Les beaux jours du moi de mai sont là, Cannes vit au rythme de la sélection officielle et les gros blockbusters débarquent sur nos écrans. Et c’est le très attendu (et redouté) Godzilla qui ouvre le bal des big pop corn movies de l’été avec un beau lifting – reboot pour son soixantième anniversaire.
Et oui, Godzilla, il est bon de le rappeler, est né en 1954 au Japon; fruit de la collaboration du studio Toho qui souhaitait créer un King Kong japonais et d’Ishiro Honda, ancien assistant réalisateur d’Akira Kurosawa et vétéran de la Guerre du Pacifique. Le personnage du grand monstre destructeur marque d’abord la mauvaise conscience japonaise face à l’impérialisme militaire, la punition des sévices infligés à l’ordre naturel comme la pollution du nucléaire. 28 films plus tard, Godzilla est toujours une icône indéboulonnable du cinéma bis et de la pop culture, malheureusement assez absente des écrans depuis plusieurs années.
Autant dire qu’un remake, à Hollywood de surcroit avait tout de l’évènement cinéma et les quelques extraits postés au compte-gouttes sur la Toile depuis quelques mois en faisaient saliver plus d’un… Godzilla plus fort que le dragon Smaug et les kaijus de Pacific Rim réunis? Peut-être bien!
Deux créatures préhistoriques refont surface après des millénaires. Leur but? S’accoupler pour recoloniser la planète. Leur nourriture? La radio-activité. C’est alors qu’un autre monstre se réveille: Godzilla, censé rétablir l’ordre naturel et combattre et anéantir ces dangers devant une humanité impuissante…
Après un premier film de monstres – Monsters, sorte de District 9 du pauvre – le britannique Gareth Edwars entre à Hollywood par la grande porte en s’attaquant à un aussi gros morceau que Godzilla. Surtout quand des spectateurs ont encore en mémoire le calvaire du film de 1998 et que les studios pleurent encore les mauvais résultats au box-office de Pacific Rim. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le rookie réussit son coup. Godzilla est une vraie réussite: une mise en scène virtuose dans les scènes d’action au sol ou dans les airs, une excellente maitrise du rythme et un casting première classe. Bryan Cranston et Juliette Binoche, très présents dans les bandes-annonces, laissent vite la place à Aaron Taylor-Johson et Ken Watanabe.
Le film de Gareth Edwards se divise en deux parties bien distinctes, qui s’articulent plutôt bien, ce qui ne cache pas pour autant l’impression que les scénaristes n’ont pas réussi à choisir entre deux histoires. En effet, dès le générique, on est plongé dans un pur polar SF paranoïaque voire complotiste. Godzilla est apparu en 1954 en plein Pacifique mais les Américains ont préféré garder ça pour eux et tentent depuis des décennies de tuer cette bête via des pseudo essais nucléaires. Jusqu’à ce qu’en 1999, l’ingénieur Joe Brody (Bryan Heisenberg Cranston) enregistre depuis sa centrale nucléaire au Japon de mystérieuses ondes venues de la mer et assiste impuissant à la destruction de la centrale et la mort de sa femme… Devenu un ermite paranoïaque persuadé que le gouvernement et l’armée nous cachent des choses, il reçoit la visite de son fils Ford, soldat dans l’US Army la classe, qu’il convainc de l’accompagner sur la zone contaminée. L’ancienne centrale est devenue le nouveau nid d’une effroyable créature qui se nourrit de radioactivité et qui se réveille soudain. Mais ce n’est pas encore Godzilla…
Et c’est là que le « vrai film » commence! On oublie la quête de vérité du film, la conspiration entre scientifiques et militaires, les questionnements sur la place de l’homme dans la nature (sauf dans quelques dialogues alibis). On ne sait même pas pourquoi ces bêtes viennent et pourquoi elles veulent détruire l’humanité et à vrai dire on s’en fiche. Certes, on aurait aimé en voir un peu plus de la partie enquête mais les 60 minutes d’action qui suivent effacent tous les regrets. Et il faut que question action – que ce soit sur terre ou dans les airs – Gareth Edwards connait son métier. Le réalisateur semble d’ailleurs nettement plus à l’aise dans cette partie centrale du film, sa mise en scène étant beaucoup plus fluide et nerveuse qu’au démarrage. L’angoisse – celle du fan qui attend beaucoup de ce film - disparaît alors au profit d’une euphorie juvénile; Gareth prend son Godzilla au sérieux, loin des tentations régressives de Guillermo del Toro dans Pacific Rim. Le Godzilla 2014 s’offre même quelques moments cultes comme la descente en parachute des militaires qui dessine des sortes de vaines sanglantes dans le ciel brumeux et l’affrontement final entre Godzilla et les MUTO. Un climax d’un panache hors du commun, qui lui permet de synthétiser instantanément toutes les influences et aspirations du film, entre les kaijus eiga originaux, les films de monstres américains des 50′s et Les Dents de la Mer et Jurassic Park. C’est la grande surprise du film, on préfère ne pas vous en dire plus…
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