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Cette peur panique de la perdre…

Publié le 14 avril 2014 par Encoreunblogdemere

Il y a 3 ans, je vivais ma première « vraie » grossesse. Une qui passait le cap des 3 mois, une qui tenait, enfin, après 3 échecs dont 2 rendus publics, après 2 ans d’espoirs et de déceptions.

Alors, évidemment, j’ai passé les premiers mois à avoir peur, jour et nuit, à la moindre douleur. Et même quand je la sentais bouger, jusqu’aux derniers instants de ces 9 mois qui m’ont paru une éternité, j’ai eu peur qu’elle ne vive pas. Qu’elle meure en moi. Une horreur à laquelle j’essayais de me préparer, tout le temps. Parce que mon corps n’avait pas pu faire vivre ces autres bébés, alors pourquoi celle ci ferait exception ?

Mon plus grand regret pour la période où j’attendais Miss S. est de ne pas avoir su m’impliquer d’avantage dans cette grossesse. Pas la vivre suffisamment, entre les vomissements du premier trimestre, les malaises des deux autres, et cette peur sourde, toujours au fond de moi. J’affichais un grand sourire, la main sur mon ventre rond, mais il y avait de la peur à l’intérieur. Et si tout ça s’arrêtait ? Et si je ne la tenais jamais ?

Comme pour me contredire, Liloute est restée 4 jours de plus dans son cocon. On m’a souvent dit qu’elle avait dépassé le terme parce que je n’arrivais pas à lâcher prise (aaaah , cette fameuse expression, qui me fera toujours défaut), et ça m’énervait plus qu’autre chose. Encore une fois, ça me renvoyait à cette culpabilité, ce « c’est ta faute » que mon esprit me répétait assez souvent pour que d’autres s’y mettent.

Au fond, bien entendu, c’était vrai. Je n’ai même pas l’impression d’avoir réalisé que j’accouchais, jusqu’au moment où les puéricultrices ont enfin réussi à lui faire pousser son premier cri après qu’elle soit sortie sans un son de mon ventre… Je me préparais au pire. J’étais en dehors de l’instant. J’avais peur de pleurer, peur de la perdre.

C’est aussi pour ça que les premiers mois de réalité, mes premiers mois de maman ont été si durs. Je n’avais pas prévu de l’être, vraiment. J’avais juste espéré.

Du coup, quand on a commencé à envisager ce petit deuxième, j’étais partagée entre l’angoisse de revivre tout cela et l’envie de mieux faire. Les rares personnes au courant se voulaient rassurantes : ce n’était pas pareil, j’étais déjà maman. J’avais la preuve, devant moi que « ça marchait ». Il était donc naturel que je sois sereine, que cela se passe différemment.

Sauf que non.

Nous avons connu un parcours différent pour Miniloute. Dès les essais, je n’ai pas voulu y penser. Alors que pour Liloute, je contrôlais ma température, que je savais exactement à quel jour et quel cycle j’en étais (C16, J23, ça vous dit quelque chose?), j’étais obsédée… Pour cet enfant là, je n’avais ni le temps ni l’envie de me focaliser sur la réussite (ou non) de ces tentatives. Il y avait des mois où on tentait, d’autres où je loupais (volontairement?) le coche. Je ne voulais pas y penser, pas être déçue.

Quand mon gynécologue de quartier m’a mise sous hormones au bout de quelques mois (même pas 6 je crois!) je n’ai rien dit. Au fond de moi, j’avais de toute façon un problème, alors il avait raison. Au fond de moi, la pensée malsaine et tordue cachée depuis longtemps commençait à se révéler : Liloute était un miracle, on n’en aurait pas d’autres.

Juillet 2013 : un test positif, deux prises de sang. Je n’y crois pas, le taux n’est jamais assez haut, je n’ai jamais assez de symptômes. J’essaie d’y croire, mais je sais. Le sort me donnera raison 1 mois après. Je ne pleure pas, je me dis que je serai tranquille pour nos vacances à Center Parcs. Je me convaincs que je n’était pas prête, que je ne veux plus réessayer. Plus maintenant. De toute façon, Liloute est un miracle, il n’y en aura pas d’autres. Je le sais, j’en suis persuadée, je n’en parle pas, mais c’est là.

Octobre 2013. Un an d’essais, si on en croit le calendrier. Liloute fête ses 2 ans, je m’investis à fond dans son goûter d’anniversaire. Je sais bien qu’en pratique, nous n’avons surement essayé que la moitié du temps, maximum. Mais un an quand même, et mon bébé qui grandit.

Je craque, je pleure enfin, j’en parle à quelqu’un.

