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L'Europe américaine

Par Alaindependant

L'Europe de Maastricht est une Europe américaine.
A trois reprises la même formule le proclame dans le texte [du traité de Maastricht, ndlr]:

"L'objectif (du traité) est de développer l'Union Européenne occidentale (U.E.O.) en tant que moyen de renforcer le pilier européen de l'Alliance Atlantique." (Déclaration sur l'U.E.O. B.4)

Pour que nul ne se trompe sur cette vassalité d'une Europe américaine, il est précisé dans la Déclaration I, que l'éventuelle défense commune devra être " compatible avec celle de l'Alliance Atlantique " (paragraphe I) qu'elle doit se tenir " dans le Cadre de l'U.E.O. et de l'Alliance Atlantique " et que "l'Alliance restera le forum essentiel de consultation " (B, 4).
Il ne s'agit donc pas de faire le poids, mais de n'être qu'une composante de la politique étrangère américaine.
L'Europe de Maastricht se situe dans le contexte de la politique de domination mondiale des Etats-Unis.
Le 8 mars 1992, le New-York Times publiait un document émanant du Pentagone. L'on pouvait y lire:

"Le département de la Défense affirme que la mission politique et militaire des Etats-Unis, dans la période de l'après guerre froide, sera de s'assurer qu'il ne soit permis à aucune superpuissance rivale d'émerger en Europe occidentale, en Asie, ou sur le territoire de la C.E.I.
La mission des Etats-Unis sera de convaincre les rivaux éventuels qu'ils n'ont pas besoin d'aspirer à un rôle plus important ni d'adopter une position plus agressive, les dissuader de défier notre suprématie ou de chercher à renverser l'ordre politique et économique établi"

Ce rapport souligne l'importance du "sentiment que l'ordre mondial est en fin de compte soutenu par les Etats-Unis," et dessine un monde où existe un pouvoir militaire dominant, dont les chefs "doivent maintenir les dispositifs qui ont pour but de décourager des concurrents éventuels qui aspireraient à un rôle régional ou mondial plus important."

"Nous devons chercher à empêcher l'apparition de systèmes de sécurité exclusivement européens, qui mineraient l'OTAN." (International Herald Tribune, 9 mars 1992).

Dans l'acte final de la conférence de Maastricht, la Déclaration sur les rapports avec L'Alliance Atlantique ne laisse aucun doute à ce sujet: "L'Union européenne agira en conformité avec les dispositions adoptées dans L'Alliance Atlantique."
Le traité préconisant que les institutions européennes mettent en oeuvre une politique commune pour "tous les domaines de la politique étrangère", cela signifie " à la lettre, écrit Paul Marie de la Gorce, directeur de la Revue de Défense Nationale, qu'il n'y aura plus du tout de politique nationale ". Cette disposition figure en tête de l'article J.1, du titre V et aussi dans l'article J. 4.
Il est donc bien clair qu'il s'agit d'une Europe américaine.
Il en est de même de la politique économique et sociale et de la politique tout court.
De même que Bush a lancé en l991 l'initiative d'un marché unique de toutes les Amériques de l'Alaska à la Terre de feu de même qu'il a notifié au président du Sénégal Abdou Diouf, la volonté américaine d'une unification économique rapide de l'Afrique, de même le président Reagan, dès le 8 mai 1985 appelait à "élargir l'unification européenne pour qu'elle aille de Lisbonne jusqu'à l'intérieur du territoire soviétique", Georges Bush s'est félicité des décisions historiques prises à Maastricht: "Une Europe plus unie, dit-il, donne aux Etats-Unis un partenaire plus efficace, prêt à assumer de plus grandes responsabilités." Clinton, en 1998, salue avec enthousiasme la création de l'Euro.
Maastricht signifie un ralliement total, et en principe définitif, à une économie de marché sans limite.
Valéry Giscard d'Estaing, dit à TF1, le 4 juin 1993, qu'avec l'application de Maastricht il n'y aurait plus de nationalisations possibles en vertu des articles 102 A assorti de surveillance et de sanctions (art. 104 C).
Même un économiste fort loin d'être hostile à ce marché sans limite du capitalisme libéral, écrit "Le problème est de savoir si ce choix doit être imposé par un Traité sur lequel, en principe, personne ne pourra revenir, et si les peuples doivent ainsi se voir interdire toute autre option."
L'article J.3 stipule expressément cette interdiction de revenir sur les décisions.
Robert Pelletier, ancien Directeur général des services économiques du CNPF et membre du Comité économique et social de la CEE au titre du patronat, trace les projections suivantes (Le Monde du 23 juin 1992): en Espagne, d'ici à 1997, poussée du chômage de 16 % à 19 %, en Italie, "explosion sans exemple historique du chômage"; "calculs qui donnent le vertige" pour la Grèce et le Portugal. Quant aux français, "on ne pourra pas leur dissimuler trop longtemps que la politique induite par Maastricht, sous des couleurs libérales de retour à l'économie de marché, est, en fait, le modèle le plus authentiquement réactionnaire de ces soixante dernières années."
Ainsi intégrée au marché mondial dominé par les Etats-Unis, l'Europe livre son agriculture, son industrie, son commerce, son cinéma et sa culture entière, aux règles du libre échange dont un économiste aussi prudent que Maurice Allais dit clairement "J'exclurais, au moins pour l'avenir prévisible, toute orientation vers un libre- échange mondial, comme c'est la tendance actuelle."

Roger Garaudy, L'avenir, mode d'emploi, Editions Vent du Large, Paris, 1998, pages 52 à 55

Article à lire en entier à: http://rogergaraudy.blogspot.fr/2010/09/leurope-vassale.html


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