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Un souvenir d'étudiant

Publié le 25 mai 2014 par Dubruel

LA PATRONNE (d'après Maupassant)

J’étais à Paris étudiant en droit

Et logeais dans une pension sévère

Que mes parents réglaient chaque mois.

La patronne de mon logis avait l’air

D’un capitaine commandant un paquebot.

D’une voix forte,

Très forte,

Cette femme décidait tout d’un mot

Mais elle me soignait comme une mère,

Mieux qu’une mère.

Elle entrait souvent

Dans mon appartement,

Pour vérifier si mon lit était fait

Et mes habits correctement brossés.

Elle devait avoir quarante ans environ.

Moi, n’ayant jamais quitté le Pays Normand,

J’avais décidé de vivre joyeusement

Et de toutes les façons !

Je lui déclarai que je voulais rentrer

À l’heure qui me plairait.

-«Vous ne devez pas trainer toute la nuit.

Il est interdit de rentrer après minuit. »

-« Madame, d’après la loi,

Vous êtes tenue de m’ouvrir à toute heure.

Si vous refusez, j’irai coucher ailleurs

Et à vos frais. C’est mon droit. »

Je dus lui faire impression

Car, depuis, elle me traita

Avec une faveur marquée.

Elle avait pour moi des attentions,

Des petits soins, des délicatesses

Et même une certaine tendresse

Qui ne me déplaisait pas.

Quelquefois, pendant les repas,

Par surprise, je l’embrassais…

Rien que pour la gifle qu’elle me lançait !

Mais voilà

Que je fis la connaissance

D’Emma,

Une belle étudiante en sciences.

Comme la patronne se couchait à dix heures,

Je la fis venir à la pension

À onze heures.

J’ouvris la porte avec précaution

Et nous montâmes l’escalier

Sur la pointe des pieds.

Puis je devins pressant.

J’enlevais un à un ses vêtements.

Emma cédait, mais résistait un peu,

Retardant l’instant fatal et délicieux.

Elle n’avait plus sur elle qu’un jupon

Quand tout à coup ma porte s’ouvrit.

Entrait la patronne de la pension

…Dans la même tenue qu’Emma :

-« Je ne veux pas de fille ici ! »

-« Mademoiselle n’est qu’une amie.

Elle venait prendre le thé. »

-« On ne se met pas dans cette tenue

Pour prendre une tasse de thé.

Chassez-moi cette fille des rues ! »

Emma se rhabilla et affolée,

S’élança dans l’escalier.

Je l’ai rattrapée en bas

Et la retint par le bras

Mais elle me repoussa :

-« Laissez-moi…Ne me touchez pas ! »

Je remontais, penaud, désemparé.

La chambre de la patronne était ouverte :

-« J’ai à vous parler, entrez ! »

Je m’arrêtais devant elle, en baissant la tête.

Elle avait croisé les bras sur sa poitrine

Que couvrait mal une chemise de soie fine.

-« Je ne veux pas de filles chez moi,

Comprenez-vous ?

Je ferai respecter mon toit.

Entendez-vous ? »

Accumulant les indignations,

Elle m’accablait

Sous l’honorabilité de sa maison

Et me lardait

De reproches mordants.

Au lieu de l’écouter,

Je la regardais,

N’entendant

Plus un mot,

Mais plus un mot…

Je voyais son admirable poitrine,

Et sa lèvre me parut mutine.

Je n’aurais pas

Imaginé qu’il y eut des appâts

Aussi appétissants

Sous un si léger vêtement.

Elle semblait rajeunie de dix ans

En son déshabillé !

Et voilà que, bizarrement,

…Je me suis senti tout remué.

Je retrouvais

La situation précédente

…Et presqu’aussi tentante !

J’ai regardé son lit.

Hum ! Ce lit !

Il devait faire là aussi

Bon que dans un autre lit.

Quoi de plus troublant qu’un lit défait ?

Celui-là me grisait.

La patronne maintenant

Me parlait doucement

Comme si elle allait m’accorder son pardon.

-« Voyons…, voyons… »

Je la saisis

Et me mis

À l’embrasser, mais à l’embrasser !

Elle se débattait…sans se fâcher.

Et dix fois répéta :

-« Oh ! La canaille…la canaille…la ca… »

Elle ne put achever. Je l’avais enlevée

Et l’emportais.

Je rencontrai le bord du lit.

J’y suis tombé… sans la lâcher…

Il y faisait fort bon dans ce lit.

Une heure après,

Glissée à mon côté,

Contente

Et reconnaissante

Elle gazouillait comme une caille :

-« Oh !...la canaille !...la canaille !... »


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