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L’assurance peer-to-peer, prochaine étape de la désintermédiation ?

Publié le 21 octobre 2014 par Pnordey @latelier

Informé et connecté, le client doute de la pertinence des anciens corps de métiers et préfère prendre des décisions reposant sur ses propres informations. Les acteurs du web sont peut-être les plus à même de devenir des plateformes d’assurance P2P.

Deux phénomènes indépendants expliquent l’arrivée massive d’acteurs dans l’économie du partage en P2P. Le contexte économique défavorable pousse les consommateurs à rechercher activement des opportunités d’arbitrage entre les services. Les comparateurs de prix n’ont en effet jamais connu autant de succès. L’autre aspect est la confiance dans la sécurité des transactions sur l’internet qui, au regard des difficultés qu’ont eu les fondateurs de PayPal pour rassurer les consommateurs, a beaucoup changé en l’espace de seulement dix ans. Néanmoins, ce n’est pas la "solidarité universelle" que le P2P compte changer à court terme, mais plutôt la solidarité choisie, non obligatoire, comme celle des appareils nomades. Le secteur des assurances peut donc représenter une opportunité pour les startups et autres entreprises du domaine du P2P. Car en effet, la fonction historique d’un assureur est d’aggréger suffisamment d’information pour optimiser les coûts selon les souscripteurs. Or, à l’âge de l’information, les assureurs ne sont plus les seuls sur le marché de l’information et les géants du web ont su monétiser une quantité d’information donnée librement par les consommateurs eux-mêmes. Le secteur de l’assurance a toujours espéré arriver à ce niveau de connaissance-client.

Quand la multitude sert des intérêts particuliers

Actuellement, les modèles d’assurance en P2P se divisent en deux catégories selon l’importance qu’ils donnent aux assureurs traditionnels dans la couverture du risque. Par exemple , Friendsurance et Bought By Many permettent d’assurer en P2P un petit montant de risque et font appel à des assureurs traditionnels à partir d’un certain seuil. À l’inverse, et avant qu’il ne ferme faute d’avoir su monétiser profitablement son exercice, le service PeerCover proposait à ses souscripteurs d’être assurés à la hauteur du bien.

Toutefois, la façon dont Bought By Many prétend unifier des souscripteurs pour abaisser le coût d’une assurance traditionnelle n’est pas exactement similaire aux tentatives – parfois réussies – de lobbies ayant un poids suffisant pour bénéficier de tarifs préférentiels. L’innovation de Bought By Many tient à l’agilité avec laquelle les consommateurs peuvent conclure des contrats groupés pour abaisser les coûts. Bought By Many n’est donc pas une façon de monter des lobbies suffisamment puissant pour exiger une baisse des prix. Bien plutôt, c’est une plateforme où des consommateurs s’associent en temps réel pour abaisser le coût moyen. Le fonctionnement de Friendsurance, disponible seulement en Allemagne, repose sur la connection des souscripteurs à un réseau d’amis comme sur un réseau social. Les avantages sont variés, de la réduction des coûts de gestion à la diminution du risque de fraude. Louis de Broglie, ancien actuaire et PDG de insPeer, connaît le milieu professionnel de l’assurance pour y avoir travaillé. Installé en France, insPeer n’est pas encore lancé mais affiche déjà son cœur de cible, les voitures et l’immobilier.

L’information, au cœur de l’assurance et des réseaux sociaux

L’histoire de la mutuelle, comme celle d’une partie des produits financiers contemporains, a été très influencé par le secteur de l’agriculture qui connait des risques trop importants pour fonctionner sans couverture. L’économie du partage a connu un succès indiscutable depuis KickStarter et Airbnb. Beaucoup de startups se lancent donc à l’assaut de secteurs – plus ou moins réglementés – avec en tête l’objectif de conquérir des parts sur un marché réticents aux innovations. L’industrie hôtelières a été jusqu’à demander des mesures législatives pour contrer l’arrivée d’acteurs disruptant un mode de fonctionnement historique en plaçant le partage au cœur du processus. Mais au contraire du tourisme, l’assurance n’a pas de réelle proximité avec ses souscripteurs. Si la fidélité des consommateurs pour une assurance plutôt qu’une autre est un phénomène bien réel, elle s’explique par l’inertie et la complexité des choix à faire pour les consommateurs non-spécialistes. Selon les chiffres du secteur, les souscripteurs d’une assurance traditionnelle estiment dans leur majorité que les tarifs sont sans rapports avec les risques couverts.

Réunir une multitude de consommateurs pour obtenir des prix plus bas rejoint une certaine tendance que Groupon a su convertir en business model. Or ce secteur de l’assurance repose sur la gestion de l’information, un domaine prisé par les géants de web depuis le début des années 2000. C’est l’exemple de la remontée dans la chaîne de valeur de Facebook qui, d’un intranet scolaire est en passe de devenir la banque avec une connaissance client historique. La naissance d’insPeer en France prouve s’il le fallait la vivacité des entreprises numériques à vouloir conquérir des espaces encore vierges.


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