Fragiles de Philippe et Martine Delerm

Fragiles, Martine et Philippe Delerm. Il s'agit d'un mini recueil à double voix: à partir d'un thème commun, chacun exerce son imagination, laisse court à son inspiration en illustrant le thème choisi initialement.    Philippe Delerm illustre le mot par d'autres mots, dans une sorte d'haïku en prose; parfois, c'est juste une phrase. Alors que Martine Delerm dessine. Les illustrations de Madame comme la stylistique de Monsieur révèlent une alchimie poétique intense et chargée en émotions. La quatrième de couverture laisse à penser que Martine Delerm illustre un vocable par ses dessins et Philippe Delerm commente les illustrations de son épouse.  Qu'importe après tout... Puisque tout n'est que question d'interprétation, d'images -illustratives ou métaphoriques- crées à partir d'un mot.Non seulement, il y a une vraie complémentarité entre le mot et l'image, entre le discours et le dessin, entre l'abstrait et le concret mais il y a aussi le relai entre le savoir voir le monde et savoir le dire.  Dans ce dialogue poético-philosophique sur l'existence, s'ajoute notre propre perception de l'univers. Ce livre prend alors autant de dimensions différentes qu'il existe de lecteurs.Les personnages de Martine sont singuliers: ils n'ont que deux yeux mais pas de bouche. La bouche est absente de façon à rendre muet un personnage dont la voix et la parole sont relayées par celle de Philippe . Cette œuvre est une sorte de BD différée car l'illustration et l'écriture ne sont pas amalgamées mais elles se font face pour mieux se compléter. Chacun a son outil, chacun a sa tribune pour laisser exprimer son talent et aucun n'empiète sur le territoire de l'autre. Mais l'un comme l'autre se retrouvent sur la même longueur d'onde: la simplicité. Tous les deux vont à l'essentiel. Concis, simples et efficaces; ainsi sont les Delerm. "L'absence":L'absence ce n'est rien. Une table posée contre l'océan du silence, de l'encre et du papier. Tout est très fort, la nuit s'efface ou la nuit vient, je n'ai pas peur. La tête un  peu penchée, je ne regarde que la feuille de papier. Les mots s'envolent et tu es là. l'absence ce 'est rien -un peu de temps très pur pour inventer demain." Fragiles, Fragiles, Fragiles..."Fragiles"... Comme les pages d'un livre? Comme les êtres humains? comme les souvenirs? "Fragile" est le seul mot qui n'est pas expliqué. Fragile... telle la page blanche, la dernière prise de parole muette laissée par LUI. Fragile, comme l'est le langage voué à disparaitre. Fragile: tel est le personnage qui laisse échapper le livre à la fin, qui perd le contrôle de sa vie, dans son dessin à ELLE. "La confiance:" "On ne sait pas ce qu'on attend. Ce serait tellement simple de voir la vie en noir, la vie en rose. Mais les jours ne se suivent pas, ne se ressemblent pas. Combien de temps perdu? Aucun. Combien de certitudes? Pas. Comment sort-on de la coquille? Fragile. "  Fragile de Julie Zenatti