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L'institutrice

Par Jcfvc
L'institutrice

Je lis, sur le blog d'Alix Gaussel, que l'héroïne du film l'institutrice serait une femme vampire.

Fournier Jean-claudeIl y a 27 secondesRépondre

Pas . d'accord. "Vampire" est un bien grand mot pour qualifier cette institutrice. C'est surtout une sorte de Madame Dalloway qui vit en Israël, un pays en guerre. Elle est insatisfaite sexuellement et elle est frustrée émotionnellement et professionnellement , bien qu'apparemment elle mène une vie tranquille mais où rien ne se passe vraiment. Elle se plaint de ne plus voir ses enfants. Le fils est à l'armée et sa fille vit à la maison mais elle semble ne pas trop savoir ce qu'il se passe au foyer et doit demander à son mari si la fille en question couche chez eux et si elle emmène son petit copain à la maison. Elle se réfugie dans la poésie et, dans son délire, croit devoir (et pouvoir) sauver un enfant qu'elle considère comme un Mozart assassiné :
- par son père qui veut en faire un homme d'affaire comme lui,
- et par la société qui ne sait pas voir ses potentialités.
L'enlèvement qu'elle commet n'est pas un "crime" au sens propre du mot, c'est un acte fou et irréfléchi d'une femme qui souffre, qui reporte sur cet enfant, qui est son élève, l'amour qu'elle ne peut plus donner à ses proches.
Je pense que son cas ne relève pas d'un jugement moral et qu'il ne faut pas prendre à la lettre la fin du film, qui n'est qu'une métaphore de la condition humaine, et particulièrement de la femme, dans un Israël où la religion et le nationalisme règlent la vie de tous les jours, bien que le milieu social des personnages semble relativement libéré. Mais que penser, par exemple, de la chanson célébrant les héros mythiques d'Israël, que l'on fait chanter à des enfants de maternelle ?
L'Israël qui nous est dépeint dans ce film est bel et bien un pays en guerre, malgré le calme relatif qui semble régner dans les quartiers très occidentalisés et modernes où vivent les personnages, oùl'on ne croise aucun Palestinien, ni juif en kipa d'ailleurs. Voir par exemple, la manière dont les jeunes soldats en uniforme qui font leur service avec le fils, se défoulent lors de la soirée organisée à la maison. Voir également les slogans chauvins et même racistes des supporters du club de foot de Tel Aviv à l'encontre de ceux d'une équipe rivale, scandés par Yoav (l'enfant) et son camarade dont le père est joueur professionnel. Le film s'ouvre sur un scène où le mari regarde à la télé une émission de divertisssement où l'on peut ironiser sur le fait qu'Hitler portait des shorts et que, si cela avait été su, il n'aurait pas été élu et on n'aurait évité la seconde guerre mondiale. Dans ce pays moderne, on s'éclate en boite dans un quartier "branché. Mais la séquence de discothèque montre une héroïne qui finit certes par imiter les autres danseurs, mais qui a du mal à se libérer, qui est "coincée de prime abord (comme lors de la boum à la maison). Dans ce pays moderne, on va à la plage, mais l'institutrice, visiblement frustrée d'être Séfarade, contrairement à son mari, demande au gosse s'il peut reconnaître, parmi les baigneurs en maillots de bain (et donc dépouillés des marques vestimentaires qui pourraient trahir leur origine, s'il est capable de dire qui est ashkénaze ou séfarade. L'Israël qui nous est présenté est bel et bien un pays en guerre, dans lesquels les gens - y compris ceux appartenant à la classe moyenne et dont la vie peut sembler confortable et préservée du conflit par des mesures de sécurité draconiennes - peuvent se sentir enfermés et désirer fuir un monde aseptisé mais menacé. Cet Israël-là ressemble terriblement à nos sociétés occidentales laïques, mais cela reste une société très hiérarchisée où l'on apprend très tôt qu'être ashkénaze ouvre toutes les portes alors que les séfarades doivent batailler pour prendre l'ascenseur social. Sans même parler des falachas, comme la nounou, ces noirs juifs dont parle la Torah, qu'Israël a fait venir d'Ethiopie et dont un film célèbre , sorti il y a quelques années, a raconté l'histoire récente. L'institutrice ne veut-elle pas fuir ce pays qui l'étouffe, en dépit du cocon "middle class" dans lequel elle évolue, qui semble douillet en apparence. Dans un geste fou (et métaphorique je le répète, à ne pas prendre à la lettre), elle décide d'emmener ailleurs cet enfant, qu'elle considère comme un génie méconnu et dont elle pense que, comme elle, il ne pourra s'épanouir dans sa classe sociale et avec ce père très matérialiste et qui méprise tous ceux qui gagnent peu d'argent, un père dont la femme (la mère de l'enfant) a elle aussi fui l'époux et le pays pour aller vivre en Amérique une vie de bohème. Cela n'est pas dit explicitement, mais Nira n'a -t-elle pas pour projet de rendre Yoav à sa mère ?


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