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des héritiers...surpris !

Publié le 29 septembre 2014 par Dubruel

d'après LA CONFESSION (1884 b) de Maupassant

Tout Véziers-le-Réthel avait assisté

À l’enterrement de M. Radet.

C’était un honnête homme, M. Radet.

Il laissait un fils, conseiller général

Et une fille mariée

À un notaire, M. de Bonal

Qui tenait le haut du pavé dans Véziers.

Sitôt la cérémonie terminée,

Les enfants du défunt sont rentrés tristement.

M. Bonal ouvrit le testament

Et lut : ’’Mes enfants,

Mes chers enfants,

Je dois vous confesser un crime

Dont le remords a déchiré ma vie.

Oui, j’ai commis un crime,

Un crime infâmant.

J’avais alors vingt-six ans

Et je débutais au Barreau de Paris.

Je pris une maîtresse.

( Que de gens s’indignent à ce mot ‘maîtresse’ ! )

Pendant un an, j’ai vécu avec cette fille

Assez heureux et tranquille.

Mais au fond j’étais bien décidé

À la quitter si je trouvais

La femme qui me plairait

Suffisamment pour l’épouser.

Mais un jour, voilà

Que ma maîtresse m’annonça

Qu’elle attendait un enfant.

J’eus l’esprit si bouleversé

Par cette nouvelle,

Qu’un désir confus mais criminel

Rôda au fond de ma pensée.

Le bébé naquit

Mais un mois après… j’ai fui

J’en avais assez de l’entendre crier.

Il criait quand on le changeait,

Quand on le lavait, quand on le touchait,

Quand on le couchait, quand on le levait…

C’est alors que, chez des amis, j’ai rencontré

Celle qui allait devenir votre mère.

Mais devant moi, un piège s’ouvrait :

Malgré mon fils, devais-je l’épouser

Ou bien lui dire la vérité ?

Que faire ?

Il fallait que ce bébé

Ne compte plus dans ma vie.

Or, peu après, la mère de mon fils décédait.

J’ai dû m’occuper seul du bébé.

En moi, une terrible colère a grandi,

Une colère qui touchait à la folie…

Un soir de janvier,

Alors que le bébé dormait,

J’ai ouvert la fenêtre. L’air glacé

Entra dans sa chambre, tel un assassin.

Je ne pensais

Plus à rien.

Tout à coup,

J’entendis une petite toux…

Le petit s’éveilla au matin

La gorge embarrassée.

Toute la journée,

Il resta fébrile et assoupi.

Je fis venir le médecin…

Une fluxion de poitrine eut raison de lui.

Il mourut six jours après.’’

Cette lecture étant achevée,

Le notaire dit :

-« Il faut détruire ce manuscrit. »

Il jeta le testament dans la cheminée.

Les héritiers regardèrent les feuillets

Se consumer jusqu’à la fin

Comme s’ils eussent craint

Que ce secret puisse être lu

Par un éventuel inconnu.


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