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On y était : Levitation Festival France

Publié le 10 octobre 2014 par Hartzine

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Photos © Cyril  » Jerry Garcia » Bagnaud

Levitation Festival France, Angers, 19 et 20 septembre 2014

L’été des festivals  se concluait cette année pour la team Hartzine, comme l’an dernier d’ailleurs – outre par le Heart of Glass, Heart of Gold, où certains d’entre nous étaient réquisitionnés pour honorer l’auditoire d’un DJ-set désormais couru du tout Paris ( faut bien se vendre un peu…) – par un tour à Austin – prononcez Angers - en Anjou (Far Ouest) pour le Levitation France. Le petit frère français de l’Austin Psych Fest nous invitait lors de cette deuxième édition à goûter à diverses formes de psychédélisme, genre revenu particulièrement  dans le mouv’ ces dernières années, du plus électronique au plus traditionnel, toutes guitares fuzz dehors.

Parce qu’il faut bien bosser dans un bureau pour gagner sa croûte et le droit de se rendre au festival manger un douteux jambalaya, aussi onéreux qu’un buvard de LSD, et lui aussi aux effets psychédéliques pour l’estomac, impossible d’être sur site dès 17h30 pour le concert inaugural des locaux d’Eagles Gift. A vrai dire, nous n’étions pas les seuls à manquer ça et nous nous en sommes remis sans trop de difficultés, le punch d’accueil bien dosé nous permettant de sécher nos larmes et de surmonter ce raté, bien accompagnés par le DJ-set d’Al Lover, parfaite entame pour nous aider à changer de monde pour le week-end.

Le voyage commença par une escale au pays d’Aqua Nebula Oscillator, une bien étrange contrée. Malgré une mise en scène plutôt lumineuse et pailletée, leur son est dark et fait ressortir le côté vaudou qui est en nous. Nous avons bel et bien en face de nous ce qui se fait de mieux dans l’Hexagone en la matière, même si cela arrive un peu tôt dans la soirée. Dommage pour eux, d’autant que la suite immédiate sera assez douteuse. Des Américains dénommés Sprindrift qui doivent plus à John Wayne qu’à Ennio Morricone. On s’ennuie ferme devant cette country spaghetti, certes bien exécutée, tout comme le public par la même occasion qui n’a d’autre solution que de trouver le salut dans un dernier punch.

Tant mieux pour Orval Carlos Sibelius, qui fait rapidement le plein. Pas besoin d’en rajouter sur la pop délicate et mutante d’Axel Monneau, dont l’immense Super Forma a fait l’objet ici d’une belle chronique il y a déjà plus d’un an (lire). Le groupe l’a d’ailleurs usé jusqu’à l’os, même si les morceaux restent difficiles à mettre en relief en live : on attend maintenant la suite.

Christian Bland And The Revelators ont déjà commencé à arroser la scène extérieure de leur pluie de Rickenbacker reverbérée quand nous sortons de la salle du Chabada, dans un décor industriel adapté à l’expérience. C’est pas trop mal, fort, bien psyché, mais les compositions sont somme toute assez moyennes par comparaison à celles des Black Angels, résidence principale du Christian en question. Que penser ensuite de Kadavar ? Eh bien pas grand chose, en dépit du buzz ronflant entourant depuis peu ces grands Allemands chevelus, pastiches de Led Zeppelin, ou plutôt de Black Sabbath. C’est assez distrayant sur scène, mais hors-sujet ce soir là. A revoir, certainement au Hellfest…

Joël Gion et ses acolytes (c’est That 70′s Show !), eux, collaient à l’affiche du jour sur le papier. Des looks bien clichés : pattes d’eph sur grand maigre, barbes sur cuir pour d’autres… et Joël, me direz-vous ? Qu’attendre du Bez psyché-rock des 90′s ? Rien… eh bien c’est exactement ça. C’est très moyen d’un bout à l’autre, poseur, approximatif et pas original pour un sou.

Heureusement… cocorico ! Le niveau est relevé après cela par Zombie Zombie, en nouvelle formule deux batteries. Le groupe a ainsi pris beaucoup d’épaisseur, c’est moins DIY, à tel point que nous nous surprenons à être totalement scotchés par la prestation. On n’est pas très loin de l’impression laissée par Beak lors de l’édition précédente.

