrustations sont parfois un peu limite (surtout lors des passages nocturne) et parfois j'ai eu la sensation qu'on en faisait peut être un peu trop (elle semble interminable à monter mais très courte à descendre cette falaise) mais bon là encore c'est surtout une question de détails histoire de dire que j'ai quelques petits trucs à dire car pendant ma projection ça ne m'as jamais gêné tant j'étais pris dans cette intrigue.
Quant à la bande originale composée par Eric Weissberg, je l'ai trouvé également très brillante. On retiens surtout le mythique thème musical qui sers lors du duel de banjo mais dans l'ensemble, avoir utilisé de telles sonorité pour accompagner cette histoire m'as vraiment plu. Non seulement je trouve que ça colle avec le lieu où est sensé se déroulé cette histoire mais en plus cela apporte un contraste presque joyeux par moment qui fait que ce sentiment de malaise reste bien présent. Il y à peut être juste une musique lorsqu'une corde casse que j'ai trouvé un poil trop appuyé mais ça dure que quelques secondes car sinon dans l'ensemble j'ai vraiment beaucoup aimé cette bande originale que je trouve très réussie.
Pour résumer, j'avais bien aimé "Délivrance" lors de mon premier visionnage mais je trouve que le film s'est vraiment bonifié à mes yeux lors du second ce qui fait que non seulement je ne regrette vraiment pas de l'avoir revu mais en plus, je suis très satisfait de mon acquisition en blu-ray de cette œuvre que je reverrais de nouveau. Toutefois, il ne faut pas en abuser pour autant car ce sentiment de mal être qui nous fait ressortir nos instincts les plus animales et ce côté dérangeant que l'on peut ressentir en suivant cette histoire font que le long métrage ne nous laisse pas indifférent. Il continue même de nous travailler après le mot fin, une fin bien pensée aussi qui ne tombe pas dans la facilité. Avec un excellent scénario, une excellente distribution, une excellente mise en scène et une excellente bande originale, ce long métrage est vraiment un classique du septième art très intéressant à voir. Modèle dans son genre, ce survival reste toujours aussi efficace sans pour autant avoir besoin d'en faire des tonnes. Une grande leçon de cinéma pour un film que je recommande en tout cas même si il faut se préparer avant de le voir. Un film très intéressant et très intelligent.
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