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We need to talk about kevin - 9/10

Par Aelezig

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Un film de Lynne Ramsey (2011 - USA, UK) avec Tilda Swinton, John C. Reilly, Ezra Miller

Douloureux, énigmatique, captivant.

L'histoire : Eva, au chômage, vit seule dans une petite maison très modeste que des inconnus viennent de maculer de peinture rouge, comme des projections de sang... Elle trouve enfin un emploi mais, brisée, anéantie par les démons du passé, va-t-elle enfin réussir à sortir du cauchemar et à reprendre une vie normale ? Tout a commencé vingt ans auparavant. Un couple amoureux. Puis la naissance d'un petit garçon, pas comme les autres. Un bébé qui hurle jour et nuit et une maman qui craque tant elle est épuisée, pendant que son mari tente de minimiser les choses. Un petit enfant qui refuse de grandir, de parler, de quitter ses couches, et qui nargue sa mère d'un regard noir. Autiste ? Non, dit le docteur, Kevin est normal. C'est juste qu'il n'est pas très réactif. Ca passera...

Mon avis : J'ai adoré ce film. Drame, mystère, psycho ; une réalisation d'enfer et une interprétation hyper classe. Du grand cinéma intelligent.

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La réalisation d'abord. Elle m'a happée jusqu'à la fin, alternant à un rythme très rapide les séquences flash-back et celles du présent. Au début, on est un petit peu perdu, parce qu'on ne nous révèle rien de ce qui s'est passé et de ce qui se passe... Pourquoi cette femme est-elle si seule et si désespérée ? Pourquoi les gens l'insultent-ils ? Rapidement néanmoins, les images d'autrefois nous mettent sur les rails d'une histoire terrible, tout en préservant le suspense : comment tout cela va-t-il se terminer ? On sait qu'il est arrivé une chose épouvantable mais on n'apprendra qu'aux ultimes moments ce qui est arrivé. C'est brillant et c'est passionnant. Afin de bien suivre l'histoire, un petit détail (facile, mais bien pratique) nous aide à toujours comprendre où on en est : dans le passé, Eva a les cheveux très courts ; dans le présent ils sont mi-longs.

Fantastique Tilda ! On ne pouvait trouver mieux pour incarner ce personnage presque aussi énigmatique que son fils. Mère incompétente qui a traumatisé son petit dans sa toute première enfance en ne supportant pas ses cris ? Ou tout simplement mère dépassée par un être différent, incompréhensible, cruel, psychotique ? Le visage de Tilda et son talent permettent toutes les interprétations : tour à tour froide et coupante comme la glace, puis attendrissante et tellement fragile, ou bien encore mère-louve qui protège sa petite fille des agressions de son frère aîné.

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Le jeune Ezra Miller est infiniment troublant, voire terrifiant. Sombre, visage fermé, regard cruel, demi-sourire diabolique. Ses traits rappellent ceux de Tilda. Pommettes très hautes, yeux légèrement bridés. Bien vu ! On dirait deux doubles contraires, côté ange et côté démon.

Mais qui est-il donc cet insupportable et destructeur Kevin ? Autiste, psychopathe, schizophrène ? Traumatisé par sa mère ? C'est ce qu'elle croit, et c'est ce qu'on essaie de lui faire croire : elle ne s'est pas occupée de Kevin comme il fallait, elle perdait patience, elle ne supportait pas ses bêtises... Elle ploie sous la culpabilité. Elle reste pourtant jusqu'à la fin une mère. Kevin est le sacrifice, le fardeau de toute une vie mais elle ira jusqu'au bout de leur histoire, courageuse, tenace, maladroite, aimante. Mais pas très douée pour la communication. Plusieurs fois, on voit Eva qui ouvre la bouche pour dire quelque chose et puis qui finalement se tait. Mais quelques soient les défauts d'Eva (on en a tous)... de là à avoir créé pareil monstre, il y a un océan ! Ce serait trop simple d'accuser toujours et simplement les parents. A mon avis, Kevin est un malade mental et c'est tout.

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On ne connaîtra pas en tous cas le verdict des médecins. D'autres ont probablement été vus, mais on ne nous les montre pas dans le film. On sait que Kevin a pris du Prozac (antidépresseur) puisque sa mère et son avocat s'en servent lors du procès, profitant de certaines allégations qui laissaient entendre que ce médicament pouvait chez certains provoquer des pulsions très violentes. Le titre prend tout son sens : il faut qu'on parle de Kevin. Le problème était là depuis la plus tendre enfance... mais personne n'a osé aborder le sujet de front ; et si tout repose sur le personnage d'Eva, il ne faut pas non plus tout lui mettre sur le dos et oublier la responsabilité du père qui refuse de voir, évite le sujet, et répond toujours à Eva qu'elle dramatise. Si on n'a pas parlé de Kevin, c'est aussi à cause du père ! Si l'on veut absolument des responsables, comme tend à le faire notre société paranoïaque d'aujourd'hui... car pour ma part, Kevin est juste née avec un gène de psychopathe et c'est tout !

En tous cas, le film est magnifique. Il prend aux tripes et vous hante longtemps...

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Les critiques sont unanimes, côté presse, côté public. A part les très méchants Cahiers du Cinéma : "We Need to Talk About Kevin" n'est au fond qu'un très mauvais remake de "Damien, la malédiction". Son seul horizon : celui, terne et sans la moindre aspérité de mise en scène, d'un petit cinéma crâneur et condescendant." N'importe quoi ! Ce n'est pas un film fantastique ni même d'horreur. Il n'est jamais question du diable... même si on aimerait bien que ce soit la raison du mal être de Kevin ! Une petite explication "fantastique" nous aurait rassurés quelque part ! "terne, crâneur, condescendant"... je ne vois pas en quoi ! Ce sont plutôt eux les condescendants... ils n'aiment jamais rien. Enfin, bon. Juste pour vous dire que, de temps en temps, il y en a un qui n'aime pas.

A voir absolument.

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