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"Voici cinq défauts subtils que nous commettons, soit en nos distractions, soit en nos recueillements :Le premier : nous contestons et combattons contre nos pensées superflues, nos distractions et nos tentations, et contre leurs objets, comme contre quelque chose de réel. Et par ainsi elles s'impriment bien souvent plus vivement dans notre esprit, et nous inquiètent davantage....Anéantissons toutes choses, et particulièrement nous-mêmes, dans cet abîme infini d'être, de lumière et de vie ; et ce même abîme qui anéantira nos personnes et tout ce qui est créé, dissipera et perdra soudain toutes nos distractions et tentations...Le second est que lorsque nous nous voyons distraits, pour nous recueillir nous nous introvertissons. Mais premièrement l'introversion suppose l'extraversion, alors que nous devons être continuellement unis pour le total engloutissement de nous et de toutes choses dans notre grand Tout infini, le seul être existant, de sorte qu'aucune chose créée ne nous puisse distraire et désunir de lui. Deuxièmement, nous introvertissant, nous nous enfuyons craintivement des choses, lesquelles nous devrions généreusement faire fuir et évanouir par la vue vivre de Dieu tout présent et qui seul est vérité. Troisièmement, plus nous nous enfuyons par peur d'elles, comme de quelque chose de réel, et plus leurs images s'impriment dans nos esprits et nous remplissent de distractions et de tentations. Quatrièmement, c'est toujours à refaire, car en nous enfuyant ainsi des choses, dès que nous devons recommencer une oeuvre extérieure, nous sommes derechef distraits et abattus en cette oeuvre. Cinquièmement, en nous introvertissant nous nous recherchons imperceptiblement nous-mêmes et aspirons à quelque consolation sensible, comme il appert parce que nous croyons que nous ne sommes pas bien introvertis, et nous ne nous contentons pas tant que nous n'avons quelque goût et expérience sensible pour nous assurer que nous sommes unis.Pour remède... quand nous sommes distraits, soudain relançons-nous en lui, par une foi vivre, mais simple et nue, par un nu et pur amour... comme si nous n'étions pas, et par la vue vive de Dieu comme de l'être infini et seul existant."Suite au prochain numéro...Simon de Bourg-en-Bresse, Les Saintes élévations de l'âme à Dieu par tous les degrés de l'oraison, 1657, chap. 24