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Des idées à la louche

Publié le 15 octobre 2014 par Detoursdesmondes
Arbre-cuiller

Voilà une exposition jubilatoire comme on les aime ! Fonctions, matériaux, symboliques ... que de diversité dans ces cuillères du monde entier ! Les cuillères ne poussent pas dans les arbres mais bien du génie créateur des hommes de tous les lieux et de toutes les époques !
À découvrir à la Bibliothèque Forney jusqu'au 3 janvier.
Cuiller-liberia

Nous avions déjà eu une belle mise en bouche il y a deux ans avec l'exposition-vente de Serge le Guénan. Le côté esthétique était alors essentiellement valorisé.
Cette fois, ce sont Edith et Jean Metzger qui nous font partager leur passion et leur quête autour de ces 400 objets "témoins de vies". Des pièces exceptionnelles côtoient des oeuvres plus modestes, la capacité inventive de l'homme est mise en avant ainsi que la fonction médiatrice de la cuillère vue comme un outil de lien social.
Cuillersjpg

Si l'on pose la question à Jean Metzger le pourquoi de sa collection, il écrit dans l'avant-propos de son livre : ..." existait celui (le plaisir) de perpétuer le souvenir de mon père. En effet, il avait déterré une cuillère dans le camp de prisonniers de guerre où il était détenu. Or cette cuillère en étain portait une inscription : "Que Dieu nous bénisse". Il l'a gardé précieusement après son retour."
Cet émouvant témoignage souligne encore combien cette exposition est un éloge à notre communauté humaine et, au-delà du simple objet, aux multiples façons que l'homme a su développer pour vivre (pour le meilleur ou pour le pire) en société.(1)

Cuillers-afrique

À noter que nous retrouverons prochainement Jean Metzger puisqu'il nous fait l'honneur et le plaisir de participer à notre rencontre du mardi 16 décembre prochain : La collection : une oeuvre d'art ? organisée à la mairie du 15ème.
Le très bel ouvrage Histoires de cuillères qui accompagne l'exposition, publié à compte d'auteur, est très accessible (26 euros) et mérite réellement d'être acheté.
(1) Se souvenir nécessairement des lignes terribles de Primo Levi :
... sans compter les énormes bénéfices réalisés sur le trafic des cuillères. Le Lager n'en fournit pas aux nouveaux venus, bien que la soupe semi-liquide qu'on y sert ne puisse être mangée autrement. Les cuillères sont fabriquées à la Buna, en cachette et dans les intervalles de temps libre, par les Häftlinge qui travaillent comme spécialistes dans les Kommandos de forgerons et de ferblantiers : ce sont des ustensiles pesants et mal dégrossis, taillés dans la tôle travaillée au marteau et souvent munis d'un manche affilé qui sert de couteau pour couper le pain. Les fabricants eux-mêmes les vendent directement aux nouveaux venus : une cuillère simple vaut une demi-ration de pain et une cuillère-couteau trois-quarts de ration. Or, s'il est de règle qu'on entre au K. B. avec sa cuillère, on n'en sort jamais avec. Au moment de partir et avant de recevoir leurs vêtements, les guéris en sont délestés par les infirmiers, qui les remettent en vente à la Bourse. Si on ajoute aux cuillères des guéris celles des morts et des sélectionnés, les infirmiers arrivent à empocher chaque jour le produit de la vente d'une cinquantaine de ces objets. Quant à ceux qui sortent de l'infirmerie, ils sont contraints de reprendre leur travail avec un handicap initial d'une demi-ration de pain à investir dans l'achat d'une nouvelle cuillère.
in Si c'est un homme, chapitre 8. (Trad. Martine Schruoffeneger)
Photos de l'auteure, septembre 2014.

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