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Zurbaran à Bruxelles

Publié le 19 mai 2014 par Pralinerie @Pralinerie
Bozar à Bruxelles propose une rétrospective sur un peintre espagnol que j'apprécie énormément, Zurbaran. En premier lieu, j'ai découvert ses saintes, toujours vêtues de tenues riches et précieuses sur des fonds sombres, tenant l'instrument de leur supplice dans leurs fines mains. Puis, j'ai vu à Séville des tableaux pour des congrégations, ces moines tout de blanc vêtus. Et la luminosité, la subtilité de ces blancs m'a sidérée. Je trépignais donc pour aller visiter cette exposition.  Cette exposition, plutôt courte, propose un parcours chronologique dans l'oeuvre du peintre du siècle d'or. Tout commence à Séville, où il peint pour les divers ordres religieux. Dans un esprit caravagiste, il joue sur un éclairage violent et un fond sombre qui donnent du relief aux personnages, façonnés par le clair obscur. C'est le cas de son très beau Saint Grégoire par exemple. On admirera aussi le rendu des matières sur ce tableau, les broderies de la chasuble, la finesse du surplis, la profondeur des teintes. S'ensuit la commande sur la vie de Saint Pierre Nolasque (qui n'est pas la plus belle salle) puis les peintures des saint mystiques, qui ont une relation particulière, presque intime, avec Dieu. Celle-ci peut-être montrée à travers une peinture à deux niveaux, qui fait se rencontrer humain et divin ou une peinture du saint, seul, à la spiritualité intériorisée. Cette peinture vise bien entendu à inspirer les croyants et à servir de modèle aux catholiques de la Contre-Réforme. On sent bien le contemporain de Murillo ici.  Zurbaran, Saint Grégoire, Séville S'ensuit une salle sur les natures mortes, que le peintre aime à ajouter à ses scènes religieuses. On poursuit avec la passion du Christ. Là, coup de cœur pour la simplicité et la puissance de l'Agnus Dei (San Diego). Par contre, je suis moins fan de ce qu'il a pu peindre à Madrid, lorsqu'il est appelé en 1634 pour décorer le Buen Retiro avec les meilleurs peintres du moment. Les scènes mythologiques et les scènes religieuses sur fond de paysage, ça lui va moins bien. Idem pour les scènes de la vie simple de la Sainte famille : Jésus qui se pique le doigt, ça pique aussi les yeux... Bref, c'est un peu kitsch pour le goût du jour. Agnus Dei, Zurbaran, San Diego On poursuit avec les vierges Marie. Et là, on en prend plein les yeux. L'immaculée conception de Siguenza est tout simplement épatante. Humble, en prière, dominant le monde, elle dégage une puissance surnaturelle. Sans parler de L'apparition de la vierge du rosaire aux chartreux, bluffante d'humanité, de douceur et de pouvoir. Là encore, cela vaut la peine de jeter un œil aux matières (idem pour le Saint Michel un peu ridicule de la salle voisine) : les effets de relief, de brillance, de plis, de nuance sont d'une grande maîtrise.  On découvre enfin quelques unes de ces saintes dont je vous parlais plus haut. Et quelques autres personnages, colossaux, devant des paysages ou des fonds sombres. La plupart de ces œuvres étaient destinées à l'Amérique, où le peintre avait également des commanditaires. Enfin, avec l'installation de Zurbaran à Madrid, on voit s'opérer un changement dans sa peinture. En effet, on est loin des contrastes du Saint Grégoire. Ici, tout est plus doux. Les articulations entre personnage et fonds sont moins nettes comme si le peintre avait presque "flouté" les formes. Là aussi, quelques belles surprises, notamment Saint François et sa bure aux marrons innombrables. Enfin, l'exposition se clôt sur deux scènes religieuses qui montrent encore la touche très réaliste de Zurbaran, sa façon de rendre perceptible l'intériorité, la spiritualité de ses personnages.  Cette exposition, qui propose finalement assez peu de tableaux (trois à quatre par salle en général), permet de bien lire l'évolution de la peinture de Zurbaran, d'en découvrir les différents aspects. Elle invite à la contemplation lente des œuvres, dans une demi-obscurité. Et parfois en musique (sacrée) (grâce à quelques casques) ce qui convient plutôt bien à cette peinture religieuse et recueillie. Bref, ça tenait du pèlerinage pour moi mais c'est aussi un bon moyen de rencontrer cet artiste ! Avant de quitter Bozar, nous avons fait un tour dans l'expo No Country for young men qui présente des œuvres d'artistes grecs contemporains. Des choses intéressantes et/ou percutantes, d'autres moins compréhensibles... On reste un peu sur sa faim.

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