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Polyester

Publié le 06 mai 2014 par Olivier Walmacq

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Genre: comédie
Année: 1981
Durée: 1h24

L'histoire: Francine Fipshaw a bien des malheurs. Entre un mari volage propriétaire d'un cinéma porno, une fille nymphomane et un fils sniffeur de colle et écraseur d'orteils, la pauvre femme est accablée. Mais sa rencontre avec un play boy sur le retour va bousculer l'équilibre précaire de cette famille agitée et peut être changer la vie de Francine, enfin presque !


La critique d'Inthemoodforgore:

A priori, un film de John Waters chroniqué par votre serviteur, on pourrait redouter le pire ! N'ayez crainte braves gens, à l'orée des années quatre vingt le petit gars de Baltimore s'est sérieusement calmé. Fini les dégustations d'étrons canins et les barbecues de flics embrochés. Considérablement assagi, Waters livre avec Polyester son premier film grand public. Enfin attention, il fait quand même du Waters, c'est à dire du mauvais goût totalement assumé mais les débordements trash de Pink Flamingos ou Desperate Living sont désormais loin derrière. 
La trouvaille assez géniale du réalisateur est de présenter son film en odorama. Kesaco ? Il s'agit tout simplement d'un procédé olfactif qui permet au spectateur de reconnaître, sur une fiche cartonnée, les mêmes odeurs que les acteurs sentent lors de scènes bien précises dans le film.

Ainsi, lorsque Divine respire une rose, un numéro apparaît à l'écran et le spectateur peut sentir le parfum de la fleur en grattant le même numéro sur sa fiche. Comme c'est John Waters qui est à la baguette, vous vous doutez bien qu'il n'y aura pas uniquement que des parfums subtils à respirer... Pour ce film, le réalisateur s'entoure de son équipe habituelle.
Divine, bien sûr, mais aussi Edith Massey, Mink Stole et Tab Hunter. Attention spoilers: La très plantureuse Francine Fipshaw est une femme au bord de la crise de nerfs. Son mari Elmer, propriétaire d'un cinéma porno, la traite avec mépris et la trompe avec sa secrétaire, la très maigre Miss Sullivan. La pauvre Francine n'est pas mieux lotie avec sa progéniture. Sa fille Lu-Lu est complètement nymphomane et son fils Dexter passe son temps à sniffer de la colle tout en écrasant les orteils des habitants de la ville. Aidée par sa meilleure amie, la richissime Cuttles Kovinski, elle surprend son mari en flagrant délit d'adultère et demande aussitôt le divorce.
Tandis que sa fille tombe enceinte et que son fils, serré par la police, croupit en prison, Francine rencontre Todd, un play boy de supermarché, qui a l'air très épris d'elle. Hélas, celui ci s'avère être non seulement un escroc vénal mais aussi l'amant de la propre mère de Francine, tout aussi cupide que lui. Le couple décide de faire interner Francine afin de toucher la pension alimentaire et mettre en vente la maison. Ils n'auront pas le temps de mettre à bien ces sinistres projets car ils se feront, involontairement, écraser par la voiture de Cuttles. Quant aux enfants de Francine, une fausse couche pour Lu-Lu et la prison pour Dexter, les a littéralement transformés en agneaux. Tout se finira bien avec le retour des enfants prodigues pour le plus grand bonheur de Francine.

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Polyester est un film assez vulgaire, souvent situé au dessous de la ceinture, très pipi caca et donc très drôle pour les amateurs de ce genre d'humour. Une oeuvre qui sent "bon" la fosse septique et les flatulences sous les draps. Waters a beau s'être civilisé, on ne va pas trop lui en demander non plus ! Le film en lui même se laisse suivre agréablement, le sourire toujours aux lèvres, en grande partie au numéro de l'irrésistible Divine. L'acteur/actrice fétiche de Waters en fait des tonnes (vu son gabarit, c'est un peu normal) mais n'a pas besoin, cette fois ci, de nous écoeurer pour être drôle.
Flanqué(e) de son inénarrable complice Edith Massey, l'icône travesti traverse le film en pleurnichant et en picolant. En quelque sorte, une desperate housewife avant l'heure.


Revenons juste quelques instants sur l'odorama. Sachez qu'il y a quelques années, Les Nuls avaient fait un sketch en se basant sur le même principe et que, déjà dans les années cinquante, un procédé similaire avait été testé, sans suite, sur certains films de seconde zone. Polyester aura donc été le premier film grand public où aura été utilisée cette technique de reconnaissance olfactive. Ce film marque un virage à 180° dans la carrière du "Pape du trash".
La folie des années 70 est bien terminée. La rigueur morale des années. 
Reagan est en train de s'installer et les films ultra déviants (dont le mythique Pink Flamingos) appartiennent à un passé révolu dans une Amérique qui redécouvre le puritanisme forcené. Ces bien pensants moralisateurs sont les mêmes que ceux qui ont mis à mort le disco, musique diabolique à leurs yeux, au cours de feux purificateurs géants perpétrés dans les stades de football.

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Notre ami John n'a fait que s'adapter en balançant un peu de bienséance dans le vomi qui caractérisait son cinéma de la première époque. Dommage car par la suite, plus jamais ses oeuvres ne feront preuve d'une telle provocation. John Waters n'est certes pas complètement entré dans le moule hollywoodien mais on ne peut pas dire que ses films aient défrayé la chronique depuis. Sans doute a-t-il beaucoup perdu de son inspiration et de son irrévérence avec la mort de Divine, sa créature cinématographique comme il se plaît à le dire dans une interview. Polyester sera leur avant dernière collaboration. Leur dernièr film, Hairspray, sortira en 1988, quelques temps après le décès du travesti.
Cependant, réduire Polyester à une aimable bouffonnerie serait quelque peu injuste. Le film reste une critique acerbe et bien sentie (sans jeu de mots) de la middle class américaine et le réalisateur se délecte à faire craquer ce vernis impeccable en appuyant là où ça fait mal. Toutefois, le film si sympathique soit-il, est loin d'être un chef d'oeuvre. Le jusqu'au boutisme des oeuvres de jeunesse n'est plus qu'un lointain souvenir et Waters est quelque peu rentré dans le rang. Son film n'en demeure pas moins une agréable fantaisie, lourde et graveleuse à l'image de son(sa) principal(e) interprète qui montre ici une facette d'un talent décidément hors normes. Polyester ? Une comédie qui sent bon (hum hum) le printemps...

Note: 11,5/20


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