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Consommation : année zéro

Publié le 01 juin 2014 par Polinacide @polinacide
Consommation année zéro Raffaele Cicala Editions Le Cherche-Midi

Consommation année zéro
Raffaele Cicala
Editions Le Cherche-Midi

« À consommer avec modération ». Longtemps martelé avec un malin plaisir par les publicitaires, voilà un slogan qui définit désormais notre propre rapport à la dépense. Bons plans, rabais et autres promotions ne sont plus le privilège du « pauvre », mais la monnaie courante d’une crise qui a muté en état constant. Aucune raison d’en avoir honte : il a bien fallu s’adapter, de force mais aussi de gré. Si l’acte d’achat par essence n’a jamais été gratuit, il semble aujourd’hui porteur d’une signification particulière, plus profonde que la simple pulsion qui lui suffisait autrefois.

Dis-moi comment tu consommes, je te dirais qui tu es : credo moderne d’un "consom’acteur" se revendiquant raisonné, sélectif et sensible à l’authenticité des produits qu’il achète. Et fier de l’être. Bio, écolo, made in France et local, ne sont ils pas tant de marqueurs militants pour lesquels « ça vaut le coup » de mettre le prix ? La planète dira merci. Sus au superflu et au gaspillage, toute nouvelle acquisition se veut vertueuse, réfléchie et surtout utile, épurée dans sa forme jusqu’au choix du packaging. En témoigne le grand retour du « fait maison », qu’il s’agisse de cuisine, de bricolage, de couture ou de « do it yourself ». Histoire d’occuper les dix doigts autrement que par le va et vient de la carte bancaire.

emmanuelle_histoires de voir_ Econome
Un virage radical pour les entreprises, annonciateur d’un « new deal » où la confiance se gagne plus difficilement qu’elle se perd. Plus question de faire les frais d’une énième arnaque : maintenant qu’il a pris conscience de son potentiel d’influence, le client-roi n’hésite plus à "édicter ses conditions générales d’achat". Ambassadrice, décisionnaire et co-créatrice des produits, « ce qui avant semblait être une masse compacte, de consommateurs potentiels, s’est muée en une myriade d’atomes interconnectés ». Une forme de « narration entre soi et les autres » amplifiée par la force du web et relayée par les réseaux sociaux. Aussi douloureuse fût-elle, c’est peut-être là que la crise a joué son rôle le plus salvateur, transformant le « pouvoir d’achat » en « vouloir d’achat ». Nuance. Un heureux paradoxe à l’heure de l’hyperconso’, d’autant plus surprenant qu’il survivra sans doute à la reprise économique annoncée. Car comme les vieux réflexes, les bonnes pratiques elles aussi ont la vie dure.


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