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Rosson Crow : No man’s Land

Publié le 30 juin 2014 par Pantalaskas @chapeau_noir

Dans l'atelier américain de Rosson Crow, un signe révélateur interpelle : le sol de l'atelier  pourrait être assimilé à un tableau de Jackson Pollock. Ne pas en conclure trop vite que l'artiste trentenaire foule au pied l'Action Painting. Diplômée de Yale University, New Haven et de la Scholl of Visual Arts, New York , Rosson Crow  "fait partie de la génération des artistes montants de la jeune scène contemporaine aux États-Unis et en Europe".  Ses dix années de travail sont rassemblées dans sa plus importante exposition au Musée Régional d'Art Contemporain de Sérignan. Ce sol de l'atelier traduit, à la manière d'un sismogramme sauvage, la gestuelle débridée d'une peinture qui s'affranchit sans complexe des acquis culturels de l'histoire de l'art pour signifier que la peinture participe également de la performance, qu'elle offre un terrain de jeu pour élèves dissipés et désobéissants.

No man's Land

Dans le cas de Rosson Crow, ce terrain de jeu pourrait bien rappeler le terrain vague de notre enfance, celui qui ne semblait appartenir à personne, sorte de no man's land dans lequel notre imaginaire en liberté prenait le pas sur le réel. Devant les tableaux de cette jeune artiste, on croirait même entendre, au gré de la sensibilité personnelle de chacun, une musique Acid House ou un Free Jazz. Des toiles nous parviennent vigoureusement aux oreilles les sons électrisés d'une expression fiévreuse et désordonnée.

Rosson Crow MRAC Sérignan 2014

Rosson Crow MRAC Sérignan 2014

Cette façon de s'affranchir des codes, Rosson Crow  la corrobore le jour du  vernissage de l'exposition. Drapée dans une robe délibérément encombrante et voyante, elle transforme la présentation de ses tableaux en show ludique, usant de sa personne pour mettre en avant "in vivo" l'artiste et son œuvre.
Ce n'est pas par ignorance ou rejet de l'histoire de la peinture que l'artiste se livre à cet exercice de brouillage des codes. Ses repères dans l'histoire européenne sont significatifs de cette culture acquise notamment en ayant voyagé en France ces dernières années. Mais les enjeux artistiques passent d'abord par une mise en jeu énergique des références américaines ( "Salon de réception avec Bud Light" 2009, "Far from Heaven" 2009). De Tom Wesselman à l'histoire tourmentée du sud Américain, d' Elvis Presley au mobilier Empire, Rosson Crown nous entraine dans une sorte d'Hellzapopin revisité.

Rosson Crow : No man’s Land

"Psychic Shift in the Blue Room" Rosson Crow 2013. Acrylique et huile sur toile, 228,6 x 274,3 cm

Melting pot

Si les références artistiques habitent en permanence ses tableaux, en revanche la présence humaine fait défaut, comme si ce melting pot culturel opérait à la manière d'un constat de décès voire même de l'autopsie d'une société disparue. Cet espace de peinture, sans âme qui vive, n'a donc que faire de choisir entre figure et abstraction. Débarrassée de ce dilemme historique, l'artiste s'ébroue dans ce No man's land, saute à pied joint dans les flaques d'eau, se livre aux jeux endiablés d'une peinture qui déborde, qui tache, qui coule dans une attitude iconoclaste en toute impunité. Et si le mobilier d'Empire subit les assauts de cette frénésie acide et bruyante (" Psychic Shift in the Blue Room"  2013), il faut accepter l'idée que ces références historiques et culturelles constituent le matériau privilégié avec lequel Rosson Crow échafaude un projet artistique vivifiant.

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Photos: courtesy © Joshua White, courtesy
Galerie Nathalie Obadia, Paris/Bruxelles

Rosson Crow

Du 29 juin au 2 Novembre 2014
Musée Régional d'Art Contemporain
146, avenue de la plage
34 410 Sérignan

http://mrac.languedocroussillon.fr/3116-expositions-art-contemporain-du-moment.htm

Visite à l'invitation du M.R.A.C. de Sérignan


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