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TELEVISION : Pourquoi les séries françaises vont devenir meilleures que les séries américaines ? - Why the French series will be better than the American ones?

Par Bullesdeculture @bullesdeculture
Ouverture aujourd'hui de la cinquième édition du Festival Séries Mania du Forum des Images à Paris. Et bien que les séries américaines ne monopoliseront pas l'attention en ouvrant et en clôturant l'édition (grâce à la série italienne Gomorra en clôture), le festival, pourtant français, n'a jamais ni ouvert ni clôturé sur une de nos séries hexagonales. Or selon nous, les séries françaises sont amenées à devenir demain bien meilleures que les séries américaines. Explications. Opening day of the fifth edition of the Festival Séries Mania at Forum des Images in Paris. And although the American series does not monopolize attention by opening and closing the edition (thanks to the Italian series Gomorrah which will close this edition), the festival, which is French, has never nor opened neither closed with one of our French series. But we believe that the French series are going to become in the future better than the American ones. Explanations. More in English >> (Translation in progress) Fin des années 1990, dans un univers télévisuel où la TNT n’est pas encore arrivé, la série française atteint son âge d’or en termes d’audience. Parmi les titres les plus convoités, on retrouve Julie Lescaut, Le commissaire Moulin, Navarro, Joséphine Ange Gardien ou Avocats et associés.Quantitativement, ces marques font vivre les chaînes françaises, leur permettant de réaliser des audiences exceptionnelles. Qualitativement, on prend un retard considérable par rapport aux américains qui sont en pleine réorganisation de leur production télé, avec notamment l’avènement des séries sur les chaînes câblées. La case du dimanche soir devient un rendez-vous incontournable pour le public qui peut découvrir des séries comme Sex and the City, Les Sopranos, Six Feet Under, The Wire, Carnivàle. Constatant cet engouement du public américain pour les séries, les networks (chaînes gratuites américaines comme ABC, FOX, CBS) se lancent également dans la production de projets ambitieux qui vont révolutionner la télévision. La saison 2000-2002 marque cet essor des networks avec l’arrivée dans leurs grilles de mastodontes comme Les Experts, Lost, Desperate Housewives… La qualité de ces séries, par rapport aux programmes nationaux, fait que les français ont peu à peu adopté ces produits importés, délaissant les productions hexagonales. Résultat, les séries américaines ont aujourd’hui envahi le paysage français. Pire, la France est le seul pays européen à préférer les contenus d’outre-atlantique à ses productions nationales. La raison principale est que les diffuseurs et les producteurs français n’ont pas su anticiper le renouveau américain et qu’ils ont, par frilosité, trop longtemps trainé des vieilles marques (ex : Julie Lescaut, Navarro) sans penser innovation. Cependant, quelques signes laissent à penser que le temps des vieilleries est terminé et que les séries françaises sont en passe de devenir meilleurs que les séries américaines. 1/ La remobilisation des scénaristes français En 2013, les grandes écoles d’écritures audiovisuelles se sont dotées d’une formation spécifique pour la confection de séries. Au CEEA, conservatoire européen d’écriture audiovisuel, il est déjà possible de suivre Le grand atelier série pour développer son concept original de série et le pitcher devant des producteurs.Depuis la rentrée 2013, la FEMIS, prestigieuse école de cinéma en France, a décidé d’ouvrir un pôle dédié à la formation de scénaristes pour l’écriture des futures séries. Pour ce faire, elle révolutionne le concept de l’auteur solitaire en s’appuyant sur la méthode américaine du showrunner. Le showrunner est la personne clé qui dirige le concept d’une série. Parmi les plus célèbres, on peut citer J.J. Abrams pour Lost, Fringe ; Chris Carter pour X-Files. Il n’écrit pas l’ensemble des épisodes mais décide de la ligne directrice et de l’avancée scénaristique. Il prend par exemple la décision de tuer un personnage, d’en installer d’autres. Dans une moindre mesure, il gère le budget, contrôle le tournage et supervise le montage. Les scénaristes sont regroupés en atelier d’écriture et écrivent ensemble le déroulement de l’histoire, sous forme de brainstorming, toujours sous le contrôle du showrunner.  