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On fait la cour à Babel

Publié le 12 avril 2014 par Marcel & Simone @MarceletSimone

Julie Bertuccelli, Réalisatrice de « Depuis qu’Otar est parti » en 2003 (César du meilleur premier film) et « L’arbre » en 2010, signe cette année son premier documentaire pour le cinéma.

On fait la cour à Babel

« La cour de Babel » s’inscrit dans la lignée d'"Être et avoir » le film de Nicolas Philibert réalisé en 2002 qui avait suscité l'engouement des critiques et du public. Julie Bertuccelli reprend un procédé similaire, suivant pendant un an les élèves de la classe d’accueil du collège parisien La Grange aux belles, classe destinée aux non francophones.

Brésiliens, Serbes, Sénégalais, Chinois, Irlandais, ils viennent des quatre coins du monde tous pour des raisons différentes, chacun avec leur histoire souvent difficile, leur culture, leurs rêves et leur caractère.

Comment arriver à s’intégrer dans un nouveau pays dont on ne connaît ni la langue ni la culture ? Comment arriver à communiquer et à bien s’entendre ? Ce sont les questions que se posent ces jeunes adolescents, qui se pensaient si différents les uns des autres, et qui vont apprendre à se connaître jusqu'à ne plus vouloir se quitter.

Ces enfants matures sont venus pour échapper aux persécutions, à un mariage forcé, ou encore à la maltraitance. Ils veulent étudier, être libres, faire de la musique, s’intégrer, et apprendre à se découvrir eux-mêmes. Pleins de rêves et d’énergie, ils nous touchent, nous font rire et respirer un grand bol d’humanité.

Julie Bertuccelli nous plonge dans l’univers de cette classe dès la première séquence dans laquelle chaque élève apprend à ses camarades comment dire « bonjour » dans sa langue. On ne sort pas beaucoup de ce collège, et on ne s’éloigne pas de ces enfants, filmés souvent frontalement en plan rapproché, sans que cela semble les déranger pour s’exprimer librement et naturellement. La classe ayant elle même tourné un film dans le cadre d’un festival de film collégien, la réalisatrice confronte ces adolescents à leur propre regard en les filmant en train de regarder leur court-métrage. Ils se voient à l’écran et s’écoutent raconter leur propre histoire. La réalisatrice nous montre en même temps comment ils font du cinéma, quel rapport ils entretiennent avec cet art qui leur sert finalement à la même chose : la communication et le partage.

La caméra semble adopter le point de vue du professeur, dont la voix (souvent off) joue le rôle de l’interviewer. Ce professeur apparaît peu à peu, et se dévoile comme si elle s’attachait de plus en plus à ces enfants. Elle est la maîtresse des élèves autant qu’elle semble maître de la direction du film, puisque c’est elle qui pose les questions aux élèves, et qui permet la communication entre eux, leurs parents, et le spectateur.

Une lumière naturelle, sans artifice, des plans fixes, une caméra peu mobile à l’exception des séquences tournées en caméra portée, la caméra semble vouloir s’immiscer discrètement à la manière des séries documentaire « Strip-tease », dans le quotidien des enfants. Cependant Julie Bertuccelli ne semble pas prétendre adopter un point de vue « neutre » sur son film.

On fait la cour à Babel

Un regard trop optimiste ?

Certaines critiques s’insurgent déjà contre l’optimisme débordant de Julie Bertuccelli. Le Figaro parle «d’intégration pour les Bisounours ».

On nous le dit, la France est un pays où nous avons la liberté d’étudier, la liberté d’opinion et de religion, et la liberté de choisir. La France est un pays qui protège son peuple, oui on nous le dit parce que c’est vrai. Cependant, le documentaire nous dit aussi que c’est difficile de s’intégrer. Certains, séparés de leur parents, sont livrés à eux mêmes et ont du mal à travailler dans de bonnes conditions, un jeune a peur d’oublier sa langue maternelle, une jeune fille des problèmes de comportement, une mère d’élève dit que la vie à Paris est difficile… Julie Bertuccelli ne fait pas l’éloge de la France et n’en fait pas son procès non plus. Et je ne pense pas que le but soit de faire des généralités aussi grossières. Ce film ne prétend pas être le reflet de toutes les classes d’accueil de France, il montre simplement des personnes de différentes origines, cultures et religions qui tentent de vivre ensemble. Le film parle du cinéma lui même et de son pouvoir d’apprentissage et de transmission. C’est un film optimiste ? oui, et C’EST TANT MIEUX !


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