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Écriture, Wittgenstein et Atlantic City…

Publié le 22 mai 2014 par Chatquilouche @chatquilouche

À cet auteur en panne qui m’écrit : « Chaque matin, la seule pensée d’ouvrir mon ordinateur et de me crayon-sur-clavier-ordinateurretrouver devant l’écran blanc me terrorise. Mon roman est bloqué. Je cherche, cherche, sue, réfléchis, fais de longues promenades… Rien ! Le texte m’apparaît irrémédiablement dans une impasse. »

Tu prends tout à l’envers, camarade. Cesse de réfléchir ! Ce qui écrit en toi est beaucoup plus intelligent et créatif que toutes tes réflexions. C’est le fait même de t’asseoir devant l’écran et de faire aller très concrètement tes doigts sur le clavier qui résoudra tes problèmes d’écriture. Attendre d’avoir découvert « la solution » par des marches ou des méditations tourmentées est une ineptie. Ce sont les mots écrits pour vrai qui attirent les autres mots, ce sont les phrases qui attirent les phrases, les paragraphes qui engendrent les paragraphes, les chapitres, etc.

C’est en écrivant qu’on résout les problèmes d’écriture.

(Le chien de Dieu)

*

Insomnie. Une bonne partie de la nuit à tourner et à retourner dans ma tête quelques passages des Remarques mêlées de Wittgenstein.

Notamment :

Si quelque chose est bon, alors c’est également divin. Voilà qui, étrangement, résume mon éthique.

Seul quelque chose de surnaturel peut exprimer le surnaturel.

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Je pourrais dire : Si le lieu auquel je veux parvenir ne pouvait être atteint qu’en montant sur une échelle, j’y renoncerais. Car là où je dois véritablement aller, là il faut qu’à proprement parler je sois.

Ce qui peut s’atteindre avec l’aide d’une échelle ne m’intéresse pas.

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C’est une grande tentation que de vouloir rendre l’esprit explicite.

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Le rapport entre un film d’aujourd’hui et un film d’autrefois est comme celui d’une automobile d’aujourd’hui avec une automobile d’il y a vingt-cinq ans. L’impression qu’il donne est tout aussi ridicule et inélégante, et l’amélioration du film correspond à une amélioration technique, comme celle de l’automobile. Elle ne correspond pas à l’amélioration – si l’on ose employer ce terme dans ce cas -d’un style d’art. Il doit en être tout à fait de même dans la musique de danse moderne. Une danse de jazz devrait donc se laisser améliorer comme un film. Ce qui distingue tous ces développements du devenir d’un style, c’est que l’esprit n’y a point part.

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Opinion que je ne partage pas – je viens de revoir Atlantic City de Louis Malle… Mais opinion qui ouvre tout de même des perspectives à la réflexion.

Malgré ses fulgurances, j’abandonne la lecture de ce livre pour la deuxième fois – je devrais écrire la seconde, car il n’y en aura pas de troisième. Je comprends ce qui ne va pas chez lui : il ne respire pas, donc il ne fait pas place à la musique – ni à la sienne ni à celle du lecteur. Pas d’atmosphère, pas d’empathie par où communiquer. Tout comme chez Agatha Christie dont je n’ai jamais pu terminer un seul roman.

(Le chien de Dieu)

L’auteur…

Auteur prolifique, Alain Gagnon a remporté à deux reprises le Prix fiction roman du Salon 

Écriture, Wittgenstein et Atlantic City…
du Livre du Saguenay–Lac-Saint-Jean pour Sud (Pleine Lune, 1996) et Thomas K (Pleine Lune, 1998).  Quatre de ses ouvrages en prose sont ensuite parus chez Triptyque : Lélie ou la vie horizontale (2003), Jakob, fils de Jakob (2004),Le truc de l’oncle Henry (2006) et Les Dames de l’Estuaire (2013).  Il a reçu à quatre reprises le Prix poésie du même salon pour Ces oiseaux de mémoire (Le Loup de Gouttière, 2003), L’espace de la musique (Triptyque, 2005), Les versets du pluriel (Triptyque, 2008) et Chants d’août (Triptyque, 2011).  En octobre 2011, on lui décernera le Prix littéraire Intérêt général pour son essai, Propos pour Jacob (La Grenouille Bleue, 2010).  Il a aussi publié quelques ouvrages du genre fantastique, dont Kassauan, Chronique d’Euxémie et Cornes (Éd. du CRAM), et Le bal des dieux (Marcel Broquet).  On compte également plusieurs parutions chez Lanctôt Éditeur (Michel Brûlé), Pierre Tisseyre et JCL.  De novembre 2008 à décembre 2009, il a joué le rôle d’éditeur associé à la Grenouille bleue.  Il gère aujourd’hui un blogue qui est devenu un véritable magazine littéraire : Le Chat Qui Louche 1 et 2 (https://maykan.wordpress.com/).


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