Nous attendions de pied ferme nos petits favoris de Woods après leur excellent With Light And With Love sorti il y a quelques mois (lire la chronique). Ces types sont doués et passionnés, et produisent de vrais petits bijoux en dépit du peu de moyens à leur disposition. Le concert du soir en sera la preuve, tant le groupe (en plus de cela réduit à un trio, le quatrième larron étant a priori souffrant) éblouit le connaisseur par ses arrangements, malgré la frustration de ne pouvoir rendre totalement justice aux compositions, faute de claviers notamment.

La performance de Ben Frost, quant à elle, ne restera pas dans les annales. C’est hyper prétentieux et sans grand intérêt en live, contrairement à ses enregistrements. Le public ne s’y est d’ailleurs pas vraiment trompé en désertant la salle assez vite pour mieux remplir le bar.

Les branleurs (désolé, il n’y a pas d’autre mot) de La Femme avaient pour mission de garnir les rangs et accessoirement de clôturer cette soirée. Si question public, l’objectif fut atteint, pour autant nous ne sommes plus totalement convaincus par ces gars du gang. Passée la surprise de son apparition sur la scène hexagonale,  le groupe a perdu en fraîcheur et sa surexposition commence à lasser. Impossible de rentrer dedans ce soir-là, peut être du fait de l’heure tardive et de l’effet Ben Frost.

Au final, vous l’aurez compris, le bilan de cette première soirée fut pour nous assez mitigé. Le samedi soir devait dès lors redresser la barre.

La soirée commence, une fois n’est pas coutume, en fin d’après midi, et cette fois ci de façon rock´n roll avec Pow. Le trio de San Francisco, protégé du Thee Oh Sees John Dwyer, nous livre un set ultra vitaminé digne d’un bon vieux garage band. On acquiesce évidemment.

Ça sera moins le cas quelques minutes plus tard devant l’afro-psyché de High Wolf. Le type est seul avec sa guitare et ses machines, assez statique, et c’est à vrai dire pas notre came. Aussi, pas la peine de vous faire un dessin sur la réponse que nous apportons dans une telle situation : le bar pour un punch !

Autre moment fort attendu par notre équipe, la prestation d’Amen Dunes. Nous avions été franchement touché par son bien nommé Love (lire l’interview) en mai dernier. La magie opère également sur scène. A l’instar de Woods la veille, on est ici dans la simplicité, voire le dénuement. Damon McMahon, pas du tout looké  (ça change), paraît harrassé, mais nous gratifie malgré tout d’un concert pur et sensible. Le public n’est pas venu pour lui, c’est certain, mais peu importe : nous, on en repart plus que satisfaits. Pour la peine, on s’offrira même le vinyle et une petite séance de discussion fort courtoise avec le garçon… On est comme ça chez Hartzine, quand on aime, on ne compte pas. Les Bordelais de JC Satàn sont certes énergiques et jouent fort, mais bon, pas évident d’apprécier après avoir été attendri par Amen Dunes… C’est l’effet « abattoir » (ancien usage des lieux, cela ne s’invente pas !), un bon vieux coup derrière la nuque, avant une lente agonie. Nous abandonnerons en route, attirés par les étoiles.

Asteroid #4 joue dehors, et c’est plutôt très bien. Le son est carré, les morceaux sont bons. Le programme parle de dream pop et d’américana en passant par le shoegaze. Que demande le peuple ! Au final, pas grand chose à envier à la bande d’Anton Newcombe (grand absent du week-end), si ce ne sont les frasques. Mas bon, mieux vaut laisser ça à super Joël, d’ailleurs toujours dans les parages, errant à la recherche d’on-ne-sait-quoi, pas encore redescendu de la veille. Il a peut-être été engagé pour le décor, avec ses sbires tout droit sortis des 70′s.

