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Des interprètes sur scène

Publié le 21 mai 2014 par Stéphan @interpretelsf

Dans le prolongement du billet intitulé "L’interprète artiste tragi-comique" et pour réveiller ce blog qui dort un peu, voici un article extrait des Dernières Nouvelles d’Alsace qui revient sur le travail de mes deux excellentes collègues, Séverine Michel et Rachel Fréry, qui adaptent et traduisent en LSF des spectacles vivants pour les personnes sourdes ou malentendantes.
Plus d’infos sur leur page Facebook : Deux mains sur scène

  

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 Séverine Michel, à droite, adapte en langue des signes
un concert pour enfants des Weepers Circus

Leur quotidien, , c’est la traduction en langue des signes française (LSF) de discussions officielles, de rendez-vous administratifs, professionnels, médicaux, judiciaires, sociaux. Des cérémonies religieuses aussi, des fêtes de familles, des conférences. Séverine Michel et Rachel Fréry, deux professionnelles diplômées en LSF ont décidé de se lancer, en plus de leur activité habituelle, dans la traduction en langue des signes de spectacles vivants. Les spectateurs de la salle de l’Eden, à Sausheim, ou les fans du groupe strasbourgeois les Weepers Circus, les ont vues à plusieurs reprises sur scène ces derniers mois.

« Au départ, il y a un besoin de faire autre chose, d’utiliser cette langue qui fait notre métier depuis quinze ans, mais de façon différente », explique Rachel Fréry. « Avec le spectacle vivant, on est dans autre chose que de l’interprétation, raconte Séverine Michel, c’est plutôt de l’adaptation, il y a une part de créativité, alors que dans la traduction, on doit être le plus neutre possible et simplement traduire ».

Une part de créativité, donc, parfois très importante tant la langue française est riche de multiples possibilités. « Souvent dans les chansons, il y a des rimes, des allitérations, des jeux avec les sons, raconte Rachel Fréry On ne peut pas traduire comme cela, simplement. Avec la spécificité de la langue des signes que quand il faut traduire des rimes, il faut faire des rimes avec les mains ».
Comme cette chanson pour enfants « Trois p’tits chats », qui enchaîne « trois p’tits chats, chapeau d’paille, paillasson… etc. » Séverine Michel raconte avoir imaginé et travaillé la façon de passer, dans la langue des signes, du geste traduisant chat (une référence aux moustaches) à celui traduisant chapeau (un mouvement de la main près de la tête). Et ce pour réaliser une sorte de fondu-enchaîné en langue des signes qui retranscrit l’esprit initial du jeu sur les sonorités. « J’ai rendu les rimes visuelles, pour que ça colle au sens et que ça colle au rythme et aux rimes » dit-elle joliment.

Des rimes d’autant plus visuelles que l’interprète utilise également son visage pour moduler le sens et les intonations. Les deux jeunes femmes, réunies pour cette activité, sous le nom « Deux mains sur scène » se tournent vers le spectacle vivant et imaginent aussi participer un jour, si l’occasion se présente, à la conception d’un spectacle, qui intégrerait la dimension bilingue/LSF dès le départ. Car derrière le côté artistique de l’initiative, se cache un aspect militant, pour un meilleur accès des personnes sourdes à la culture. « C’est vrai qu’il n’y a pas assez de spectacles adaptés en LSF, résume Rachel Fréry. Il y a un travail de sensibilisation à mener, vers les artistes, mais chez les sourds aussi. C’est un peu comme chez les entendants, il y en a qui disent que le théâtre par exemple, c’est trop élitiste et n’y vont pas. Chez les sourds, il peut aussi y avoir ce réflexe de se dire, “ce n’est pas pour moi”. Les artistes ne sont pas habitués, les sourds non plus ».

Source : DNA © 7 Mai 2014



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