Adieu Monsieur Keating !

La réactivité de Wikipédia dans toute son horreur. A peine est-il froid que sa fiche est déjà actualisée : Robin Williams n'est plus. Il se serait suicidé par asphyxie, fragilisé par une dépression liée à des addictions... Pour de plus amples informations, consultez la page évoquée ou feuillettez les journaux en lignes. Ils ne manqueront pas de vous donner, dès qu'ils en auront connaissance, tous les détails de l'événement. Ce n'est pas le sujet de ce billet. Inutile de s'attarder sur sa révérence à la Neil Perry. C'est du spectacle qu'il a offert aux visiteurs de salles obscures et aux familles devant leurs télévisions qu'il faut se souvenir.Un sourire.Que dis-je, un million, un milliard de sourires ! Je ne sais pas pour vous, mais quand je pense à Robin Williams, je le vois toujours avec un sourire aux lèvres, pas le sourire ravageur d'un beau-gosse, mais une expression pleine de sincérité et un petit quelque chose d'enfantin.Un regard.Les yeux de cet acteur se prêtaient aux rôles profonds. D'un bleu perçant, expressifs, ils vous adressaient les questionnements aussi directement qu'au rebelle Will Hunting ou au jeune Todd Anderson.Le fou aux dents qui transpirent.Vous avez sans doute ressenti cette impression vous aussi, à la fin du cercle des poètes disparus, que c'était à vous qu'il parlait lorsqu'il répétait avec insistance : "...Que le prodigieux spectacle continue et que tu peux y apporter ta rime... Quelle sera VOTRE rime ?"Un talent théâtral.L'acteur avait l'art des grands gestes, comme celui de la retenue. L'attitude était à chaque fois juste, jusque dans les plus extrêmes exagérations, les plus vives gesticulations. Mais sa grande force était dans les petits riens, les colères froides d'un psychologue que son client perce à jour en analysant un simple tableau.Will HuntingUn travesti hilarant et attendrissant.Les acteurs adorent porter la robe... Celle de Mrs Doubtfire, à la fois démodée et rembourrée, restera dans l'Histoire du cinéma, à côté de celle de Dustin Hoffman dans Tootsie ou de toutes celles de Hugo Weaving (Monsieur Smith de Matrix) dans Priscilla, folle du désert. Tour à tour on rit, on a peur (du moment où la supercherie sera découverte), on s'attendrit. Oui, c'est plein de bons sentiments, c'est le film familial par excellence, certains diront presque nian-nian, mais l'histoire tient sur deux épaules solides, celles de l'acteur "Qui fait des voix !" et porte une casquette sur le côté pour danser sur une table avec son fils.Mrs DoubtfireUne bête de radio.Tout le monde se souvient de son énergie débordante au micro dans Goooood morniinnng Vietnaaaaam ! L'une de ses premières prestations d'envergure, révélant au monde sa dimension de comédien comme ses talents vocaux.Good morning Vietnam.Un public orphelin.Chacun a ses souvenirs avec Robin Williams. Je le vois comme un oncle rigolo et bienveillant. Sans le savoir, il m'a encouragée à poursuivre ma vie en cherchant l'authenticité, il m'a divertie lorsqu'adolescente, je voyais tout en noir... Il a même contribué à me faire monter sur scène (une toute petite scène), pour voir si moi aussi, j'osais jouer de mes multiples voix, hors de ma chambre fermée à double tour. Il est des êtres touchés par la grâce, qui, juste en enfilant la peaux de quelques autres, savent parler à tous et susciter une sympathie quasi-générale. Robin Williams était de ceux-là.Sans aucun doute possible, le monde est un peu moins joli ce matin, sans lui.