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Vie sauvage: quand l'affaire Fortin inspire Cédric Kahn

Par Filou49 @blog_bazart
28 octobre 2014

 vie-sauvage-mathieu-kassovitz  Je l’ai dit lors du billet publié dimanche dernier pour faire gagner des places pour voir le film, j'ai eu la chance d'assister à une avant première suivie d'une rencontre avec un des très bons  cinéaste français d'aujourd'hui, à savoir Cédric Kahn  qui a présenté son tout nouveau film "Vie sauvage", qui sort demain,  le 29 octobre, un film inspiré de l'histoire vraie de Xavier Fortin et ses enfants.

Le film s'inspire de l'histoire vécue des deux frères Okwari et Shahi Yena Fortin et de leur livre "Hors système", où ils racontent leur odyssée en compagnie de leur père, Xavier Fortin, qui les avait enlevés en 1997 alors qu'ils étaient âgés de six et sept ans. Arrêté en janvier 2009 dans le sud de la France, dans une grange où il vivait avec ses enfants, Xavier Fortin avait été condamné à deux mois de prison.

Ce fait divers avait pour «  héros » un père qui vit en clandestinité et de façon bohème avec ses deux fils qu'il a enlevés à leur mère  a d’ailleurs fait ‘l’objet d’un autre long métrage dont j’avais déjà parlé sur ce blog, un film sorti confidentiellement en avril dernier, un premier long métrage d’un certain Jean Denizot (à ne pas confondre avec Michel Denisot dont j’ai parlé hier).

 Cédric Kahn, comme Jean Denizot ont donc pris comme point de départ cette fameuse affaire Fortin dont on avait parlé beaucoup en 2009. Mais alors que Jean Denizot s’éloignait rapidement de ce fait divers pour faire une ode à la nature belle et contemplative, Cédric Kahn aborde plus frontalement le sujet,  mais sans pour autant se livrer à une reconstitution détaillée de la procédure et de la judiciarisation de cette affaire,  pour aboutir à une brillante réflexion sur la liberté pour chacun de choisir son mode de vie.

vie sauvage

Kahn, dont j’apprécie beaucoup le cinéma ( paradoxalement plus "trop de Bonheur", "Une vie meilleure" et "Les regrets" que "Roberto Succo" ou "l’ennui", ses films les plus adulés et les pls connus)  a totalement saisi le fort potentiel de ce faits divers, qui est à un mélodrame familial  sur un divorce qui se passe mal, et également un film d’aventure et de cavale, sur fond d’osmose  totale avec la nature.

 Comme le cinéaste nous l’a expliqué lors de la rencontre débat après le film,  la seule évidence pour lui c’est qu’il lui était impossible de prendre parti pour le père ou la mère, préférant s’attacher  au point de vue des enfants.

Ainsi "Vie sauvage" nous montre bien à quel point ces enfants victimes malgré eux ont pu être déchirés entre un amour inconditionnel pour leur père  et le manque de leur mère et de leur grand frère, tout en se satisfaisant de cette vie à la marge de celles des jeunes d’aujourd’hui, loin des désirs consuméristes que les enfants commenceront toutefois à envissager avec l’adolescence.

 "Vie Sauvage" s’attache également à nous expliquer par le menu détail le concret de la cavale du père et des enfants, les stratagèmes  qu’il faut mettre au point pour passer entre les mailles du filet pendant autant d’années, ainsi que  les  réseaus d’entraides  pouvant rendre possible la survie de ces trois personnes en cavale, et cette partie est d’autant plus intéressante à suivre que la presse l’avait passé sous silence au moment de la révélation du faits divers.

" Vie sauvage" est donc un beau et fort  témoignage sur le désespoir d'un père qui refuse de céder la garde exclusive à son ex-compagne, et fait un choix extrême, un témoignage de l'amour d'un père (un personnage pas forcément aimable, et à qui Mathieu Kassovitz, parfait pour le rôle offre sa folie et ses contradictions). pour ses fils.

Vie sauvage: quand l'affaire Fortin inspire Cédric Kahn

On voit que le Xavier Fortin du film de Cédric Kahn (qui est nommé différement dans le film pour des questions de droit) est un être totalement sincère, habité par son projet de vivre proche de la nature,  loin des considérations matérielles, une vie en conformité avec ses principes, en marge de la société de consommation et de ses dérives ;  mais qui en même temps va à l’encontre de la liberté qu’il prône en imposant ses convictions à son entourage.  

C’est ce paradoxe là qui est vraiment intéressant à cerner dans Vie Sauvage et que Cédric Kahn arrive à  parfaitement toucher du doigt .

 Et heureusement le film évite de verser dans le manichéen ou la partialité puisque la mère a également son point de vue, et même si on peut regretter qu’elle disparaisse totalement une bonne partie du film (pendant la cavale, mais on peut aussi le comprendre vu que le film n’est vu que du coté des enfants), les deux scènes dans lesquelles elle est présente sont extrêmement fortes. Il faut dire que c’est l’immense Cécile Salette, l’actrice qui monte en ce moment, qui l’incarne avec une intensité remarquable, parvenant superbement à faire exister son personnage, ses souffrances, ses craintes,  uniquement en quelques regards et quelques phrases.

 Bref, malgré un légère baisse de rythme dans la seconde partie du film (lorsque les enfants deviennent ados), Cette Vie Sauvage démontre, si besoin était, que Cédric Kahn aime les paris risqués et s’en sort souvent admirablement bien avec.

Bande annonce du film Vie Sauvage sur Ados


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