Magazine Culture

Le meilleur des Mondes de Leibniz

Publié le 23 mai 2008 par Jcgbb

C’est presque de l’ordre de l’insoutenable : montrer que ce qui arrive ne pouvait pas être meilleur. Ni différent, ni meilleur. C’était le seul possible, et cela va continuer. Tout ce qui arrive est la manifestation du “meilleur des mondes possibles”. C’est ce que l’on appelle l’optimisme.

C’est pourtant radicaliser une pensée davantage réaliste que béate, beaucoup plus soucieuse de la complexité du réel que nous ne le sommes à l’accoutumée. Car, premièrement, même si nous avons souvent la faiblesse de penser que nous aurions pu agir autrement, était-ce vraiment possible ?

Naturellement, après-coup, on aurait souhaité le faire. Mais possible ? Lorsqu’on croit au libre-arbitre, on a envie de répondre « oui ». Oui, d’autres actions, d’autres paroles, d’autres réactions étaient possibles. Certes. Intellectuellement, tout est possible. Dans le domaine des choses humaines, prise chacune séparement,rien n’est impossible, tout est pensable. Il y a des milliers de gestes qu’on aurait pu faire à la place. Mais combien de gestes étaient réalistes ? C’est-à-dire compatibles avec le reste de ce qui nous arrivait aujourd’hui ? Sous le coup de la colère ? Dans cette circonstance précise dans laquelle je me trouvais ? Par rapport à ce qui m’était arrivé la veille ? Sans parler de l’année dernière et de l’année passée…

Pour Leibniz, nous n’avons pas suffisamment conscience des microévénements qui nous affectent et nous déterminent. D’innombrables autres réactions sont en soi toujours possibles, mais pas dans la situation dans laquelle chacun à chaque instant se trouve. Mais, était-ce la meilleure ?

Il faut se garder ici de faire un contresens et de confondre d’une part le bien et le meilleur, d’autre part, l’événement et la totalité du monde. Il ne faut pas comprendre par cette terrible phrase que chaque épisode est bon, ni même qu’il était le meilleur de notre point de vue. Non, seul l’ensemble, la totalité du réel, est le meilleur possible, c’est-à-dire peut-être seulement un peu moins mauvais qu’une autre totalité. Mais ce n’est pas chaque décision prise à part qui est bonne ou meilleure. En elle-même, c’est peut-être la pire de toutes.

Rien n’empêche en effet que pour parvenir à un moindre mal il faille en passer parfois par pire. Et que ce pire puisse être le moyen du meilleur n’enlève rien au fait qu’il soit odieux. C’est simplement une condition nécessaire et odieuse. Tout cela n’est pas très gai !

Ce qui est gai, c’est que c’est grâce à notre insatisfaction que nous pensons, que nous nous révoltons, que nous nous mettons à agir. Que ferions-nous, sinon ?

Le Monde de la philosophie : Leibniz

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Jcgbb 2111 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine