Quand on me demande quel est mon livre préféré, je réponds parfois que c’est L’Ombre du Vent de Carlos Ruiz Zafon : merveilleux mélange de mystère, de passion, de drame et de fantastique, ce livre m’avait littéralement emportée. En 2009, Zafon en avait écrit une suite qui n’en était pas vraiment une, Le Jeu de l’Ange. Avec ce titre que j’avais trouvé un peu alambiqué et moins prenant que le premier tome, il poursuivait ainsi une série désormais intitulée Le Cimetière des Livres Oubliés. En 2012, paraissait un troisième volume : Le Prisonnier du Ciel. Avide de retrouver les sensations du début de la saga, je me suis donc lancée : hélas, c’est un bien joli titre pour un livre qui ne tient malheureusement pas ses promesses.
Barcelone, Noël 1957. À la librairie Sempere, un inquiétant personnage achète un exemplaire du Comte de Monte Cristo. Puis il l’offre à Fermín, accompagné d’une menaçante dédicace. La vie de Fermín vole alors en éclats. Qui est cet inconnu ? De quels abîmes du passé surgit-il ? Interrogé par Daniel, Fermín révèle ce qu’il a toujours caché. La terrible prison de Montjuïc en 1939. Une poignée d’hommes condamnés à mourir lentement dans cette antichambre de l’enfer. Parmi eux Fermín et David Martín, l’auteur de La Ville des maudits. Une évasion prodigieuse et un objet volé… Dix-huit ans plus tard, quelqu’un crie vengeance. Des mensonges enfouis refont surface, des ombres oubliées se mettent en mouvement, la peur et la haine rôdent. (source : Amazon.fr)
Intrigant et aguicheur, ce résumé était très alléchant de prime abord : retour des Sempere père et fils et de Fermín (héros de L’Ombre du Vent), de David Martín (héros du Jeu de l’Ange), mystères épais comme les brumes de Barcelone, drames sous-jacents… Pourtant, contrairement au voyage que ces quelques lignes laissaient présager, j’ai attendu pendant les 400 pages de l’ouvrage de ressentir un frisson d’évasion qui n’est jamais venu. Car disons-le sans détour : de tension ou d’enjeu dramatique, vous n’en trouverez pas dans Le Prisonnier du Ciel. La vie de Fermín qu’on pensait voir voler en éclats est tout au plus légèrement troublée. On se désintéresse également très rapidement de l’inconnu dont la menace est bien trop évanescente pour inquiéter. Enfin, le personnage de Daniel apparaît dans ce volume terriblement terne et peu attachant et la Barcelone quasi-surnaturelle que Zafon décrivait comme personne a bien pâli. Et que dire du Cimetière ? Il est devenu comme les livres qu’il abrite : quasiment oublié…
Pour autant, la lecture ne fut pas foncièrement désagréable, parce que le style de Zafon reste plaisant et qu’il était plutôt intéressant de faire le lien entre les personnages des volumes précédents et d’en savoir plus sur le passé sombre de Fermín. Malheureusement ça ne suffit pas, loin s’en faut, et ce troisième tome, qui fait plutôt office de respiration dans la série avant une suite déjà annoncée, est au fond très dispensable. Même si les dernières lignes du livre introduisent un quatrième tome qui sera l’occasion d’approfondir les origines de Daniel, ce sera certainement sans moi.
Ainsi, plutôt que ses opus qui sentent de trop loin la pression commerciale des éditeurs, je préfère garder de Zafon le souvenir de L’Ombre du Vent et de Marina. Et en matière d’auteurs espagnols, je vais retourner à un ancien amour et me plonger dans Le Cimetière des Bateaux sans nom d’Arturo Perez-Reverte.