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Je mange, donc je suis ?

Publié le 01 avril 2014 par Polinacide @polinacide
© Emmanuelle (Histoires de voir)

© Emmanuelle (Histoires de voir)

La peur au ventre. C’est ainsi que l’on mange désormais, l’œil rivé sur le compteur de calories et appréhendant la valeur nutritionnelle de chacune des bouchées ingurgitées. Mention spéciale pour l’index glycémique (IG), dernière référence en date qui classe les produits moyennant le taux d’insuline qu’ils libèrent, déterminant ainsi si le sucre avalé finira ou non stocké dans les bourrelets. De quoi faire passer l’envie de se resservir une part de tarte, surtout si la culpabilité prendra le pas sur le plaisir. À charge de revanche. Naturelle et pour le moins essentielle, l’alimentation d’aujourd’hui n’a plus rien d’intuitif, les envies spontanées ayant laissé place aux glucides, lipides, et sacro-saintes fibres et protéines. On se croirait presque assister à un cours de chimie, ou devant le tableau périodique des aliments.

Prise de tête en plus du poids, un jackpot paradoxal : jamais l’Homme n’a autant intellectualisé le contenu de son assiette, guettant la moindre trace de gras et de sucre comme on sonderait des explosifs en terrain miné. Des petites "bombes énergétiques", la balance appréciera. À l’heure où les troubles alimentaires en tous genres relèvent d’une psychose quasi-généralisée, les scandales industriels n’ont fait que rajouter de l’huile sur le feu en faisant naître de nouvelles phobies et notamment ladite «orthorexie». L’obsession de manger « sain », un art de vivre à lui seul quand il ne vire pas au cauchemar. Si profusion de nourriture et malbouffe avaient déjà brouillé les sensations de satiété, les régimes à outrance et les échecs en série ne font qu’alimenter frustration et perte de contrôle. De la dictature des «cinq fruits et légumes par jour» aux«trois produits laitiers» conseillés, il est bien loin le temps où nos grands-mères nous forçaient à terminer nos assiettes. Ne parlons même pas de « saucer », sacrilège ! Au risque d’être réduits à compter les calories de notre propre matière grise, renouons plutôt avec le corps et les envies qui lui sont propres, savourant les mets de la vie sans pour autant finir écoeuré. Une saine gourmandise, en plein dans la fourchette du bonheur.


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