Ça se passe début 2013, un arrêté municipal, signé du maire de Ris-Orangis (91), met en demeure les habitants du bidonville en bordure de la Nationale 7 de quitter les lieux. 75 « considérant » décrivent la vie dans le bidonville, les conditions d’hygiène, signalent les rassemblements, mettent les constructions à l’épreuve des normes d’un bureau de contrôle… et concluent à l’expulsion, suivie immédiatement de la destruction.
Dans cet ouvrage, architectes, philosophes, écrivains, photographes, metteurs en scène, poètes, urbanistes, politologues, enseignants, journalistes examinent cet arrêté et tentent d’apporter un éclairage sur l’incapacité de notre société à accueillir les délaissés sociaux à qui ne restent que les « délaissés urbains », zones de relégation négligées par les villes. Les dangers décrits dans cet arrêté sont des dangers qui concernent tous les Rissois (vitesse des automobiles, branchements électriques, proximité de réservoirs d’essence, etc.). Le PEROU, Pôle d’exploration des ressources urbaines, avait tenté d’implanter au milieu de ce bidonville une « ambassade », où les enfants pouvaient suivre des cours, où des spectacles se sont déroulés, où une vie sociale s’est organisée. Mais cela n’a pas suffi au maire dont l’arrêté parle de conditions « indignes » et « dangereuses ». Il le répète tant qu’à la fin, nous comprenons très bien qu’il qualifie ainsi, non pas les conditions qui s’imposent aux habitants de ce « délaissé », mais les habitants eux-mêmes, et même cet « enfant au comportement dangereux ». J’ai regretté, lisant ce livre, que la parole n’y soit jamais donnée à ces habitants, mais j’en sais la difficulté. Et que dire d’une société incapable d’accueillir, de penser qu’un campement peut devenir un village, que « la vie n’est donnée en propriété à personne, en usage à tous « (Lucrèce) ?