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[anthologie permanente] Joseph Brodsky (quatre versions)

Par Florence Trocmé

Les éditions Les doigts dans la prose publient un livre un peu hors normes, puisqu’il propose Vingt Sonnets à Marie Stuart de Joseph Brodsky, en version originale russe, en version anglaise de Peter France et de l’auteur et dans deux traductions françaises, l’une de Claude Ernoult (1987), l’autre d’André Markowicz (2013).   
Voici le résultat pour le sonnet III. Le russe est reproduit en PDF, téléchargeable par simple clic.  
 
 
Voyant perdue ma route droiturière, 
me radinai-je lors au Luxembourg 
pour voir les mines pétrifiées et fières 
des Lettres de la France avec les bour- 
geois et les geoises gros derrière. 
Un flic bleuit sur la pelouse, lourd 
de tradition, l’enfance hurle et court ; 
geulé-je russe – tête sur la pierre. 
Et toi, Mary, « Ça va ? – Ça va. Sankiou. » ; 
cernée par tes copines de caillou, 
tu trônes chez les capétiens imberbes. 
Muette. Un moinillon faisant « piou-piou » 
sur la coiffette ( ?)…Déjeunons sur l’herbe 
avec Pan-Panthéon. Métrique acerbe 
 
(version d’André Markowicz) 
 
 
A mi-chemin déjà de ma route sur terre 
dans le jardin du Luxembourg je suis venu 
regarder les cheveux pétrifiés et chenus 
des maîtres à penser, des gloires littéraires.  
 
Des dames et messieurs marchent dans la poussière, 
un gendarme bleuit dans  le vert, moustachu, 
et le bruit des jets d’eaux se mêle aux cris aigus 
des enfants. A qui donc dirais-je : « Va te faire… » 
 
Et toi, Marie, et toi, sans répit ni repos 
tu demeures parmi les reines, tes amis 
françaises qui te sont fidèle compagnie, 
 
en silence, portant sur la tête un moineau. 
Et le jardin ressemble au « Déjeuner sur l’herbe » 
où se serait glissé le Panthéon, superbe 
 
(version de Claude Ernoult) 
 
 
I, who have traveled half my earthly road, 
make my appearance in the Luxembourg 
and contemplate the petrified gray curls 
of thinkers and of scribblers. Gents and broads 
are strolling to and fro ; a whiskered 
blue copper glistens from the thicket ; 
the fountain purrs, the children laugh 
and not a soul to greet with “Bugger off”.  
And you, untiring, Mary, stand and stand, 
in the stone garland of your girl-friends –stunned 
French queens of once-upon-has-been, 
in silence, with a sparrow in your hair. 
You’d think the garden was a cross between 
The Pantheon and Déjeuner sur l’herbe.  
 
(Version de Peter France et de l’auteur) 
 
 
version originale russe disponible en PDF, téléchargeable par simple clic. 
Téléchargement Brodsky 
 
Joseph Brodsky, Vingt Sonnets à Marie Stuart, version originale russe, version anglais de Peter France et de l’auteur, traductions françaises de Claude Ernoult (1987) et d’André Markowicz (2013), éditions Les doigts dans la prose, postface d’André Markowicz, 2013, 18€  
 
 
Joseph Brodsky dans Poezibao : 
bio-bibliographie, extrait 1, extrait 2 


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