Je ne contrôle pas, et ça me rend malade. Je n’ai aucune prise, ni sur ces essais, cette hypothétique grossesse ou mes émotions. Même si je continue à les refouler, à me plonger dans un tas de projets en répondant sourire aux lèvres « Non je n’en veux pas d’autres pour l’instant. »

Novembre 2013. Le CHOC. Les revoilà, les 2 barres roses sur ce bâtonnet. Je lâche un « Merde » non contrôlé, du fond de mes toilettes. Je ne dis rien, à part à 3 personnes (monsieur et deux amies très proches), tout en disant « Mais on ne s’emballe pas, hein, ça ne va pas tenir ».

J’attends une semaine pour refaire un test, pressée par une amie avant de la rejoindre chez elle à 8 heures de train. On le sait déjà, toutes les deux, c’est positif. La prise de sang crève le plafond des taux moyens pour ce stade. Celle que je ferais une semaine plus tard, rongée par le doute et la peur, verra le chiffre atteindre des sommets. Souvenirs, comme pour Liloute, la laborantine qui me dit « Eh bien, avec un taux comme ça, on dirait des jumeaux ! »

2 semaines passent et les nausées apparaissent. A taux fort, symptômes de folie… Décembre 2013, les vomissements et la perte de poids s’installent, jusque mi mars 2014.

Les gens se réjouissent, pour eux c’est bien normal qu’on arrive à faire un autre enfant. Ils ne savent pas l’échec d’avant, mon angoisse et mon détachement. Liloute me prend tout mon temps, et c’est tant mieux. Je ne me sens pas enceinte, juste malade. Et puis, la nuit, tout le monde dort, sauf moi. Tout ressurgit, et je suis tétanisée…

« Et si son coeur ne battait plus? »

Après tout, Liloute est notre miracle, comment pourrions nous en avoir un autre ? C’est trop beau, ça va forcément s’arrêter… Et à chaque fois qu’on l’annonce, j’ai peur de la perspective de devoir dire que nous l’avons perdu ensuite. Je ne me sens pas légitime quand je dis que je suis enceinte, j’ai l’impression de mentir. De trop m’avancer.

Pourtant les 3 mois sont passés, et le deuxième trimestre est là. Et une autre angoisse : « Pourquoi je ne le sens toujours pas bouger? »

Liloute m’a donné la mauvaise habitude de m’attendre à des coups de pied dès le début du 4eme mois, plusieurs fois par jour. Alors, quand à 3 mois et demi, je ne sens toujours rien, je m’affole… Et si bébé avait un problème ?

Les échographies montrent un bébé très actif. Une petite fille… Juste que je ne la sens pas parce qu’elle n’est pas placée comme sa soeur, et que justement, je n’y fais pas assez attention, trop occupée avec Miss S…

Je commence à guetter les mouvements le soir venu, dans mon lit. A m’autoriser à poser les mains sur mon ventre. Monsieur le fait pour la première fois à la fin du mois d’Avril. Entretemps, enfin, je ressens ces fameux coups de pieds.

Dans mon souvenir, j’étais plus sereine pour Liloute. Je ne suis pas sure que ce soit vrai… Les jours où Miniloute est moins active, même quelques heures, où ses coups sont moins forts même si ils sont présents, j’angoisse. J’ai peur, peur que mon corps me trahisse encore.

Des mois après, alors que je porte ce deuxième bébé et que je pourrais me dire que mes grossesses ne tiennent pas autant du miracle que je le pense, je continue à penser que mon corps n’est pas fait pour porter un bébé correctement.

Peu importe le nombre de preuves que j’aurais devant moi. Liloute et Miniloute seront mes miracles, un point c’est tout. J’essaie de l’accepter, puisque je ne peux à l’évidence pas le changer…

J’essaie de me raisonner pendant ces heures où je ne dors pas la nuit. « Elle n’a pas bougé depuis 6 heures, est ce qu’elle vit encore? » Et chaque évènement qui concrétise cette grossesse me met encore plus de pression, alimente mes angoisses, parce qu’il faut réaliser que je suis bien enceinte, et la perte serait tellement plus dure à assumer… Moi qui étais convaincue que je ferais mieux cette fois, que je ne répèterai pas mes erreurs, je replonge dedans tête baissée.

Est ce que toutes les futures mamans ont peur à ce point de perdre leur bébé ? Ou est ce que c’est juste moi ? Est ce que je peux encore faire des efforts pour vivre ma dernière grossesse pleinement et ne rien regretter ? Et puis, est ce que ma fille ressent mes angoisses, est ce qu’elle en souffre ? Est ce que Liloute en a souffert ?

Stop.

J’essaie de me concentrer sur les caps à passer. Les 6 mois arrivent, et bientôt la grossesse sera de l’histoire ancienne. Bientôt j’aurais ce deuxième bébé, bien réel dans les bras. C’est ce qu’il y a de plus probable, après tout. Et si il y a quelque chose à laquelle il faut que je me prépare, c’est ça.

Mes deux miracles, bien réels...

Mes deux miracles, bien réels…


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