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Mommy

Par Adabsurdum

MommyMommy  Mommy
de Xavier Dolan

 Ce film fera date. Grâce à lui, la psychiatrie néo-conservatrice va pouvoir sortir du ghetto où la confinaient les larmoyants détenteurs de l'idéologie compassionnelle et permissive qui domine le monde médical depuis l'avènement de l'accouchement sans douleur.
L'ingrat et courageux travail de sape opéré en secret par les idéalistes réactionnaires du SDEC - Syndicat de Défense de l'Electrochoc et de la Camisole – s'avère enfin payant. Ce film éblouissant de clarté pédagogique, qui révèle avec brio le désastre économique, moral et humain des méthodes douces, vient à point nommé pour soutenir les réformes en cours dans les pays civilisés, ceux qui ont le courage de reconnaître que l'homme préfère l'ordre à la liberté.

 L'amour ne sert à rien.
Tout est dit, dès le début, à travers cette réplique qui résume sans détour le propos à l'attention des mal-comprenants dénués d'humour, comme on en trouve beaucoup dans les facs de gauche ou à la terrasse du Café de Flore, bien cachés derrière les pages déployées du Canard Enchaîné avec la lâcheté inhérente aux pacifistes, aux cyniques et autres anarchistes inavoués.
L'amour ne sert à rien, affirme la matrone en chef de la fourrière pour ados turbulents à laquelle Steve a voulu mettre le feu. C'est un véritable soulagement de voir une telle franchise, si rare au cinéma, illuminer son regard de cerbère bouffi malgré la grimace éloquente qui donne à son visage ingrat un air de cervelas périmé. Au moins, se dit-on, elle sait de quoi elle parle.
Puis, elle rend le pyromane à sa mère en ricanant de son double menton gélifié car elle connaît la fin de l'histoire.

Steve, adolescent débile et agressif (double pléonasme) souffre de TDAH – Trouble de Déficit de l'Attention avec Hyperactivité – c'est à dire qu'il est à jamais perdu pour la société sauf à utiliser ses trépignements pour faire de l'électricité comme le proposent certaines discothèques aux épileptiques fans de techno.

Le jeune réalisateur se livre alors à une brillante démonstration par l'absurde des illusions doucereuses dans lesquelles nous ont entraînés les thérapeutes embrumés de 68 avec des concepts irréalistes tels que l'empathie, l'affection, la thérapie émotionnelle, ou, cerise sur le gâteau, l'amour maternel.
Même ce déconstructiviste patenté de Laborit l'a reconnu : l'amour n'est que l'entretien d'une relation gratifiante. Et franchement, il n'y a rien de gratifiant à côtoyer chaque jour le fruit détraqué de ses entrailles, qui ne pouvaient être qu'impures pour fabriquer une telle catastrophe.

L'idée géniale de Xavier Dolan, est de nous faire partager le nécessaire chemin de croix de la mère vers la raison avec humour, cocasserie et une maîtrise du burlesque qui n'est pas sans rappeler les meilleurs pages de Kafka.
Ainsi le personnage de la voisine est caractéristique de l'ironie un brin sarcastique dont il fait preuve : Steve ne sait pas écouter, elle ne sait pas parler, ils sont fait pour s'entendre. Leur relation ne sera cependant d'aucun secours.

Tout est dit, une deuxième fois.
Toute la féminité du monde ne saurait venir à bout de la possessivité agressive de ce monstre d'égoïsme. Bien au contraire, elle ne fait que l'exacerber. Ce qu'il faut c'est une poigne virile, ferme, sévère et juste. Le réalisateur nous fait comprendre avec une grande délicatesse à quel point l'absence du père et le rejet implicite de toute présence masculine, aussi bien par Steve que les femmes qui l'entourent, sont à la base de la dérive de l'adolescent, tant il est vrai que seul un modèle de force, de stabilité et de solidité, qualités inhérentes aux mâles, est capable de faire de l'enfant égoïste un homme responsable, respectable et utile. Ah ! Si seulement on avait plus écouté Abraham que Dolto !

Certes, l'accent québécois, particulièrement dans la version prolétarienne quasi incompréhensible de la mère, et les jurons surannés des protagonistes, peuvent passer pour une caricature excessive d'une société qui s'abandonne à la facilité, mais une fois ce désagrément accepté, il reste la remarquable narration d'une débâcle annoncée qui retentit comme un cri d'alarme.

N'encombrez pas les cinglés de votre amour, ils ont suffisamment de problèmes comme ça sans devoir en plus porter le poids de vos projections parentales doublé de celui de vos illusions : ils ne guériront pas et vous y laisserez votre santé.
Si vous aimez vos enfants, confiez-les à des éducateurs professionnels, qui mieux que vous, sauront les entourer de la fermeté nécessaire pour en faire des citoyens utiles, responsables et obéissants, sans les embarrasser d'une tendresse parasite qui les poussent à se croire uniques alors qu'ils ne sont que spéciaux.

A noter le choix judicieux de placer l'action dans un milieu social en pleine déliquescence, la classe moyenne inférieure et son oisiveté pudiquement nommée chômage. La permissivité qui la caractérise est en effet un facteur aggravant sinon déclencheur de cette maladie. Jamais un fils de bonne famille n'aurait ainsi pu nuire à la société pour une raison très simple : on l'aurait caché.

Ce jeune réalisateur a du talent, trop parfois. On pourrait croire un instant qu'il prend parti pour la prise en charge douce et aimante de l'adolescent tant il filme avec justesse la tendresse et le lien fusionnel qui unissent la mère et le fils, tant il dépeint avec subtilité la codépendance bénéfique et ambiguë qui s'installe entre Steve et la voisine. Il s'en faut de peu qu'on n'espère un happy end, ce qui serait un comble. Heureusement, quelque scènes de violence secouent le sentimentalisme menaçant avant qu'on y succombe et la fin tragique vient nous rassurer sur les intentions et la moralité sans tâche de l'auteur.

Courez voir ce film avant que ne passent effectivement les lois qui pourraient transformer ce cauchemar en réalité.
Courez vous régaler du jeu époustouflant de Antoine-Olivier Pilon, à la fois charmant, pervers et violent, et qu'on ne peut s'empêcher d'aimer.
Courez voir Mommy, son courage et sa force de vie surhumaine.

C'est vrai. L'amour ne sert à rien. C'est ce qui le rend indispensable.

 Pégéo, un jour de plus où les gens raisonnables nous font peur.


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