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Le Juge

Par Onrembobine @OnRembobinefr

[Critique] LE JUGE

Titre original : The Judge

Note:

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Origine : États-Unis
Réalisateur : David Dobkin
Distribution : Robert Duvall, Robert Downey Jr., Vincent D’Onofrio, Vera Farmiga, Jeremy Strong, Billy Bob Thornton, Leighton Meester, Dax Shepard, Balthazar Getty…
Genre : Drame
Date de sortie : 22 octobre 2014

Le Pitch :
Hank Palmer est avocat. Riche, réputé, cynique, insolent et surdoué, il ne se démonte jamais et collectionne les victoires, quitte à défendre d’authentiques coupables. Au décès de sa mère, il est obligé de revenir dans la petite ville de son enfance et se retrouve face à son père, un juge inflexible, avec lequel il ne s’entend plus du tout depuis de nombreuses années. Quand ce dernier est accusé d’avoir volontairement renversé un homme, Hank décide de prolonger son séjour et de devenir son avocat, malgré les réticences des deux parties et l’état lamentable de leur relation…

La Critique :
Le Juge fait partie de ces films qui reposent en grande partie sur leurs comédiens. Ici, c’est le duo vedette, composé de Robert Duvall et Robert Downey Jr. qui mène bien sûr la danse et justifie du même coup, tout le reste. Ils sont remarquables tous les deux.
Robert Duvall tout d’abord, retrouve un grand rôle à la hauteur des plus beaux chapitres de sa longue et prestigieuse carrière. Dans la lignée du paternel autoritaire de La Nuit nous appartient, de James Gray, le père du long-métrage de David Dobkin, un juge old school plutôt taciturne, permet à Duvall de composer un personnage complexe car tiraillé par des émotions parfois contradictoires, et harcelé par des démons insidieux. Une composition dont il s’acquitte avec la pudeur et la sensibilité qu’on lui connait, pour au final livrer une performance déchirante, grandement responsable de la réussite de l’ensemble.
Plutôt connu pour avoir incarné de solides seconds couteaux, Robert Duvall est dans ce sens réputé pour exalter le talent de ses partenaires, en créant une émulation positive. Dans Le Juge, il est le point d’ancrage autour duquel tous les autres gravitent, y compris Robert Downey Jr., quand bien même, c’est lui qui tient le véritable premier rôle.
De retour à un cinéma plus intimiste et dramatique, sans effets-spéciaux ni super-héros, Downey Jr. apparaît d’une prime abord tel que nous l’avons l’avons laissé chez Marvel. Son Hank Palmer est arrogant, charmeur et son existence part gentiment en couille. Facile de penser à Tony Stark, surtout si on considère la place qu’a pris Iron Man dans la carrière de l’acteur depuis ses débuts sous l’égide du personnage créé par Stan Lee. C’est justement quand il se frotte à Duvall, que Robert Downey Jr. commence à retrouver une intensité beaucoup plus viscérale et positivement terre-à-terre. D’emblée, on croit à cette filiation abimée par des années de ressentiments refoulés. À l’instar de Robert Duvall, incroyablement investi car totalement au service d’un personnage douloureux demandant une dévotion totale (une scène s’avère particulièrement marquante), Downey Jr. fait tomber les défenses et, débarrassé de son endosquelette rouge et or favori, laisse s’exprimer une simplicité touchante, néanmoins toujours assaisonnée d’un caractère sarcastique revenant par touches fulgurantes, histoire de diluer l’émotion et la gravité et de ne pas tomber dans un marasme trop plombant.
Les deux Robert ont chacun une fonction bien spéciale. Ils assurent un équilibre qui permet au film de tenir sur la longueur et sont les garants de l’expression de sentiments mêlés qui assurent pour leur part l’universalité du propos.
Cela dit, ils ne sont pas les seuls à mériter des louanges. Vera Farmiga, l’une des comédiennes les plus douées du cinéma américain, incarne une sensibilité discrète mais indispensable à ce même équilibre, tandis que Billy Bob Thorton, principal antagoniste, lui aussi relativement discret, assure les arrières avec le talent et le charisme qu’on lui connait. Jeremy Strong pour sa part, est également impeccable dans un rôle pourtant casse-gueule, au coude à coude avec un Vincent D’Onofrio remarquable. Souvent sous-exploité, celui qui fit ses armes dans le Full Metal Jacket de Kubrick, est réellement impressionnant. À plus forte raison qu’il intervient sans crier gare, dans la peau d’un homme abimé par la vie et caractérisé par sa capacité à ravaler ses ressentiments et sa fierté pour la conservation d’un statu-quo familial fragile. Avec une pertinence louable, il livre une performance à laquelle il est difficile de rester insensible, car pleine d’authenticité et de simplicité.

Le Juge Vera Farmiga 300x200 [Critique] LE JUGE

Aux manettes, David Dobkin abandonne la comédie pure de ses précédents films (on lui doit Serial Noceurs, mais aussi Shanghai Kid 2 et d’autres trucs pas franchement mémorables) pour s’essayer au drame pur et dur. Bien aidé par la photographie brillante d’un classicisme inspiré de Janusz Kaminski (le directeur de la photographie attitré de Spielberg), il orchestre ce grand face à face avec beaucoup d’application. Sa mise en scène fait écho à une école de cinéma purement américaine. Un peu trop certainement tant sur un plan formel, Le Juge peine à trouver sa patine, trop englué dans des gimmicks certes parfois efficaces (on pense à ces nombreux film de procès sur lesquels Dobkin lorgne), mais dommageables à la flamboyance souhaitée.
Sur un scénario classique, surfant sur des thèmes chers à une dramaturgie éculée, comme la rédemption, Le Juge réussit néanmoins quelques belles envolées lyriques. Étudiant les relations entre un père et ses fils, tout en nous livrant un discours fédérateur sur la famille dans son ensemble, Le Juge parle aussi de deuil et du souvenir. Il prend place dans une Amérique pastorale de carte postale, où les apparences cachent bien souvent des drames lourds.

Lourd, Le Juge ne l’est jamais vraiment. La comédie intervient par petites touches parfois inspirées, parfois un peu moins, d’où le côté un peu bancal. Rien de très grave, tant la rythmique est assurée et permet au long-métrage de s’avérer passionnant et prenant. Derrière le vernis des apparences classiques, se cache une complexité tenue mais bel et bien présente. C’est à cela qu’il faut s’attacher pour pouvoir appréhender ce beau film dans son ensemble. C’est cette capacité à traduire une réalité identifiable qui caractérise vraiment Le Juge. Un grand film de comédiens donc, mais pas que.

@ Gilles Rolland

Le Juge Duvall Downey jr [Critique] LE JUGE
Crédits photos : Warner Bros. France


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