"Le vent qui tournoie vient encercler les chevilles d’Angie qui se surprend de cette onde au ras du sol. Le vent ne s’attarde pas aux pieds des gens, d’habitude. Sauf celui, bas et puissant, que produit le train qui passe. Comme un croc-en-jambe. Baissant les yeux, elle examine ses tibias, ses genoux cagneux. Les enfants qu’elle connaît se contentent d’être maigres, sinon ils sont joufflus, grassouillets, rebondis. A neuf ans, Angie est aussi noueuse qu’une vieille. Elle ressemble aux pins qui poussent en haut des montagnes. Ses phalanges ont une forme compliquée, ses coudes saillent au milieu de ses bras grêles, deux perles noires montées sur des fils tendus. Elle craint le jour où elle aura des seins, convaincue qu’ils surgiront non pas comme les jolies pommes que paradent les filles du junior high, mais bien comme deux bosses anguleuses, deux poings fâchés tambourinant à travers sa poitrine."
Catherine LEROUX, Le mur mitoyen, Alto, 2013
Première page de ce roman que je tiens enfin entre les mains…
Un petit rendez-vous tout simple avec Mina des Bavardages et futilités qui revient Sur la pointe des mots et Le petit carré jaune qui lit Yparkho.
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