Robert Olmstead est né en 1954 et a grandi dans une ferme du New Hampshire. Après avoir fait ses études à l'université de Syracuse aux côtés de Raymond Carver et Tobias Wolff, il se lance dans l'écriture et l'enseignement. Aujourd’hui encore directeur du programme de Creative Writing de la célèbre université Wesleyan de l'Ohio, Robert Olmstead a écrit sept romans. Son dernier roman, Le Voyage de Robey Childs, vient de paraitre en France.
Un matin de 1863, la mère de Robey Childs s'éveille bouleversée par un songe. Un grand danger planerait sur son mari, soldat de la guerre de Sécession. Elle envoie alors Robey, son unique enfant, âgé de quatorze ans, sur les traces de son père avec pour seule arme une veste réversible aux couleurs des uniformes de chacune des deux armées, « Tu vas partir à la recherche de ton père et tu vas le ramener chez lui ». Monté sur un cheval noir hors du commun, « A n’en pas douter, cet animal ressentait ce que lui-même ressentait », cadeau providentiel d'un de ses voisins, Robey se lance dans l’aventure.
Roman initiatique, l’enfant Robey traversera des champs de batailles, croisera des personnages plus ou moins recommandables, avant de revenir au pays plein « d’usage et raison » vivre en homme le reste de son âge, c'est-à-dire en sachant « que dans cette vie, il n’en avait pas terminé avec la violence et la mort. »
Un excellent roman servi par une écriture à la hauteur de ses ambitions, touchant mais sans lyrisme exagéré ou pathos appuyé. Robert Olmstead écrit avec une économie de mots - qui n’empêche pas la précision des descriptions de scènes atroces de guerre - ce qui en atténue la vision sans en minorer la force évocatrice, réussissant même à magnifier l’horrible, « … il assista, horrifié, à la dilatation progressive de leurs yeux qui sortaient des orbites, et au bout d’un certain temps, il les vit éclater sous la pression des gaz corporels pestilentiels et s’ouvrir comme de monstrueuses fleurs expulsant leurs pétales et leurs feuilles, les faisant gicler sur le sol alentour. »
Avec des termes simples, à un rythme lent et régulier, la force tranquille des mots exprime toute l’abomination de la guerre à travers ce roman ayant pour décor la bataille de Gettysburg qui rappelons-le, se déroula en juillet 1863 en Pennsylvanie pendant la guerre de Sécession. Cette bataille, la plus lourde de cette guerre quant aux pertes humaines, se conclut par la défaite des sudistes qui laissèrent le terrain aux nordistes et fut un tournant du conflit. Le lecteur pensera au Wilderness de Lance Weller, à ce détail près que Robert Olmstead a écrit son roman en 2007, soit cinq ans plus tôt.
Beauté de la langue, empathie de l’auteur pour ses personnages et paradoxe sublime, un superbe voyage au milieu des ruines et des cadavres jonchant le sol, dans les pas de ce jeune garçon qu’on voit mûrir et découvrir la vie, c'est-à-dire connaître la mort et l’amour, les deux thèmes qui font que le monde est monde depuis toujours. Un bouquin plus que recommandable.