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Ceux qui reviennent

Publié le 19 mars 2014 par Lecteur34000

maryline

« Ceux qui reviennent »

DESBIOLLES Maryline

(Seuil)

D’Ugine à Nice, les espaces familiers à Maryline Desbiolles. Des espaces que fréquente le Lecteur depuis que ce qui ressemble au hasard l’a introduit dans l’environnement de cette écrivaine. Bouleversé qu’il fut par l’histoire de Primo. Primo qui s’en revient de manière furtive dans ce nouveau roman découvert d’une seule traite. Normal : « J’écris le début d’un livre et j’éprouve le bonheur, la joie d’avoir écrit un début à la hauteur, un début sans bavure, un début qui tourne, d’autant que sa construction est circulaire. » Un peu à la façon dont il  advient parfois que l’on circulât dans un cimetière, à la recherche des traces d’un mort, ami, proche parent ou quasi inconnu.

Donc ces traces diffuses. Celles de René, par exemple, « René trompe-la-mort, né en Italie, dans la maison de maternité de Turin où nombre d’émigrées revenaient de France, revenaient accoucher, prises en charge par les nonnes et l’Etat italien, et où mourut l’aîné, Primo, mon petit oncle de dix-sept mois, en même temps que naissait René, Renato Romano du nom du quatrième enfant du Duce, Romano, le Romain, la louve et tout le bazar… ». Voilà. Le décor est quasiment planté. Côté famille italienne, bien entendu.

Puis surgissent quelques-uns de ceux qui fréquentèrent cette famille-là, qui s’allièrent à elle. En des temps de guerre et donc de Résistance, avec et pour celle-là ses héros, avec ses faux-semblant. Et puis le communisme. En compagnie de ce Virgile Barel que le Lecteur retrouve ici, soudainement, presque semblable à l’homme qu’il avait croisé au début des années soixante-dix. Un homme de qualité. Qui n’aura de cesse de traquer Klaus Barbie, l’assassin de son fils, Max. Virgile chez Benevento : « Je vois les deux hommes sur le canapé, le vieux combattant et le plus jeune, berçant les rêves du fils qui a été, berçant les rêves du fils qui ne sera pas. »

Le Lecteur dissimule. Son émotion reste à vif. Il souhaiterait tant que l’une ou l’autre d’entre vous s’introduise dans ce beau roman-là. Quitte à le reposer quelques instants, le temps de reprendre souffle après que Maryline Desbiolles ait chanté la tragique légende d’Ange et de Séraphin, francs-tireurs et partisans. Séraphin Torrin et Ange Grassi assassinés à Nice par les nazis, près de la place Masséna.

« Mais ces deux-là furent choisis pour être pendus

Au hasard

Encore que tout désignés par les ailes qui dépassaient et les trompettes qu’ils embouchèrent

Ce n’était pas bien difficile

Séraphin et Ange

Ange et Séraphin

Le Français et l’Italien »

Cheminer dans un cimetière qui réunit les morts d’Ugine et de Nice, les Français et les Italiens. Déceler les traces infimes. Renouer les fils épars d’une histoire humaine. Se confronter à un drame contemporain. Maryline Desbiolles a réussi une sorte de prodige. Le Lecteur lui proclame son infinie gratitude.


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