ABC/ Touchstone En France, l’existence d’un showrunner n’existe pas. L’auteur écrit seul son scénario et le réalisateur est mis sur un pied d’estale. Vince Gilligan, créateur de Breaking Bad, déclarait au Guardian en septembre 2013:   « La pire chose que les Français nous aient jamais donnée, c’est la théorie de l’auteur. C’est un paquet de conneries. Personne ne fabrique un film tout seul. Encore moins une série télévisée. » Quelques projets français ont fait appel à un showrunner américain, comme la série Borgia pour Canal + menée par Tom Fontana (Homicide, Oz). Néanmoins, on remarque, particulièrement pour cette série, que ces collaborations ne fonctionnent pas tant la vision autour de l’écriture est différente entre français et américain. Avec cette initiative, la FEMIS souhaite créer des showrunner du cru capable d’adopter une méthode d’écriture à l’américaine tout en gardant une sensibilité à la française. On est donc sur le point de se constituer une technique efficace pour égaler, et même dépasser, nos amis du nouveau continent. L’écriture en commun à la française est concluante puisqu’elle a fait émerger de séries comme Fais pas ci, fais pas ça, Un village français, ou Kaboul Kitchen (saison2), grâce notamment au collectif SAS, regroupement de scénaristes professionnels. 2/ La prise de risque des chaînes de télévision Alors que les chaînes françaises ont été longtemps réticentes à se lancer dans de nouveaux projets en s’accrochant à leurs anciennes marques, elles semblent aujourd’hui avoir compris les enjeux d’une production de qualité. En fer de lance, Canal+ et Arte, ayant moins la pression de l’audience, ont pris des paris audacieux en proposant des créations originales comme Les revenants, Ainsi-soit-il, Engrenages, Le Tunnel… Ces produits ont reçu un accueil favorable de la critique et du public. Il faut dire que la qualité est au rendez-vous. Les revenants, qui traite du retour à la vie de personnes décédées, sait plonger le spectateur dans un univers fantastique, mélange entre Lost et les 4400.  L’écriture fluide de la série religieuse Ainsi soit-il, sur la formation de prêtres dans un séminaire, n’élude pas un regard corrosif et critique sur le catholicisme.  Arte Les chaînes investissent plus d’argent dans le développement des séries TV. De même, elles sont plus nombreuses à créer leurs propres contenus inédits, depuis notamment l’apparition des chaînes de la TNT en 2005. Ce mécanisme a pour effet de réconcilier petit à petit le public français avec ses produits locaux.  Dans le même temps, on constate que les séries françaises commencent à s’exporter à l’international. Aussi, les Revenants est la série française la plus vendue dans le monde dans plus de 20 pays (Etats-Unis, Suède, Israël, la Turquie, l’Egypte, Hong Kong, Canada, etc.). De la même façon, Engrenages récolte un beau succès en Angleterre. Beaucoup de séries françaises ont été achetées pour faire l’objet d’adaptation dans d’autres pays pour coller davantage à la culture du pays importateur. Par exemple, une série inspirée de Braquo devrait bientôt voir le jour aux Etats-Unis. Les Hommes de l’ombre a été adapté en Hongrie et en Finlande, et fait actuellement l’objet d’une adaptation pour le public américain. Enfin, les chaînes françaises n’hésitent plus à se lancer dans des productions d’envergure tournées en anglais avec la contribution d’acteurs anglo-saxons. Par exemple, la série TF1 Crossing Lines, avec Marc Lavoine et Donald Sutherland, est une coproduction américano-franco-allemande. La série Le Transporteur regroupe le financement de chaînes française, allemande, américaine et canadienne. Même si la qualité n’est pas toujours au rendez-vous sur ces deux titres du fait majoritairement aux difficultés rencontrées par des producteurs aux nationalités différentes à adopter un même point de vue, ces exemples marquent néanmoins le potentiel du modèle français sur le plan international. 