Magazine Cinéma

Un ange a ma table - 7,5/10

Par Aelezig

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Un film de Jane Campion (1990 - Nouvelle-Zélande) avec Kerry Fox, Marina Bernecker, Kevin J. Wilson, Iris Churn

Etrange et pénétrant...

L'histoire : Années 40. Nouvelle-Zélande. La petite Janet grandit dans une famille très pauvre. Ultra timide, elle a bien du mal à se faire des amis, mais ne se pose pas trop de questions, la vie est un grand mystère qui lui échappe ; elle vit au jour le jour et adore sa famille. Elle découvre un jour la poésie et se prend de passion pour cet art. Elle devient institutrice, mais continue d'écrire des poèmes. Toujours aussi terriblement craintive et introvertie, son comportement dérange et on lui "suggère" de faire un petit stage en institut psychiatrique...

Mon avis : Un film méconnu de Jane Campion (pourtant Grand Prix du Jury à la Mostra de 1990) et une étonnante découverte. Un peu inclassable. Le parcours d'une femme qui semble habiter sur une autre planète (ce qui lui vaudra plusieurs années d'internement comme schizophrène... alors qu'elle ne l'était pas), naïve, innocente, sensible, habitée par la poésie... Elle a publié plusieurs romans, des recueils de poèmes et trois autobiographies (reprises par le film) ; elle est très connue dans son pays et méritait bien ce biopic.

Dommage, je n'ai pas réussi à trouver des photos très nettes.

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Ce personnage est assez incroyable et terriblement attachant. Enfant rondouillette, à la stupéfiante chevelure rousse et frisée, issue d'un milieu plus que modeste, elle est terriblement timide, prête à faire n'importe quoi pour se faire des amis, mais ne sent finalement bien qu'en compagnie de ses trois soeurs. Elève brillante et solitaire, elle découvre la poésie comme un enchantement qui bercera toute sa vie et la tiendra encore plus éloignée du monde réel. Jeune femme, à l'âme juvénile et au corps vierge, elle semble n'avoir aucune arme, aucune carapace, et chaque chagrin qu'on lui cause, parfois sans le savoir, est un bouleversement. Mais son visage toujours s'illumine chaque fois qu'elle commence à écrire...

C'était une époque où les maladies mentales étaient un peu toutes regroupées dans le même sac, et les asiles rassemblaient fous furieux et psychopathes, mais aussi simples trisomiques, dépressifs ou personnes un peu lunaires, comme Janet. Quel choc de se retrouver au milieu de personnes complètement à la masse ! C'est à devenir dingue soi-même. Ils avaient de drôles d'idées à l'époque... Encore que, aujourd'hui encore on n'hésite pas à envoyer les suicidaires dans le même genre d'établissement "mixte" : bonjour le réveil, bonjour l'ambiance pour se remonter le moral...

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C'était aussi la grande mode des électrochocs, terribles, pour soigner tout ce petit monde, voire de la lobotomie (Vol au-dessus d'un nid de coucous est magistral sur le sujet). On se demande comment ce petit oiseau fragile supporte l'internement et les souffrances électriques... Sans doute par son esprit qui voltige dans un autre monde. La publication de son premier livre et l'apppui de ses amis écrivains a fortement contribué à sa "libération" de l'asile.

Le film est structuré en trois époques : l'enfance, heureuse, ludique, innocente ; la jeunesse, l'affirmation de soi... et l'internement ; la sortie de la chrysalide et le succès littéraire. Alternance de paysages époustouflants et de gros plans serrés sur les visages, qui accentuent la méchanceté de certains et l'incroyable innocence de Jane. On pense évidemment à La leçon de piano ou à Holy Smoke, pour les cadrages, la lumière, la sensualité, mais aussi à Bright Star pour l'amour de la poésie, le côté parfois contemplatif et les images somptueuses. Ambiance.

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La première partie est un peu longue ; je commençais à m'ennuyer avec cette petite rondouillarde, tout en me demandant dans quoi j'étais tombée : une histoire de gosses ? Je n'avais jamais entendu parler de ce film. Mais ça passait sur Arte et c'était Jane Campion, donc aucune hésitation. Et puis au moment même où je me posais des questions... soudain le charme a pris. J'ai voulu suivre cette petite fille et je me suis laissée emporter par son histoire.

L'actrice qui incarne Janet adulte, Kerry Fox est fabuleuse ! Empêtrée par son corps, empotée, les dents cariées, le vêtement minable... et ce visage qui passe par toutes les expressions et irradie lorsqu'elle sourit (souvent quand elle est seule, sinon... elle a du mal !)... Une merveille. Figurez-vous que j'ai cru pendant tout le film que c'était... Cate Blanchett ! Avec 20 kilos de trop, une perruque, un film de jeunesse, quoi (elle avait vingt-et-un an en 1990, c'était plausible). Même regard de chat, même nez droit, même sourire large, aux lèvres bien dessinées. J'ai été stupéfaite de voir au générique que ce n'était pas elle. Bizarre. Moi qui ADORE Cate, comment ai-je pu me méprendre à ce point...

Un film à découvrir pour ceux qui aiment Jane Campion.

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Y a quelque chose, non ?


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