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« Les fils de rien, les princes, les humiliés » de Stéphane Guibourgé : French History X …

Par Alyette15 @Alyette1

« Les fils de rien, les princes, les humiliés » de Stéphane Guibourgé aux Editions Fayard 

1ère de couverture

1ère de couverture « Les fils de rien, les princes, les humiliés » de Stéphane Guibourgé aux Editions Fayard


« Les fils de rien, les princes, les humiliés »
est un roman sauvage
. Il appartient à ceux qui le lisent de s’immerger dans ce torrent glacé au cœur duquel couve une écume féroce : celle d’une nature insoumise, mais aussi celle de la nature humaine personnifiée ici par un anti-héros au tempérament obscur qui le temps d’une jeunesse désaxée choisira la violence et l’appel incantatoire de la meute.

Falco est cet homme de la confusion. Il a 47 ans, vit à proximité de la forêt et serre les poings. A ses côtés, ils sont peu : une femme, un fils, un ami. Tout autour l’espace infini où l’on peut se cacher, laisser le monde derrière soi.  Falco cherche à bâtir un toit, il se souvient, égrène le chapelet des années et celui de cette fureur qui s’enracina en lui.

Au commencement il y eut le père à la main leste et à l’avenir délesté de perspectives. Du jour au lendemain, plus rien ou alors pas grand-chose. La grande chaîne à produire hoquète, les ouvriers aussi. Déclin social des années 80 dans les zones d’ombre. L’environnement d’enfance sera la banlieue rouge avec ses cités où les shooteuses se cueillent comme des amanites tueuses. Le père cogne, Falco s’exile. A proximité, une autre famille, les gitans aux regards brulants qui fument et volent. Falco résiste, il apprend bien à l’école mais aussi de son frère, l’ange mélomane qui disparaît avec ses noirs et ses blanches sous le bras.  Du jour au lendemain, plus de nouvelles. Demeure le néant et la quête d’une autre fratrie. Pour Falco, les nouveaux frères d’infortune seront les skinheads. Ceux qui baisent, boivent et bastonnent. Ceux qui vont au stade le crâne à nu et le cœur dégringolé dans les poings. Emmenée par Lev, le leader au discours galvanisant, la meute entre dans la ville. Aucune indulgence, simplement mettre à terre au nom d’un ordre nouveau. Les sans-grades n’ont plus ni banderoles ni idéaux, ils portent des rangers et distribuent les raclées. Nés au cœur de la peur, ils font de la terreur leur chant du partisan. Un hymne de tristesse et de sang qui mènera Falco dans la plus extrême des dérives. ..

Emporté par un style au lyrisme vigoureux dénué de toute préciosité, « Les fils de rien, les princes, les humiliés » est un cri d’indignation dans un monde qui le camisole trop souvent. Sans complaisance, ni larmes amères, Stéphane Guibourgé entre dans la chair de son personnage et ne dégaine à aucun moment la tirade analytique. C’est par le corps de Falco que le romancier nous tient. Ce corps agité de soubresauts, de remords et de bile. Ce corps qui se débat, exulte, jouit et  tente de tailler dans la pierre  son ultime résistance. Pour ne pas mourir, pour un droit au pardon. Pour être un homme, à nouveau.

Un roman tripal éclairé d’une poésie à la Blaise Cendrars et mâtiné d’une fougue vacharde à la Cavanna. Un roman de testostérone fragile où se débat un cœur d’enfant qui ne renonce pas. Vivement conseillé pour se dégourdir les neurones en cette rentrée littéraire qui  a trop forcé sur l’antimites.

Astrid MANFREDI, le 12/10/2014

Informations pratiques :
Titre : « Les fils de rien, les princes, les humiliés »
Auteur : Stéphane Guibourgé
Editeur : Fayard / Roman
Nombre de pages : 200
Prix France : 17 euros

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Catégorie : Le coin des romans, Mes recommandations culturelles Mots-clés : écriture féminine, Critique littéraire, Editions Fayard, L'humeur de la chroniqueuse, Rentrée littéraire 2014, Romancier, Stéphane Guibourgé, Un oeil sur la planète

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