3/ La perte de vitesse des séries américaines C’est la débâcle dans le paysage audiovisuel américain. Il semble en effet que la page de l’âge d’or des séries du début des années 2000 est bel et bien tournée. Quelques indices le laissent supposer ?Les séries événementielles network, telles que Desperate Housewives, Lost, Les Experts, ont captivé pendant plusieurs saisons. Cependant, elles sont toutes arrivées à expiration en perdant la majorité de leurs téléspectateurs jusqu’à leur annulation pure et simple de la grille. Seul rescapé de l’eldorado du nouveau millénaire, Les Experts ont perdu de leurs saveurs et ne tiennent que sur sa capacité à ne pas proposer des épisodes feuilletonnant. De ce fait, même si le public ne suit pas chaque enquête de cette police scientifique, il peut regarder de temps en temps sans perdre le fil des aventures. La relève n’a pas été assurée sur les network et les grands showrunner se sont plantés en beauté. La palme des échecs successifs revient sûrement à J.J. Abrams qui n’a cessé de chercher son nouveau Lost sans apporter de point de vue novateur. Conséquence, ces projets se sont crashés à l’image de son avion : Alcatraz n’a pas tenu très longtemps, Fringe, bien que soutenu par la Fox, est vite tombé dans l’oubli, pareil pour Flashforward, enfin Revolution suit la même vague de non-succès. ABC Studios De la même manière, les différents projets médiatiques, annoncés comme des événements networks, se sont tous avérés être un coup de pied dans l’eau. Terra Nova devait être le retour de Spielberg à la télévision, il ne fût qu’un succès éphémère le temps que les américains se rendent compte que l’initiative tournait en rond. De la même façon, Marvel lançait en grande pompe la saison dernière son Agents of Shield. Passé la mi-saison, on se demande si la série va être reconduite. Si certaines séries networks font exception et permettent de maintenir l’originalité  (Person of Interest, The Good Wife), il semble qu’on subit un véritable retour en arrière. Le câble reprend son emprise sur cet univers. Oui, mais pour combien de temps ? Il n’est pas loin le temps où ces grandes messes des chaînes payantes, à grand renfort de marketing, vont aussi perdre de leurs saveurs. Alors que Homeland a réussi à captiver dès la saison un en dynamisant les codes de 24 heures Chrono, la mort d’Henry Bromell, producteur et scénariste de la série, a eu un effet négatif, de sorte qu’elle perd tout intérêt en saison 3. Passé la très belle découverte du pilote de Games of thrones il y a quatre ans, on reste depuis sur des épisodes qui sont survalorisés. ITV / Nick Briggs C’est à l’Europe de profiter de cette faiblesse et de tirer son épingle du jeu. Les anglais ont saisi leur chance et ont entamé une période très prolifique, avec par exemple Broadchurch, Downton Abbey et Sherlock. Du côté hexagonal, on y croit. C’est le moment. Il faut pour ce faire que la France se défasse de la frilosité des chaînes qui ne se risquent pas à lancer  une nouvelle série sans avoir préalablement testé le pilote auprès du public. Ce qui fait qu’il s'écoule parfois plusieurs années entre les saisons d'une série. Avec son originalité, la formation de ses talents et sa capacité à s’adapter, la France a un rôle majeur à jouer sur la scène internationale dans les séries. Or l'âge d'or des séries américaines passées, c’est désormais à la France de redonner un souffle à ce genre. Et c'est avec optimisme que nous faisons le pari que l'année prochaine, le festival ouvrira ou clôtura par une série française. Antoine Corte En savoir plus : - http://www.forumdesimages.fr/fdi/Festivals-et-evenements/Series-Mania-saison-2 (site officiel) ; - Nos séries coups cœur des éditions précédentes : http://www.bullesdeculture.com/search/label/series%20mania - Toutes nos séries chroniquées : http://www.bullesdeculture.com/search/label/serie Pour aller plus loin, je vous propose de découvrir l'émission de mars 2014 de La Grande Séance sur la webradio Séance radio. Autres références utiles :- Peut-on aimer les séries comme on aime le cinéma ? - Vodkaster- Les séries TV sont-elles le 10e art ? - Les grands débats- La série télé est-elle l'avenir du cinéma ? - France Inter- Série Tv, un phénomène de société - Huffington Post

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