De Diao Yinan
Avec Fan Liao, Lun-mei Gwei, Xue-bing Wang
Chine, 2014, 1h46
Sortie le 11/06/2014
Synopsis
En 1999, un employé d’une carrière minière est retrouvé assassiné et son corps dispersé aux quatre coins de la Mandchourie. L’inspecteur Zhang mène l’enquête, mais doit rapidement abandonner l’affaire après avoir été blessé lors de l’interpellation des principaux suspects.
Cinq ans plus tard, deux nouveaux meurtres sont commis dans la région, tous deux liés à l’épouse de la première victime. Devenu agent de sécurité, Zhang décide de reprendre du service. Son enquête l’amène à se rapprocher dangereusement de la mystérieuse jeune femme.
La veine des films noirs
Comme les précédents films de Diao Yinan, Black Coal s’inscrit dans la veine du film noir. Son premier film, Uniform (2003), traitait de la double identité d’un personnage se servant des travers d’une société en déliquescence pour survivre, alors que Train de nuit, présenté à Cannes en 2007 (section Un Certain Regard), suivait les déambulations d’une jeune femme gardienne de prison dans un univers fait de tristesse et de vengeance.
Sept ans plus tard, Black Coal suit les codes du genre. Le héros est un semi-raté qui cherche dans son enquête à se sauver lui-même ainsi que ceux qu’il estime, notamment la principale suspecte de l’affaire, une mystérieuse et troublante femme fatale.
Une œuvre extrêmement bien maitrisée
L’intrigue, ressemble à un jeu de piste, passant tantôt par un homme "mort-vivant" qui assassine à coups de patin à glace ou par la recherche du propriétaire d’une mystérieuse veste abandonnée au pressing.
L’action se déroule dans une petite ville industrielle du nord de la chine figée par un hiver extrêmement rigoureux. Tout semble endormi, mais quelque chose gronde et un tueur agit dans l’ombre. Diao Yinan entraîne le spectateur le jour dans un univers gris symbolisé par des immeubles aux façades tristes, tandis que la nuit, l’atmosphère est carrément inquiétante car la neige assourdit tous les bruits.
L’usage des couleurs dans Black Coal éblouit : façades tristes éclairées par des arcs-en-ciel de couleurs, nuit noire déchirée par des néons clignotants, feux d’artifice tirés en plein jour. Lors d’un plan sublime qui évoque Le troisième homme, le réalisateur filme une grande roue, qui s’allume, scintille et s’éteint pour disparaître dans la nuit.
Black Coal est une œuvre, qui comprend des plans séquences époustouflants de maîtrise. La première séquence d’interpellation du film est absolument bluffante. Tétanisante, la scène fait d’autant plus ressortir son extrême violence qu’elle intervient à un moment inattendu..
http://www.youtube.com/watch?v=9jLNjC9-KLQ
Diao Yinan brosse un portrait des dysfonctionnements de la Chine actuelle
Black Coal est aussi le portrait des dysfonctionnements de la chine actuelle, d’une société de plus en plus marquée par les inégalités sociales, de plus en plus inhumaine. A ce titre, le film partage les mêmes préoccupations que A touch of sin de Jia Zhang-Ke. Les deux films ont aussi en commun un sens certain de l’absurde, un humour à froid dérangeant et pourtant très efficace.
Black Coal sur les écrans chinois
Contrairement à son confrère Jia Zhangke dont le film A touch of sin, récompensé l’an dernier à Cannes du prix du scénario, n’est toujours pas sorti dans son pays, celui de Diao Yinan a pu le faire moyennant "des coupes mineures", assurait-il. Black Coal sorti sur 2 000 écrans, est devenu le premier film d’auteur à franchir la barre des 100 millions de yuans (18 millions d’euros) de recettes au box-office chinois.
Black Coal alchimie réussie entre le film de genre et le film d’auteur a reçu l’ours d’or du Meilleur Film à la 64ème Berlinale (2014). L’acteur Liao Fan, qui incarne le policier a été récompensé par l’ours d’argent du Meilleur acteur.