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Le crime d'un jeune marié !

Publié le 12 juillet 2014 par Dubruel

d'après LE CRIME AU PÈRE BONIFACE de Maupassant

Ce matin-là, le facteur Boniface Se mit en marche avec dans sa besace Le courrier de M. Chartreux, Le percepteur, marié depuis peu.

Arrivé à la perception, Boniface gravit le perron, Il s’aperçut que la porte et les volets Étaient encore fermés. Pourtant habituellement le percepteur se levait de bonne heure.

Avec une grande précaution, Le facteur fit le tour de la maison. En passant devant une fenêtre, il prit peur. Il entendait geindre à l’intérieur : D’abord des soupirs inquiétants Puis un bruit de lutte évident Et enfin de forts gémissements. Alors Boniface ne doutant pas Qu’un crime s’accomplissait là, S’élança à travers champs.

Quand il arriva à la gendarmerie, Il hurla au brigadier Sancarli : -« Venez vite ! …Des voleurs …Chez le percepteur. Sûrement, on l’assassine. Venez vite ! » Voyant le gendarme surpris, Boniface ajouta : -« J’ai entendu des cris ! » -« Comment t’a connaissance de ça ? » -« J’allais déposer son courrier Quand j’ai observé Qu’il n’était pas levé : Sa porte et les volets étaient fermés. J’ai entendu qu’on gémissait Comme si on l’eut étranglé. Alors, je m’en suis venu vous chercher. Il n’est que temps. »

-« Et tu n’as pas porté secours à ce moment ? » Le facteur répondit, effaré : -« J’étais pas en nombre suffisant. » -« Le temps de me vêtir et je te suis. » Peu après, tous deux sortaient de la gendarmerie Suivis par le gendarme Roman.

Arrivés à vingt pas de la demeure Du percepteur, Main sur le baudrier, les gendarmes, Prêts à utiliser leurs armes, Un instant s’arrêtèrent Puis prudemment avancèrent. Sur le chemin Et dans le jardin, Ils ne virent aucune trace Pouvant indiquer Que les malfaiteurs avaient quitté la place. Ensuite, ils constataient Que les issues étaient encore fermées.

Le brigadier a collé Son oreille contre un volet. Les deux autres attendaient. Soudain, se tournant vers le facteur, Sancarli lui enjoignit d’une voix forte : -« Glisse donc les plis sous la porte. Y a pas matière à avoir peur ! »

De retour sur le chemin, Le brigadier, l’œil brillant de joie, Dit au facteur d’un air narquois : -« Toi, Boniface, t’es un malin ! » -« De quoi ? J’ai entendu… J’vous jure… j’ai entendu. » La moustache retroussée, Les joues plissées, Sancarli fit un geste…évocateur : -« Ah ! Farceur, sacré farceur, Je l’ retiendrai l’ crime au père Boniface ! »

Le facteur fit une curieuse grimace : -« J’vous jure qu’ j’ai entendu. » -« Ah ! T’ as entendu ! Et ta femme, C’est-i’ comme ça qu’ tu l’assassines, hein ? » -« Ma femme ? Oh ! All’ gueule Quand j’y fiche des coups à c’ sac à vin. Mais all’ gueule ! …C’est-i’ que M. Chartreux battait la sienne ? » Alors le brigadier l’éclaira sur son constat.

Et Boniface, pensif, murmura : -« Non,…en c’ cas,…all’ n’ dit rin, la mienne… J’y crois pas…on aurait juré une martyre… » En regardant s’éloigner le pauvre képi, Les gendarmes se mirent à rire Et se racontèrent de grasses plaisanteries.


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