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La ministre de la Culture n’a pas le temps de lire, c’est grave ?

Publié le 03 novembre 2014 par Thibaultdelavaud @t_delavaud

(Si vous n’avez pas suivi « l’affaire ») :

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Bien sûr que c’est grave. Que Fleur Pellerin ait un emploi du temps très chargé, qu’elle ait une multitude de rendez-vous et de décisions à prendre, tout le monde en conviendra. Mais affirmer qu’elle ne lit pas par manque de temps est irrecevable : lire fait partie de son travail, de sa mission de ministre de la Culture. Qu’elle n’ait pas lu des livres de Patrick Modiano est certes dommage mais après tout, pourquoi pas. En revanche, qu’elle n’ait pas manifesté le moindre intérêt pour son œuvre et pour sa récompense est grave et très décevant. On lui annonce qu’un écrivain français vient de recevoir le Prix Nobel et que fait la Ministre ? Rien. Elle ne demande même pas à un conseiller de lui faire des fiches et des résumés des livres de Modiano, elle n’achète pas son dernier livre et s’empresse de le lire, même en diagonale. Non. Elle ne fait rien. Elle publie ce tweet, dont j’ignore s’il faut admirer le cynisme ou le culot.

Tweet Fleur Pellerin
« lire fait partie de son travail, de sa mission de ministre de la Culture »

Ce que cette déclaration révèle est multiple. Le discrédit de Fleur Pellerin est désormais très grand : les livres non seulement ne semblent pas l’intéresser mais elle ne fait même pas le « service minimum » que l’on pourrait attendre d’un ministre de la Culture. Comment fait-elle pour parler de Modiano ou de littérature lorsqu’elle rencontre des hommes de lettres, des conservateurs de musée, des acteurs du monde de la culture en France et à l’étranger ? On pourra rétorquer qu’un ministre doit prendre des décisions et gérer des dossiers. C’est vrai. Tout comme il est vrai qu’il n’est pas nécessaire d’être médecin pour être un bon ministre de la Santé, professeur pour être un bon ministre de l’Éducation Nationale… Mais il est selon moi nécessaire d’incarner la fonction que l’on occupe, d’être à la hauteur de celle-ci et surtout de donner l’exemple. C’est un très mauvais message envoyé à tous les partisans de la lecture, à ceux qui cherchent à la promouvoir et l’encourager (parents, professeurs, libraires…).  C’est également un très mauvais message adressé aux auteurs : la crédibilité de Fleur Pellerin à les défendre et à les comprendre est entamée. Fleur Pellerin a également été ministre déléguée à l’Économie Numérique (de juin 2012 à avril 2014). Et comme elle ne lit plus depuis deux ans, il y a fort à craindre qu’elle n’ait jamais lu d’ebook.

Fleur Pellerin, à Paris le 30 octobre 2011

Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication

Face au manque de temps : s’imposer la discipline de lire

Cela étant, la ministre se fait l’écho d’un sentiment que partage un grand nombre d’individus qui affirment : « vouloir lire mais ne pas en avoir le temps ». Avec l’essor de la télévision d’abord puis d’Internet et des jeux vidéos, lire un livre est devenu un loisir parmi d’autres. Or, la lecture possède deux inconvénients par rapport aux autres loisirs : demander un effort intellectuel et être chronophage. Il est vrai qu’après une fatigante journée de travail, une soirée remplie à s’occuper des tâches ménagères, des enfants et du dîner, il est bien plus facile de regarder la télévision, une série ou surfer sur Internet que de se plonger dans la lecture d’un livre. Je pense qu’il s’agit là de la principale source de désaffection des gens pour la lecture et une des principales causes de la crise du livre. Fleur Pellerin est à ce titre représentative d’un très grand nombre de Français.

« la solution est de trouver du temps pour lire »

On peut très facilement se laisser emporter par le rythme parfois effréné de la vie quotidienne et délaisser complètement la lecture au profit de loisirs plus immédiats et prenants. Mais face à ce constat d’échec, la solution est de trouver du temps pour lire, se dégager des plages horaires de lecture : s’imposer de lire vingt minutes avant de s’endormir, lire dans les transports etc. Lire peut demander une discipline, tout comme la pratique d’un sport. Se forcer à lire peut ainsi être une très bonne résolution, une exigence positive que l’on s’impose à soi-même. Elle permet en outre de trouver une double satisfaction : la satisfaction de réussir à respecter la discipline que l’on s’impose et surtout, l’immense satisfaction de retrouver l’univers littéraire, les émotions qu’il procure, les réflexions qu’il suscite et le plaisir qu’il nous offre.

Rien n’est donc perdu pour Fleur Pellerin, ni pour tous ceux qui n’ont plus le temps de lire. Et la ministre se grandirait en donnant cette fois-ci l’exemple : il lui suffit de rouvrir un livre et de le lire.


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