Depuis quelques jours , l’aspect de nos villes a changé : la circulation est redevenue plus intense, la pollution de l’air plus nocive, les nuisances sonores plus présentes!
Bref, les vacances sont finies et la vie normale du Maroc a repris!
Je dois avouer que ces vacances ont été spéciales pour moi! J’en ai profité pour faire un plongeon dans mon passé. Je suis revenu dans une région que j’ai très bien connue il y a plus de trois décennies.
De cette espèce de pèlerinage, je ramène la très ferme conviction que le Maroc a changé, mais qu’il y a encore tellement de choses à changer.
Le Maroc est une comme une pièce de monnaie, avec deux faces intimement liées, gravées dans le même matériau solide, avec d’un côté un “avers” (communément appelé le côté “face”) qui porterait tout ce le Maroc a de beau, de grand, de formidable, de sérieux, et un coté “revers” (connu sous le vocable “pile”) où reste incrusté ce que nous trainons comme défauts, comme dysfonctionnements, comme sous-développement, n’ayons pas peur des mots!
Et cette pièce de monnaie, posée sur sa “tranche” (le bord) tourne autour d’elle même, entrainée par le mouvement de l’histoire, au gré du frottement de cannelures (stries sur la tranche) sur le sol national, offrant ainsi tantôt un visage brillant, lumineux, optimiste, de notre pays, tantôt une image obscure, floue et pessimiste de ce double Maroc.
Pour illustrer mon propos, je vais retenir quelques exemples qui m’ont interpellé ces derniers jours.
La route côtière entre Tétouan et Nador, cette route qui va jusqu’à SaIdia! Une véritable merveille qui permet de découvrir des sites incroyables! Un tracé impeccable, sûr, très bien balisé et signalé.
Soit! C’est le coté “face”!
Mais, tout au long de ce voyage, on voit des dizaines de personnes, souvent des enfants, guidant des pauvres ânes maléfiques chargés de bidons d’eau qu’ils sont obligés d’aller chercher parfois à plusieurs kilomètres!
Triste coté “pile”!
Autre exemple.
La cote entre Tétouan et Sebta est devenue depuis quelques années le rendez-vous estival de la classe moyenne nationale et de quelques familles fortunées qui ne cèdent pas aux sirènes de l’Espagne toute proche ou de la Turquie.
Coté “face” : le tourisme national bat son plein et les affaires marchent bien!
Coté “pile” : cet engouement ne dure que quelques semaines, ensuite la zone retrouve son marasme, sa contrebande, son chômage et tout ce qui s’en suit.
Autre exemple encore plus édifiant!
Grâce au Plan Vert du ministère de l’agriculture, des milliers d’arbres fruitiers couvrent cette région, longtemps oubliée et marginalisée!
Coté “face” : noyers, amandiers, oliviers, figuiers ont changé l’aspect et l’économie rurale.
Mais le coté “pile” ne tarde pas à se manifester : au détour de la première route secondaire, vous avez toutes les chances de tomber sur des champs de cannabis. A l’entrée d’un petit village, vous pouvez même admire une belle parcelle de la plante ”maudite” au pied même d’une mosquée!
Les exemples sont multiples et variés.
Coté “face” : tout au long de la route, des postes de surveillance sont érigés! Cela donne un sentiment de sécurité totale.
Coté “pile” : les tentatives d’immigration clandestine vers l’Espagne sont toujours aussi nombreuses, les trafics en tous genres n’ont pas cessé.
Parfois, le coté ”face” l’emporte : c’est la loi des statistiques.
Comme à Al Hoceima, qui en l’espace de quelques années à été complétement transformée, modernisée, mise au niveau des plus belles cités balnéaires méditerranéennes.
Il suffirait juste de savoir vendre le produit “Al Hoceima” pour faire de cette ville un pôle touristique qui écraserait toutes les stations grecques et espagnoles.
Les statistiques ont leur mot à dire encore une fois : à Nador, c’est le coté “pile” qui est prépondérant. Les autorités locales, confrontées à des problèmes de sécurité en relation avec l’immigration clandestine, ont totalement négligée la gestion quotidienne de la ville, l’abandonnant aux vendeurs ambulants et à l’anarchie la plus débridée en matière de propreté et de salubrité.
Les grands projets touristiques autour de Mar Chica pourraient s’avérer de cuisants échecs, car le tourisme ne peut coexister avec la saleté et l’insécurité.
Je sais que ce genre de réflexions peut être fait à propos de toutes les régions du pays : cela prouve à mon sens que le pays vit et qu’il se débat pour avancer.
C’est ce qui compte : et le prochain nihilo qui prétendra me faire croire que le Maroc n’a pas bougé sentira le vent de ma colère! Tout comme le prochain zélateur qui tentera de me vendre l’image d’un Maroc parfait.