Une des claques de la soirée nous a été donné par Holy Wave. Pourtant pas forcément extraordinaire sur disque, ce groupe fait semble-t-il partie de ceux qui prennent toute leur dimension sur scène. On se dit d’abord qu’on va avoir droit à un énième groupe de geeks attardés envoyant la sauce distordue sans nuance aucune. Eh bien pas du tout. C’est vivant, mélodique, cohérent, archi maîtrisé et parfaitement mis en son et en lumière (expérimentations lumineuses tous azimuts !). Ces jeunes gens, pas franchement modernes pour autant, mais avant tout fins musiciens, ont réussi à nous emmener loin.

White Hills, qui suit ensuite, nous ramènera hélas assez vite sur terre, avec son glam space rock cocaïné à combinaison en latex… Ramenez-nous Machine, c’est un groupe pour lui ! C’est un genre, comme on dit… Soit on aime ou soit on n’aime pas, sans pour autant détester (vous l’aurez compris, nous sommes de ceux-là), mais il faut tout de même leur accorder un professionnalisme assez évident, notamment dans la qualité sonore, peaufinée par de nombreuses heures de vol.

Le set de Moon Duo nous aura plus largement convaincu, mais plutôt que d’accumuler des adjectifs déjà trop utilisés dans cette chronique (vitaminé, hypnotique, puissant, etc.), nous préférons nous étendre sur la révélation du festival qui a suivi : les Américains de Quilt.

Trois garçons, une fille… des dizaines de possibilités, d’autant que la demoiselle dégage non pas un charisme (ce groupe est tout sauf charismatique) mais une certaine grâce. Constat rapide : leurs chansons et arrangements psyché soft sont au-dessus du lot. Nous ne sommes ici pas très loin du classicisme pop et de l’élégance discrète de Real Estate, ou l’art de faire du beau avec peu de choses. C’est sans prétention, ni posture, mais pour autant on tombe sous le charme immédiatement. Quelques jours plus tard, nous nous apercevrons que nous avions reçu il y a quelques semaines leur inaugural Held In Splendor dans la boîte mail de la rédaction, sans que nous ayons eu le temps d’y prêter une particulière attention. Ce lamentable manquement est aujourd’hui réparé. Verdict : nous n’avions pas rêvé, l’écoute du disque produit le même effet. Il n’a d’ailleurs pas « quilté » notre platine depuis.

Trève de poésie et de chichi… C’était après cela au tour de The Soft Moon de rentrer dans l’arène pour un show sans concession, très dense,sombre et pointu. La crème actuelle du post-punk, soit un notable grand écart avec Quilt. Le passage de l’un à l’autre aura d’ailleurs été un peu difficile pour nous autres, pour être tout à fait honnêtes. Si la classe de ce groupe reste intacte, nous garderons pourtant plus en mémoire leur prestation à La Route du Rock 2012. L’effet de surprise, certainement.

Les Allah Las, eux, ne font pas du post-punk… Ils font de la surf pop vintage tendance garage depuis leur premier album sorti fin 2012. Fin 2014, ils nous sortent le même. Gageons que dans dix ans, ils n’auront pas évolué d’un pouce. Et après tout, pourquoi pas. Leur concert est des plus sympathiques, tout comme leur musique qui donne envie de filer à la plage, les planches sur le toit du pick-up de papa. L’attraction people du week-end était la venue du fils de Dieu (Jésus ? Non, Sean, fils de John) avec son projet The Goastt, monté avec sa mannequin de copine qui tient la basse. Pas vraiment mémorable (exception faite évidemment de la bassiste – la salle étant étonnement plus remplie de son côté de la scène…) : des compositions assez light, un groupe de mercenaires qui ne paraît pas s’éclater des masses, mais un Sean Lennon que l’on découvre très bon gratteux. A sa place, on aurait tout de même choisi un autre boulot parce que l’héritage est lourd, trop lourd, mais bon.

Le festival devait se clôturer par une reformation d’un groupe mythique… les Anglais de Loop. Un groupe de la fin des 80′s qu’on aura bien « loopé » pendant notre jeunesse, mais aussi en cette fin de soirée… Désolé, mais les deux premiers morceaux trop peu accrocheurs n’auront pas su nous retenir.

Voilà voilà, comme toujours en festival, des choses qu’on aime et d’autres un peu moins, mais on souhaite une longue vie à cet événement à taille humaine plutôt atypique qui a tout pour s’inscrire dans la durée comme un incontournable du genre.


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