Je viens de finir un court texte. Je n’ai jamais autant ri en écrivant, puis jamais je ne me suis autant écœuré. Mais littéralement écœuré. Au début, c’était un petit pamphlet, une charge drôle, j’ai tourné autour du personnage – qui a son modèle dans la réalité –, je l’ai cerné, c’était un peu politique et caricatural et vraiment je riais bien. Puis j’ai eu l’idée d’une bascule, d’une charnière avec un versant grotesque et un versant grossier (pas verbalement, mais au sens où les coutures sont à vue, où le travail a l’air de n’être pas fini) et quand ça a été fait, j’ai bondi en lui et je l’ai fait parler, j’en ai fait un personnage de théâtre – d’un théâtre impossible en France, puisqu’il n’y est séant que de parler pour ne rien dire ; c’était son âme qui s’était mise à m’intéresser (oui, je sais, on ne dit plus âme, les mots grecs font plus savants et techniques que les latins). J’ai voulu dire toute l’enflure de son ignominie, et lui faire dire combien il aimait à se mirer dedans, en somme j’ai voulu le sauver, pas moralement, mais disons, d’un point de vue métaphysique. Eh bien, c’est dégueulasse à faire, d’aller se foutre dans l’âme d’un intellectuel de cet ordre, d’un type à côté de qui un tueur en série fait figure de couillon égaré. Je comprends mieux pourquoi personne ne s’y colle. Surtout avec pour modèle un type encore vivant, connu. Sans compter qu’a priori c’est inexploitable scéniquement, et sans doute impubliable – bordel, je me sens plus posthume que jamais –, j’aurais mieux fait comme les copains dramaturges de dialoguer à chaîne des articles de Libé dans une espèce de feuilleton permanent intitulé « pas belle la guerre », ou comme les copains poètes ou romanciers de mystériser mon moije personnel sublimant la misère quotidienne de mon cul ou d’allitérer à la va comme je te chie la recette du confit de canard pommes sarladaises. Tout, oui, tout plutôt que de voir mon guignol chanter en une hymne pourrie la beauté érotique selon lui de la photo d’illustration de ce billet – qui lui aussi, décidément, me colle grave la gerbe ; et bel été à vous !
Je viens de finir un court texte. Je n’ai jamais autant ri en écrivant, puis jamais je ne me suis autant écœuré. Mais littéralement écœuré. Au début, c’était un petit pamphlet, une charge drôle, j’ai tourné autour du personnage – qui a son modèle dans la réalité –, je l’ai cerné, c’était un peu politique et caricatural et vraiment je riais bien. Puis j’ai eu l’idée d’une bascule, d’une charnière avec un versant grotesque et un versant grossier (pas verbalement, mais au sens où les coutures sont à vue, où le travail a l’air de n’être pas fini) et quand ça a été fait, j’ai bondi en lui et je l’ai fait parler, j’en ai fait un personnage de théâtre – d’un théâtre impossible en France, puisqu’il n’y est séant que de parler pour ne rien dire ; c’était son âme qui s’était mise à m’intéresser (oui, je sais, on ne dit plus âme, les mots grecs font plus savants et techniques que les latins). J’ai voulu dire toute l’enflure de son ignominie, et lui faire dire combien il aimait à se mirer dedans, en somme j’ai voulu le sauver, pas moralement, mais disons, d’un point de vue métaphysique. Eh bien, c’est dégueulasse à faire, d’aller se foutre dans l’âme d’un intellectuel de cet ordre, d’un type à côté de qui un tueur en série fait figure de couillon égaré. Je comprends mieux pourquoi personne ne s’y colle. Surtout avec pour modèle un type encore vivant, connu. Sans compter qu’a priori c’est inexploitable scéniquement, et sans doute impubliable – bordel, je me sens plus posthume que jamais –, j’aurais mieux fait comme les copains dramaturges de dialoguer à chaîne des articles de Libé dans une espèce de feuilleton permanent intitulé « pas belle la guerre », ou comme les copains poètes ou romanciers de mystériser mon moije personnel sublimant la misère quotidienne de mon cul ou d’allitérer à la va comme je te chie la recette du confit de canard pommes sarladaises. Tout, oui, tout plutôt que de voir mon guignol chanter en une hymne pourrie la beauté érotique selon lui de la photo d’illustration de ce billet – qui lui aussi, décidément, me colle grave la gerbe ; et bel été à vous !