Alors que l’écho mystérieux de Wisteria Lodge (fantastique réussite sortie chez Prikosnovénie début 2011) résonne encore dans nos esprits, les Nantais, trio depuis peu, reviennent aujourd’hui avec une œuvre tout aussi lunaire et passionnante. Adrift aborde le thème de la dérive, de ses dangers et bienfaits à travers une réflexion philosophique (faut-il se perdre pour mieux se trouver ?). Charpenté autour de desseins romanesques, l’œuvre peut être présenté comme un conte musical comprenant dix chapitres. Conjonction de deux forces d’inspiration (D. Clavreul : chant, guitare & synthés et JC. Wintrebert : batterie & violoncelle), parfumée de romantisme, l’écriture poétique de Demian Clav peut renvoyer à un Bowie doté d’un accent gothique et à des Floyds qui se seraient laissés gagner par trop d’anxiété. Les crispations électriques n’apparaissent que rarement, laissant le champ libre à des orchestrations de cordes soyeuses et rêveuses, à une boite à musique qui obsède (et cette sensation d’observer le carrousel des souvenirs tourner devant nous sur « Edelweiss Flight »).
Entre ambiances oniriques, contemplatives et tensions rares mais nécessaires, Demian Clav scénarise le beau à l’intérieur d’un décorum symphonique précieux (« Slow Boat to now » et sa douceur mélancolique). Le chant, lui, fragile et émotionnel, occupe une place inédite dans l’œuvre des Nantais : il n’a jamais été aussi présent, déterminant dans cette danse au clair de lune. Etonnamment serein après l’écoute de ces dix titres, on repose le disque, heureux et remué tout en s’avouant à soi-même que sans musique, la vie ne serait pas grand-chose. Œuvre de l’imaginaire par excellence et miroitement de sentiments dont il ne faut pas avoir peur, Adrift ruisselle de la passion de ses auteurs.
(Obsküre/ Yänn Mondragon)
http://www.youtube.com/watch?v=PVmVvLwMA7Q&feature=c4-overview&list=UUXBUnux2LIUVQkGhpmhPmxA